Article très intéressant, dans son domaine. Évidemment, la prospection, surtout en matière de politique internationale et de géopolitique, est un exercice extrêmement risqué, mais la théorie avancée est tout sauf absurde.
Cependant, je me demande s’il est vraiment pertinent de savoir si telle ou telle nation sera portée au pinacle du chœur international. Il serait bien plus intelligent à mon avis de se poser la question en termes régionaux.
Imaginons par exemple que la Turquie deviennent, de par sa position, la principale plaque tournante du commerce des matières premières, notamment énergétiques. Cela à coup sur en ferait la grande puissance commerciale mondiale et lui confèrerait une place de tout premier plan dans le concert des nations, peut-être en effet deviendrait-elle la première puissance mondiale (à défaut d’être une « superpuissance » comme le furent les États Unis d’Amérique). Mais quid de son influence et de sa marge de manœuvre si l’Europe et la Russie nouent un partenariat privilégié ? Si surgit un « axe » économique et industriel Paris-Berlin-Moscou ?
Sans alliés indéfectibles (et pas seulement circonstanciels) qui lui assureraient une zone de développement économique peu ou prou « vierge » (comme autrefois l’empire colonial pour la France, comme aujourd’hui l’Europe centrale pour l’UE, la rust belt pour les États Unis d’Amérique, la Chine continentale pour la République Populaire de Chine), une sorte de marché intérieur (ou du moins voisin) qui puisse servir de « réserve de potentiel de développement », que ce soit économiquement ou industriellement, la Turquie pourrait perdre rapidement sa prédominance nouvellement acquise, qui serait alors chèrement payée. En revanche, si la Turquie s’assure d’une « zone de repli économique », elle pourrait maintenir sa supériorité. Le gros problème serait, précisément, d’établir cette « zone de repli », qui correspond en général à la « zone d’influence » (culturelle, cultuelle, militaire ou autres).
Pour la Turquie, je vois deux voies d’aménagement d’une « région amie » :
- la voie « dummiste » qui passerait par un alignement et un rapprochement des pays à forte majorité musulmane proches derrière la Turquie
- la voie « turque » qui passerait par une unité des pays ethniquement et/ou linguistiquement turques (Turkménistan, Azerbaïdjan, etc.)
Seulement ces deux voies ne me semblent pas envisageable avant un laps de temps plus grand qu’une cinquantaine d’années. La « voie dummiste » à cause des conflits d’influence pérennes entre pays islamiques et des concurrences cultuelles, sans parler de la culture laïcisante de la Turquie (on nous présente le gouvernement turque actuel comme islamiste, mais il n’est pas très éloigné des démocrates-chrétiens allemands vis-à-vis de la religion). La « voie turque » à cause de l’animosité larvée entre la Turquie et les « stans » et l’extrême influence de la Russie sur eux.
Le problème se pose dans les mêmes termes pour les hypothèses de la Pologne et du Mexique, mais les obstacles me semblent moins infranchissables.
Plutôt que d’essayer de déterminer quelle nation pourrait être la première puissance mondiale dans quarante ans, il vaut mieux à mon avis essayer de déterminer quelle région du globe pourrait voir émerger les conditions de cette puissance. Sans oublier la possibilité que les grandes puissances mondiales du siècle futur puissent être des « associations » de nations.
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