Sisyphe et son boulet de déchets évoque le revers d’une société tournée vers le commerce, la ruse, mais surtout d’une société qui ne veut pas mourir, et qui se voit punie non par les dieux, mais par sa propre outrance.
Le système capitaliste avance de crise en crise, tel Sisyphe, il pousse son boulet qui finit toujours par redescendre et l’écraser. Alors bien sûr, il le connaît son boulet, il le voit grossir d’heures en jours, de mois en années, il bien essaye de limiter son enflure mais plus il avance, et plus il grossit... Il n’y a pas d’avenir pour Sisyphe, l’horizon se perd dans chaque instant perdu à sa conservation. Il ne voulait pas mourir, il vivra l’enfer pour l’éternité.
« Le pouvoir, c’est l’art de gouverner la liberté des autres » disait Michel Foucault, quand l’homme cessera de vouloir gouverner autre chose que sa vie, il sera libre. Mais il semblerait que la liberté soit comme un précipice, et que pousser le boulet offre une certitude bien plus rassurante que le risque assumé de disparaître.
La force vitale fait des erreurs mais elle les assume, en tire des leçons, et les laisse se transformer par l’acceptation de la mort, de leur devenir. L’homme fait des erreurs, les revendique, en fait son « propre », sans même comprendre qu’il fait l’erreur de croire qu’il est en cela supérieur. Il a la conscience, l’intelligence, le langage. Il n’est plus un animal. Bref, il prend sa minute d’existence pour un triomphe sur l’éternité. Un enfer.