Bonjour Sylvain
Bel article, comme d’habitude. Sérieux, équilibré et convainquant, comme d’habitude. Permettez-moi quand même de vous poser une question et d’apporter quelques bémols. La question : depuis combien de temps les expériences que vous avez citées ont-elles été initiées ? Bref, avons-nous assez de recul ?
Mes réflexions. Nous parlons de motivation, et il faudrait la définir. Enfin, il y a plusieurs définitions.
D’abord, la motivation se produit par l’expérience d’un vécu réel ou imaginaire du beau, du bien, du vrai. C’est parce que je suis au contact du beau, du bien et du vrai que cela va m’inciter à agir. Ces notions sont intimes, aussi nous ne sommes pas tous sensibles aux mêmes expériences. Pour certains, les Lettres communiquent ce beau ; pour d’autres ce sont les maths (Daniel Tammett) ou la musique, ou les jeux vidéo. L’imaginaire est d’ailleurs toujours plus beau et plus vrai que le réel. Sauf quand on visite Madagascar J
Ensuite, la motivation est l’anticipation d’une réussite personnelle. C’est parce que je me vois réussir dans l’avenir que je vais agir. Or là, il y a beaucoup d’efforts à faire car la Société n’offre pas les moyens de réussir à tout le monde. Aller à l’école et donner de l’argent, peut-être, mais après ? Pour quoi ? Que la société promette un avenir à tous, et vous verrez que les élèves seront beaucoup plus motivés. Et sans prime !!! L’ascenseur social est en panne, et ce n’est pas quelques sous qui vont motiver les djeun’s. L’école n’est pas une finalité. Beaucoup de jeunes ne savent pas quoi faire dans la vie (et puis tout est bouché dit la société). Que les psys scolaires soient mieux formés (cad qu’ils connaissent mieux le monde du travail) et aident nos jeunes.
Cette motivation par anticipation d’une réussite personnelle se décline en 2 variantes. Certains vont se focaliser sur les étapes et les techniques à mettre en œuvre pour réussir (les moyens). Ils peuvent échouer parce qu’ils n’ont pas une vision globale de ce qu’il faut faire, et ils se découragent alors. D’autres, au contraire, vont se focaliser sur la fin. Ils vont faire l’expérience du beau, du vrai, du bien et vont se sentir capables de faire. Mais ils auront oublié les moyens à développer. Ils peuvent alors échouer et perdre toute motivation. Il faut donc avoir un vécu du conscient de la fin et des moyens. Cela s’enseigne.
La motivation est le résultat d’une interaction entre l’individu et la société. L’individu doit avoir un ou plusieurs objectifs. Plus l’objectif est clair et précis, plus il y aura de la motivation. Cet objectif crée un besoin qui entraîne une tension et déclenche la décision. La motivation n’est pas un état stable et permanent (A. Weinberg).
On parle aussi de motivation intrinsèque et extrinsèque (Deci, Ryan). La motivation intrinsèque est déclenchée par l’intérêt pour l’activité et se nourrit grandement de sentiments. Les objectifs : autonomie, réalisation de soi, épanouissement personnel, satisfaction du travail bien fait. La motivation extrinsèque est orientée vers la rentabilité de l’activité (calcul coût/bénéfice ; on appelle cela l’instrumentalité). Les objectifs : promotion sociale, valorisation de soi par rapport aux autres.
Bon, faute de temps, je vais raccourcir. Il y aurait pourtant tant à dire. Dans les entreprises on rechigne à accorder des augmentations de salaire car cela ne développe pas la motivation. Ce sont donc des primes ponctuelles qui sont distribuées. Mais pour que la prime entraîne la motivation, elle doit être équilibrée. Une prime trop élevée ou trop faible ne motive pas (je rappelle la motivation extrinsèque : rapport coût/bénéfice).
Le système dont vous parlez, c’est de la motivation extrinsèque. Cela ne s’adressera qu’à une partie des élèves. Mais une fois ce système de prime installé durablement, et déclenché automatiquement, la motivation va chuter. Je prends le pari !!!
La contrainte, la peur, les sanctions ne motivent pas non plus. Donc revenir à un état antérieur est contreproductif. On progresse mieux dans la sécurité. Naturellement, certaines personnes éprouvent le contraire, elles se nourrissent de stress. Nous sommes des êtres sociaux mais aussi des individus. Il n’y a pas de solution universelle.
Vous voulez des élèves motivés ? Voici quelques solutions. 1. Réformer la Société pour que chacun ait sa place et que chacun soit respecté. Briser le fonctionnement pyramidal et malthusien de la société. 2. Rendre les établissements scolaires attrayants (couleurs, musique, confort…). Les écoles ressemblent à des prisons. Voir le projet SPECTRUM d’Howard Gardner et quelques écoles dans les pays du Nord. On met des tableaux dans les entreprises, pourquoi pas à l’école ? 3. Avoir de vrais psys d’orientation qui vont auditer les élèves. 4. Que tous cessent de critiquer certaines matières. Elles sont toutes importantes, elles sont toutes en relation. Chacune répond à sa façon sur ce qu’est l’Homme. 5. Que les profs soient respectés, mieux formés, et que les mauvais profs soient licenciés ou exercent un autre métier dans l’EN. Le prof est essentiel, il faut lui reconnaître l’importance de sa place dans la société. Internet et les ordinateurs ne remplaceront pas un cours présentiel car il y a une différence entre l’information (le cours que l’on écoute ou lit) et la connaissance (qui est l’expérience personnelle d’un cours, la pratique des informations recueillies dans un autre contexte). 6. Il faut dispenser ses cours comme un acteur, rendre le cours extraordinaire, énigmatique, montrer en quoi le cours est utile dans la résolution de problèmes extrascolaires. Parce que l’école n’est pas une fin (sauf pour certains bien sûr), mais un moyen de se réaliser, de conquérir l’autonomie et la liberté. 7. Proposer des temps de méditation intérieure sans MP3, téléphone ou autre objet : cela favorise l’évocation. Les gens deviennent de plus en plus des êtres de perception, non de réflexion. 8.9.10.etc.
Les économistes (Picketty,
Picketta lève la queue et puis s’en va) doivent-ils se mêler de tout ? Prix
Nobel d’économie ne signifie pas prix Nobel d’éducation. Curieux d’ailleurs que
ce prix Nobel n’existe pas alors qu’on s’extasie devant une découverte ou
invention, mais pas quand un pédagogue ou psychologue a découvert une propriété
importante. Tant pis, il y a toujours des entreprises pour bien payer.bye bye.
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