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Adamantane (---.---.88.173) 25 avril 2006 13:38

L’ensemble de commentaires déclenchés par le papier initial est en effet riche et complexe.

Après avoir lu tous ces points de vues,
- les uns plutôt sérieux dans leur argumentation et leur emploi des faits avérés,
- les autres relevant davantage du règlement de compte verbal sous des formes assez simplistes, je suis comme le cinquantième partenaire d’un tour de table : ou je pense que presque tout a été dit, et je passe mon tour, ou je me dis qu’il me faut à tous prix exister à travers un commentaire original, quitte à travestir ma pensée...

Tout d’abord, voyageons dans le temps. Lorsque les arbalètes furent mises au point, les archers crièrent à la triche, et que la guerre avait changé de règles. Il faut tout de même savoir qu’une compagnie d’archers professionnels pouvait lancer en quelques minutes des milliers de traits, dont la blessure n’avait rien à envier à celle d’une baïonnette à barbes, et causer dans un carré d’infanterie autant de dommages que l’explosion d’une centaine de mines anti-personnel à fragmentation (J’ai lu ça dans Historia, où on ne rigole pas avec les faits, les textes et témoignages...).

Lorque les armes à feu furent développées, nouvelles protestations sur ce détournement des règles du beau combat et cette introduction du massacre généralisé, les boulets, rapidement explosifs, ignorant la distinction entre civils et militaires.

Puis il y eut toute l’évolution que nous connaissons. Sans compter les armes terrifiantes imaginées par la Science-Fiction, celles qui sont en gestation dans les laboratoires, en puissance dans les investigations fondamentales des physiciens atomistes et autres chercheurs.

La question posée par un commentateur, à savoir si les engins nucléaires sont ou ne sont pas des armes au sens usuel du terme, est un des premiers fondamentaux qui ressort de ces discussions.

Je la pose autrement :
- être une arme est-il un attribut essentiel d’un objet ou plus généralement d’un système,
- ou bien l’arme ne se manifeste-t-elle qu’à travers des manières particulières d’employer le dit objet ou système, quelle que soit la perspective visée (si j’ose dire) ?

Je n’ai pas la réponse.

Mais par exemple cette approche permet de mieux comprendre les stratégies de la menace et de la dissuasion, et pourquoi pour certains l’efficacité de l’arme est prouvée non par son emploi brutal (la violence est le dernier refuge de l’incompétence, ai-je lu dans Fondation), mais par la crédibilité de ses effets annoncés dans l’hypothèse d’un usage éventuel.

Un autre fondamental, peut-être celui sur lequel le citoyen lambda pourait être le plus sensible, c’est que ni la France, ni l’Europe n’ont conduit de réflexion publique sur les thèmes de base de la résistance aux agressions. Un commentateur a justement fait allusion à Munich : voilà ce qu’il en coûte de laisser prendre ce type de décision par des hommes qui ne sont pas « libres » ; les négociateurs français et anglais étaient alors prisonniers de leur opinion publique, qui les avait fait et pouvait les défaire.

Certes, il y a des études fines, raffinées, intelligentes qui ont été conduites sur le thème des stratégies de défense nationale et des batteries de moyens tactiques à acquérir pour les mettre en oeuvre.

Mais à part le défilé du 14 juillet, peu de consultation populaire ! Les spécialistes de la stratégie manipulent dans leurs aréopages des concepts dont le niveau d’abstraction est ... dissuasif. J’en sais quelque chose, pour avoir fréquenté la théorie de jeux, et vécu la difficulté de faire assimiler à des cadres d’entreprise les principes de base d’un exercice de stratégie tel que le jeu de Go, qui est certes subtil, mais pas au point que les extrême-orientaux soient capables d’en maîtriser dès dix ans règles et comportement gagnants, tout comme les Slaves le font pour les Échecs.

Je désespère de voir nos gouvernants, les visibles (élus) comme les cachés (technocrates) cesser de prendre en petit comité, avec en prime un exemple d’un rare continuité de vues entre tendances politiques supposées différentes, les décisions fondamentales qui nous concernent tous.

Pour moi, le pire n’est pas les 45 € prélevés sur mon pouvoir d’achat pour financer le M51. Ces 45 € sont le signe visible, le sacrement au sens le plus théologique du terme, d’une réalité secrète : la décision d’engager ces dépenses a été faite sans que j’aie jamais eu mon mot à dire.

Et, plus grave encore, ces décisions résultent de la mise en oeuvre de politiques tout aussi occultes, fondées sur des principes jamais explicités en termes intelligibles par tous, donc jamais débattus au niveau du citoyen de base (s’il en est d’autres ?).

Nous voilà donc, englués dans un système opaque, condamnés à débattre avec le soupçon d’information qui transpire ici ou là, livrés à nos peurs, soumis à nos préjugés, orientés par nos conditionnements.

J’ai l’impression que tous ces « programmes » (stratégiques, miltaires, économiques, voire sanitaires ou culturels) ont au fil du temps acquis comme une existence autonome, que ce sont eux qui modèlent les décisions et les événements, que tout se passe comme si nous n’étions que leurs ressources humaines, leurs esclaves mentaux, leurs sujets effrayés.

La géostratégie n’est peut-être en fait qu’une science d’observation, tentant de comprendre les mystères d’un système écologique dont nous n’aurions pas la maîtrise. Peut-être est-il né de nos oeuvres, mais il semble être en train d’acquérir son autonomie. Sommes-nous arrivés à un seuil, celui du retournement des valeurs, de l’irruption dans nos vies des desseins d’une entité qui nous dépasse ?

Comment faire pour résister à cette tendance ? Comment reconquérir le droit de participer à ces décisions qui conditionnent notre destin, et celui de nos enfants, et des enfants de nos enfants ?

En parler ensemble est une première étape. Peu importe pour ce faire qu’il y ait ou non quelques approximations dans le déclencheur du débat (ici, le ppier de tête). Peu importe même que certains, peu entraîneés encore aux règles du jeu de cette conctruction collective, en viennent aux mots faute de pouvoir en venir aux mains ; leurs petits dérapages sont contrôlés par les autres commentateurs, en attendant qu’ils le fassent d’eux-même.

Bon, j’ai tout de même trouvé quelque chose à apporter...mon désir est que cet apport ne soit pas original, mais partagé, ou du moins partageable.


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