La « condition humaine » peut être soulagée ou aggravée par les conditions de vie qui lui sont imposées.
Pendant les premiers 2/3 du XX° siècle nos pères et nos grands-pères ont essayé de l’alléger en codifiant le travail pour protéger les travailleurs.
La plupart du temps les travailleurs d’alors étaient fiers du travail qu’ils accomplissaient et s’il y avait des suicides, ils relevaient le plus souvent de raisons personnelles intimes.
L’Europe et la mondialisation ont transformé l’individu en objet de production, au même titre que la machine, sans tenir compte de son humanité. A la différence de la machine qui est conçue pour faire un certain nombre d’actes dans un temps déterminé, on demande aux hommes d’en faire toujours plus sur un temps de plus en plus court.
Quand les hommes ont besoin de sécurité, on leur répond mobilité ; quand ils ont besoin d’une vie stable, on leur répond flexibilité ; d’un salaire décent, précarité ; de repos, rentabilité ;
de dignité, humiliation et soumission...etc, etc..
Et puis ces autres mots : rendement, productivité, concurrence,et surtout...profit.
Certains vont protester que cette conception du travail, inventée par des gens qui n’ y sont pas soumis, est « moderne ». La plus part du temps d’ailleurs ils confondent « modernité » et « progrès ».
Il n’ y a pas de progrès pour l’humanité à se voir transformée en machine pour le profit de quelques uns. Le progrès serait d’améliorer la vie, mais c’est le contraire qui se produit.
On déshumanise les travailleurs pour en tirer un maximum de profits : c’est l’esclavage économique.
Il est certes plus facile d’évacuer le problème d’un revers de main en se disant que le suicide est une affaire personnelle et lié à la « condition humaine ».
C’est d’ailleurs le comportement typique de nos contemporains et dont ne se privent pas d’abuser les PDG de ces industries qui s’excluent de toutes responsabilités sous ce prétexte un peu court.
La compréhension et l’empathie ne risquent pas d’étouffer ces irresponsables, ils peuvent donc continuer la conscience tranquille à pressurer d’ autres humains.
Dans ce monde« moderne » où l’ égoïste est de mise, on se lave les mains de tout ce qui peut arriver à l’autre : il n’est donc pas étonnant que M. Allard pense que c’est une affaire personnelle liée à la condition humaine et qu’il n’a pas à intervenir.
Bien sûr, il faut un peu d’imagination pour comprendre mais il semble que les Français ne soient plus capables d’imaginer quoi que ce soit qui ne les concerne pas directement et de se mettre dans la peau de l’autre.
Alors imaginons ensemble !
Vous avez 55 ans et vous travaillez depuis 30 ans dans une de ces grandes entreprises.
Vous avez appris un métier que vous maîtrisez parfaitement et que vous y exercer .
Un jour, vous êtes convoqué pour un entretien où l’on vous apprend que soit votre poste est supprimé, soit que vous commencez à être « trop vieux » pour l’occuper et on considère qu’un autre fera mieux ( ce qui reste à démontrer) à votre poste, bien que vous y ayez donné satisfaction jusqu’à ce jour.
On va vous recaser ailleurs dans un métier (ou un poste) duquel vous ignorez tout. Il va donc falloir balayer 30 ans d’expérience et se retrouver dans la position d’un débutant de 20 ans sans expérience.
Comment tirer un trait sur 30 ans de travail pendant lesquels vous avez donné satisfaction à votre employeur ?
On vous fait comprendre que vu votre âge, vous n’êtes plus bon à grand chose mais qu’il va falloir vous montrer dynamique dans ce nouvel emploi imposé.
Comment ne pas se sentir dévalorisé de se voir ravaler au rang de débutant quand on a accumuler autant d’expérience dans ce qu’on a fait si longtemps ?
Après une formation express et une période sur le terrain vous êtes convoqué pour une évaluation de votre travail dans ce nouveau poste.
Évidemment vous êtes un gros nul : vous n’avez pas atteint les objectifs (inatteignables) qui vous avaient été fixés et en 6 mois vous auriez dû acquérir une expérience équivalente à, au moins, 5 ans. Vous êtes un incapable !
Mais on va vous re-dynamiser tout ça !
Pour ce faire on va vous changer de poste, de métier, d’équipe. Évidemment, il va vous falloir tout réapprendre une nouvelle fois.
Re évaluation : toujours aussi nul pour les mêmes raisons. On re-dynamise....vers le 4° changement de poste en 2 ans !
Pour faire bon poids, on va peut-être vous proposer d’être « mobile » en vous offrant généreusement (vous êtes si nul !) un poste à Triffouillis-les-Oies, à 300 km de votre domicile et de votre famille et où une nouvelle fois vous devrez tout réapprendre.
De toutes façons on va vous presser comme un citron et vous jeter quand vous serez au bout du rouleau, au point où vous n’aurez plus envie de vivre sur des charbons ardents en attendant qu’on finisse de vous casser et vous déciderez de quitter cette vie.
Que pouvez-vous bien ressentir ?
(En fait on en a rien à branler de se que vous ressentez)
Vous êtes joyeux, optimiste et sûr de votre valeur ? Ou découragé,stressé ou anxieux pour un avenir qui ne s’annonce pas radieux ?
Vous restez impassible face à l’appréciation négative malgré vos efforts ou face à l’humiliation chaque fois qu’ on vous dit que vous n’êtes qu’un bon à rien ?
Vous restez de marbre quand vous considérez que les 2 dernière années ont effacé d’un trait de plume les 30 précédentes dans votre esprit et celui de votre employeur ?
Si vous êtes joyeux, impassible et de marbre, bravo !, vous êtes un robot ; vous êtes complètement déshumanisé, et aucun sentiment ne peut vous faire souffrir !
Et qui va se soucier d’un robot ?
Soyons donc satisfaits de l’ultra libéralisme et de son corollaire l’économie de marché qui font tant de mal à ceux qui n’en ont pas le moindre profit et qui ne peuvent que subir.
Leur mort est sans importance car elle n’est motivée que par des considérations personnelles où le travail ne tient aucune place.
Quand verrons-nous moins de rapaces PDG, managers, actionnaires ...qui ne se servirons plus des hommes comme des objets de profit inépuisables ?
Il serait temps -tous les débordements sont là pour nous en convaincre - de penser humainement plutôt que commercialement ou financièrement.
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