• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


En réponse à :


Christian Wolff 19 mai 2010 23:46

Une « machine à vendre »… des petits livres sur l’éthique publiés par L’Harmattan…

Diable ! Si c’était là une manière de faire fortune, j’en aurai déjà écrit quelques uns. 

Non, sérieusement, si le sujet vous intéresse (et il doit bien vous intéresser, si vous pratiquez le bon père Kant), je peux vous recommander quelques uns des titres qui figurent dans les collections de cette fondation. Il y est question, par exemple, d’une éthique des petits actes (notion intéressante : qu’est-ce qu’un « petit acte » ?) ou encore d’un défaut qui fait un peu honte à ceux qui y sont sujets - la jalousie (comment la vaincre ? mais d’abord, comment la détecter ?).

Votre message en tout cas me suggère une chimère amusante : le Bobo mystique, le Soufi des Batignolles. Personnage très louche, en effet ! Il se trouve pourtant que nous vivons dans un monde où coexistent des gens comme Guy Bedos, Bernard Stiegler et Bahram Elahi. Il y en a même qui lisent Kant ! Et tous parlent d’éthique, parce qu’ils la vivent. Qu’est-ce qu’on peut faire de cette diversité de fait ? L’ignorer simplement ? Livrer le mot « éthique » à une pluralité irréductible d’interprétations particulières ? Car j’imagine que vous ne songez pas à refuser d’emblée au comique et au philosophe toute compétence à parler d’éthique, sous prétexte qu’ils plairaient aux « bobos »… Pour ma part je cherche plutôt les effets de cohérence et de convergence ; et comme je crois que l’éthique n’est pas une espèce naturelle, j’ai tendance à penser qu’elle doit faire l’objet d’une construction commune. Or je ne vois aucune raison de me méfier a priori d’une entreprise qui cherche à construire, justement, un espace où différentes voix (et pourquoi pas celle des bobos eux-mêmes ?) puissent être entendues et discutées du point de vue d’un problème commun.

Quel est ce problème ? J’ai tenté de le dire : la question est de savoir comment l’éthique individuelle peut se traduire en pratique. Chez Kant, une fois dégagés les principes de la moralité, c’est plutôt du côté des textes sur l’éducation ou dans la Doctrine de la vertu qu’on trouve de quoi se nourrir. Mais on y trouve finalement développées les intuitions morales les plus convenues, et on reste sur sa faim. Je n’ai rien contre la morale convenue, d’ailleurs : c’est un début. Mais il me semble que l’enjeu est de savoir s’il y a de l’invention en morale, si on peut développer de nouveaux outils pour la réflexion et pour l’action dans une perspective de transformation de soi. 
Or qu’il faille de toute manière inventer en la matière, parce que personne ne peut décider à notre place, ça n’a rien de particulièrement « subjectiviste » : je crois même que c’est le fond de la pensée de Kant. A moins que vous pensiez que la raison pure (pratique) ait la capacité de fournir, prêts à l’emploi, des contenus moraux universellement applicables ? Si vous arrivez au bout de votre lecture (le livre n’est pas trop épais), vous verrez que ce n’est pas possible.

Pour finir, et au risque d’avoir l’air de faire la morale, je dirais que la prudence est une vertu mais que la méfiance est un vilain défaut. Et pour le coup je serais volontiers pragmatiste : ne critiquons pas par principe ; jugeons sur pièces !

respectueusement,
CW


Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON


Palmarès