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Tristan Valmour 2 septembre 2011 21:02

Article approximatif.

Comment ? Les méthodes d’enseignement auraient-elles changé ? Depuis quand ? Il faudrait dater quand même. Au collège, au lycée, à l’école primaire ? On ne sait pas. La même méthode pour ces trois niveaux ? On ne sait pas. En fait, on ne sait rien. Aucune caméra dans les salles de classe pour vérifier si les profs appliquent ce qu’ils ont appris dans les IUFM. Rien, nada.

L’auteur ne distingue nullement le savoir de la connaissance, il amalgame l’un et l’autre, et pourtant, ils sont résolument différents. Et David Ausubel, c’est pour les chiens ? Et la psychologie computationnelle, elle met le chocolat dans le papier alu.

Alors un apprenant serait un disque dur qui stockerait le cours dispensé par le professeur ? Comme ça, quoi. Copier-coller. Aucune autre démarche à effectuer. Simple. Et puis, cela a si bien fonctionné dans le passé. Ah oui, où sont les études qui le prouveraient ?

Voyons, alors si j’ai deux enfants du même âge, et que je leur donne la même éducation, ils auront bien entendu les mêmes idées, le même comportement. Ils voteront comme moi, liront les mêmes livres. De pures copies.

Euh, mais non, ça ne fonctionne pas comme ça un être humain. Et vous l’ignorez n’est-ce pas ?

Si on accepte qu’on ne lit pas, mais qu’on interprète. Si on accepte qu’on n’écoute pas mais qu’on interprète. Si on accepte qu’interpréter, c’est apprécier les nouvelles données à l’aune des données déjà existantes qui agissent comme un filtre, alors on accepte que la seule pédagogie qui fonctionne est celle qui met l’élève au centre du processus d’apprentissage. Et croyez-moi, le fœtus apprend déjà beaucoup. Par lui-même et pour lui-même. Par la suite, le bébé vient au monde avec des notions acquises seul sur lesquelles vont s’intégrer toutes les notions nouvelles qui lui viendront des différentes expériences qu’il vivra. En fonction de son développement sensori-moteur et de la maturation de son cerveau.

La mémoire humaine ne fait pas une copie de ce qui est perçu dans l’environnement. Elle sépare, divise, stocke en de multiples lieux et réorganise le tout. C’est très complexe. Cela explique les faux souvenirs, cela explique que l’on interprète différemment une situation nouvelle, que l’on construit sa connaissance. On la construit. On ne nous la donne pas. C’est un peu comme si un même médicament provoquait différents effets chez différents patients. Nous sommes uniques. Lorsque nous lisons un texte, nous ne lisons pas la même chose. Lorsque nous écoutons quelqu’un, nous n’écoutons pas la même chose. Lorsque nous parlons, nos paroles n’ont pas le même sens pour chacun des récepteurs. D’où les problèmes d’incommunicabilité. Ce n’est pas une simple affaire de vocabulaire ni de grammaire. C’est beaucoup plus complexe que cela.

Vous ne percevez pas ce que vous croyez percevoir. Vous le reconstruisez. Vous percevez uniquement des bits, et c’est la somme de ces bits qui est décodé et vous donne le sens de ce que vous percevez. Difficile non ?

Quel est le sens du mot réfléchir ? Le même pour vous que pour moi ? Dans ce cas, l’enseignement classique fonctionnerait. Mais non. Ce mot n’a pas le même sens pour vous que pour moi.

Donc, oui, l’élève au centre des apprentissages. Et le prof, pas un maître mais un pasteur.

Vous parlez de PISA ? Cette gigantesque daube ? Lisez mes articles sur PISA. Je connais cela par cœur. Tous les items. Allez, l’un des items en maths de la dernière session PISA parlait d’un métro. Comment cet item peut-il prendre sens pour ceux qui ne savent pas ce qu’est un métro ? Pour tous ceux qui ne vivent pas dans les grandes agglomérations ? Les différences sont-elles importantes en nombre de points entre le 1er à PISA et la France ? Non. Les écoles des premiers pays à PISA sont-elles des écoles urbaines ? Oui. C’est l’un des facteurs qui explique que les pays à surface géographique importante sont désavantagés. Les items sont construits pour des urbains. Qui n’a pas fait l’expérience du métro (et je parle bien d’une expérience vécue qui permet de se fabriquer la connaissance ; pas d’un ensemble de mots qui n’offre aucune représentation concrète) ne sait pas ce qu’est un métro. Mais analysez les items de PISA bon sang !

