M. Villach,
1) Laissez donc les artistes artistiser en paix. Il n’appartient à personne de dire ce qui est artistique et ce qui ne l’est pas. L’art ne s’explique ni ne se démontre, il est ou n’est pas, et cela ne se révèle qu’au fur et à mesure, par l’accueil qu’il reçoit et la reconnaissance qui lui est donnée dans le temps. Et à ce moment, pour la plupart des oeuvres concernées, nous serons tous morts. L’histoire de l’art abonde d’artistes décriés reconnus comme majeurs sur le tard, ou bien après leur mort. Un peu d’humilité en la matière ne fait de tort à personne. L’art nous force à l’humilité, il est à l’opposé des jugements à l’emporte-pièce que nous expose Mme Reza. D’ailleurs, de quel avis est Mme Reza ? Cela n’apparaît pas très clairement.
2) Une oeuvre d’art ne se résume pas au produit fini. Le fait qu’il soit « beau » ou « moche » ou qu’il « fasse sens » ou « n’ait aucun sens » comme vous l’écrivez avec Mme Reza est fort réducteur. Il existe des choses comme la pensée de l’artiste, sa démarche artistique, la technique, le geste, et bien d’autres encore qui entrent en considération. C’est bien la rupture principale de l’art contemporain que d’accorder moins d’importance au produit fini que ses prédécesseurs. Et encore ! Que penser d’un Duchamp ou, plus près de nous, d’un Warhol, dans ces conditions d’analyse de l’oeuvre artistique ? L’analyse que vous faites sur l’oeuvre de Twombly me laisse à penser que vous auriez hurlé contre Duchamp il y a un siècle. Voyez où en est son urinoir aujourd’hui ?! D’ailleurs, il subit lui aussi régulièrement des outrages qualifiés d’oeuvre d’art par son auteur abonné. Et son « air de paris », ridicule, non ? Ou alors, si Duchamp vous agrée en tant qu’artiste, demandez-vous si ce n’est pas la « reconnaissance » d’artiste établi dont il jouit aujourd’hui qui vous influence. Au fond, entre une toile même pas peinte et un ready-made, il n’y a guère de différence.
3) La valeur d’une oeuvre d’art est indépendante de sa qualité perçue. L’oeuvre d’art a un coût, c’est un objet marchand. Le coût est objectif, la valeur est subjective. Il faut reconnaître à l’art cette part de subjectivité. Certains sont prêts à mettre 2 millions d’euros dans une toile même pas peinte. Et à se battre pour. Et à faire encore monter les enchères. Pas vous. Eh bien, c’est votre droit. Et c’est très bien comme cela, non ? Pourquoi vous emporter ainsi ? Tous les goûts sont dans la nature comme disait votre chère maman. Imaginons que vous adoriez les nains de jardin et que vous en peupliez votre carré de gazon quitte à emprunter chez Cofidis pour vous les payer et à finir en Commission de Surendettement à la BDF, devrais-je pour autant conspuer vos goûts de chiotte ? Et puis finalement, est-ce-que c’est si grave que ça docteur ?
4) A mon avis, le tribunal a pris une excellente décision, en condamnant l’agresseuse poète, et en cela je diverge de DW, même si je le rejoins sur son analyse du geste artistique de Rindy et même sur sa dimension poétique certaine. Le tribunal n’a pas à se prononcer sur la valeur artistique d’une oeuvre, mais sur les moyens de défendre la propriété et le montant du dommage. La condamnation étant proportionnée à la propre condition de Rindy et non aux faramineux 2 Millions du galeriste, elle est en outre très équitable. On défend l’objet marchand en punissant les dégradations à la propriété, mais sans entrer dans les excès du marché.
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