Salut Paul
Si tu commences à croire PISA, tu n’as pas fini. Pour le sujet que tu abordes, à savoir la discipline, il faut quand même se poser la question du protocole employé par PISA pour recueillir l’information. Or, quel est-il ? Tout simplement demander aux élèves leur impression !
« Estimez-vous que », « avez-vous le sentiment que », (…), tout cela n’est pas une méthode d’investigation plus sérieuse que les enquêtes de Biba : « Pensez-vous que votre mari vous trompe ». Et dire qu’on fait ensuite reposer les politiques éducatives sur ce genre de conneries !
Pour juger de la réalité d’un fait, le tribunal ne place pas le témoignage au rang de preuve ultime. En Histoire, on s’appuie d’abord sur les preuves archéologiques, puis les documents écrits officiels. En sciences, on suit un protocole rigoureux propre à chaque discipline, et on sait bien que les études longitudinales sont les plus fiables. Et PISA vient benoîtement nous dire que les adolescents disent la vérité.
Avant de poursuivre, je signale que j’avais écrit il y a quelques années (c’est vérifiable via le moteur de recherche d’agoravox), que pour sa première participation à PISA, Singapour serait première. Et Singapour est première ! Je rappelle que Shangaï (1er au classement en maths) est une ville, pas un pays, ce qui prouve que PISA qui prétend comparer les systèmes éducatifs, ne compare rien du tout puisqu’on ne peut comparer une ville et un pays. Sinon, pourquoi ne pas comparer Louis Legrand ou le lycée du Parc à un obscur lycée finlandais ! Je ferme la parenthèse.
Qu’en est-il de la discipline ? En France, il y a de profondes disparités entre établissements. Il y a des établissements d’élite et d’autres à l’abandon, qui accueillent une population délaissée. Les bonnes familles mettent leurs enfants dans le Privé ou dans les écoles publiques de centre-ville. Les autres établissements accueillent des enfants qui savent à peine lire, et qui pour beaucoup le français est une langue seconde, voire une langue étrangère. Quel effet cela produit-il ?
Eh bien, ces élèves sont intégrés aux classes normales. Ils ont d’abord un excellent comportement parce qu’ils viennent de pays où la discipline à l’école est très forte. Mais comme ils ne parviennent pas à intégrer le français suffisamment rapidement, ils décrochent dans de nombreuses matières. Ensuite, ils foutent le bordel parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. Et il suffit d’un élève indiscipliné pour entraîner les autres. Aujourd’hui, d’après les témoignages d’amis profs restés en France, l’indiscipline a gagné l’enseignement supérieur, et s’étend à des collèges et lycées jusque-là épargnés. Sans compter la fainéantise.
Les établissements scolaires français accueillent des élèves qui ne devraient pas y être. Je veux dire par là que de nombreux élèves français ont besoin de cours de civisme, de cours de français et de ne plus vivre dans les ghettos. Ensuite ils pourront intégrer un cursus classique. Mais l’Etat n’a nullement l’envie de le faire : dans ce système pyramidal, tout le monde ne peut pas être Président de la République, il faut organiser et entretenir la bêtise des uns pour magnifier l’intelligence des autres.
A Singapour, qui accueille comme la France, une population disparate, il n’y a pas de problème de discipline, et il n’y a pas d’établissement poubelle. A la fin du primaire, les élèves qui ont passé le PSLE (un examen), sont orientés dans différents types de collège en fonction de leurs résultats : l’express course (4ans), le normal academic course (4-5 ans) et le normal technical course (4ans). Il existe aussi des special education schools qui accueillent des élèves doués en musique, des enfants précoces ou au contraire des enfants qui ont des difficultés cognitives. Il y a plusieurs statuts pour les écoles, qui vont de l’école autonome aux « niche programme schools », en passant par les « independant schools » et encore d’autres trucs impossibles à résumer. Bref : variété et liberté. Sans compter qu’on peut faire ses études en anglais (langue obligatoire), et dans une autre langue (tamoul, chinois, malais), en fonction de ses résultats. Qu’étudie-t-on ? La même chose qu’en France, mais aussi des cours de civisme qui apprennent la politesse, le respect de l’autre, et d’autres types de cours qui n’existent pas en France, comme les cours de créativité.
A l’inverse, aux Etats-Unis, il n’y a pas de discipline dans la majorité des établissements. Le prof est à la merci des élèves, et surtout des parents. L’enfant est roi, c’est pire qu’en France. Et tu vas rire, mais c’est absolument vrai : les élèves et étudiants peuvent suivre les cours en pyjama ! Ils entrent et sortent de la classe ou de l’amphi comme ils veulent. Ils mangent et boivent en cours, s’embrassent, etc. Ca en fait de futurs adultes gâtés qui se croient être le centre du monde, mais sur le plan des acquis scolaires, ils ne sont globalement pas en retard par rapport aux Français.
En Chine, c’est le bordel dans les campagnes, et très strict dans les établissement de ville, comme à Shanghai. Ils ne font qu’étudier. C’est encore assez cool au collège, mais quand ils sont au lycée, ils étudient facilement jusqu’à minuit. Il y a cours le samedi toute la journée. Et le dimanche ? Ils étudient.
Maintenant que cela est dit, on pose la – même - question au Français, au Chinois de Shanghai et à l’Américain : « attendez-vous un long moment avant le début des cours ? », leur perception du « long moment » ne sera pas la même. Donc leur réponse ne peut être valide.
Tu veux une étude sérieuse ? mckinsey.com. Ce cabinet d’audit international a sorti en novembre une nouvelle étude sur les systèmes éducatifs. Mckinsey se déplace dans les établissements, ils analyse plusieurs documents différents. Il y a encore mieux, c’est la revue internationale d’éducation comparée : comparative education review.
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