Quels sont les problèmes au fait, dans un système d’enseignement qui n’a en réalité guère changé, parce que le prof est toujours maître dans sa classe et qu’il enseigne comme bon lui semble, sauf lorsque l’inspecteur vient l’inspecter.

Problème n° 1 : une société pyramidale où les gens au sommet n’ont aucun intérêt à ce que ceux qui sont à la base accèdent de la même manière à la connaissance, au savoir, à l’information. Comment justifieraient-ils les écarts de rémunération, de style de vie si le plouc moyen se découvrait des capacités latentes exploitées correctement ?

Problème n°2 : 400 à 600 heures de français de moins qu’il y a 30 ans, qui ne permettent pas à l’élève d’aujourd’hui de comprendre ce qu’il apprend. Sauf si ses parents sont instruits et lui parlent avec un langage riche. Mais les Zyva et Nic ta mère n’ont aucune chance de s’en sortir.

Problème n°3 : on n’apprend que sous l’impulsion d’un besoin. Quels peuvent être les besoins de ces mômes pour qui presser un bouton donne toujours le même résultat. A quoi cela sert-il de calculer de tête lorsque existent calculatrices et ordinateurs.

Problème n°4 : jeux vidéos, télévision, téléphones portables, chat, réseaux sociaux, etc. Aucun moment pour être seul avec soi-même, pour penser à sa journée, pour méditer, bref pour se livrer à l’introspection, réorganiser les nouvelles données et les assimiler. Des programmes télé qui présentent des images rapides, des scènes courtes, qui nuisent au développement de la capacité à se concentrer. Ensuite, pour les élèves, il faut que les choses aillent vite (appuyer sur le bouton pour obtenir un résultat immédiat), passer du coq à l’âne. Les voilà nos hyperactifs lobotomisés par la télé avant les cours, après les cours et toute la journée pendant les vacances. Et c’est pire avec les jeux vidéo qui les conditionnent à des choix binaires. Bouton 1, bouton 2. Mais apprendre, ça n’est pas ça. C’est autrement plus compliqué.

Problème n°5 : Une société désorganisée, sans lien social, déstructurée, qui n’offre aucun débouché. Sans ton réseau, pas de boulot, quel que soit ton diplôme. Comment être motivé par les études si l’ANPE est la destination finale ? Le rapport coût bénéfice est négatif.

Problème n°6 : une société qui, sous l’impulsion des hommes politiques, a appris à haïr les profs, qui, par la force des choses, ne peuvent plus être respectés par les élèves. A l’exception des asiatiques et des juifs pour lesquels apprendre est sacré, comme l’est le professeur. Voilà pourquoi ils réussissent si bien aux Etats-Unis.

Problème n°7 : les réformettes initiées par les différents ministres et jamais allées jusqu’au bout, jamais évaluées.

Problème n°8 : des effectifs hétérogènes qui n’existaient pas il y a 30-50 ans. Des enfants qui parlent à peine le français et qui sont intégrés dans des classes normales. Des enfants autistes et autres atteints de pathologies plus ou moins graves.

Problème n° 9 : les élèves ne dorment pas.

On pourrait continuer le catalogue des problèmes. Les pédagos n’y ont que peu de part. Meirieu est énervant, je vous l’accorde. Mais tout n’est pas à jeter, loin de là.

Et pour votre gouverne, une étude méta-analytique (Ehri et al, 2001) conclut : la méthode syllabique est bonne pour les classes moyennes et populaires, pour ceux qui lisent tôt, pour ceux qui ont des problèmes de lecture. La méthode globale est la meilleure pour les classes supérieures. Eh oui, encore une fois, le rôle prépondérant de l’entourage familial. Et je vous parle d’une étude scientifique qui s’appuie sur des milliers de documents étalés sur plusieurs années et dans plusieurs pays, sur plusieurs langues. Du sérieux, du lourd.

Et pour terminer, voici ce qui marche le mieux :
-  école primaire + collège : enseignement explicite.
-  Lycée + sup : méthode constructiviste (à condition que les bases soient solides)

Tout cela, à condition que l’on réforme le fonctionnement de la société pour que chacun ait un avenir, et initie ainsi un motif pour apprendre. Sans cela, rien ne marchera, rien ne changera.

Apprendre naît d’un besoin.


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