Bravo Rosemar de parler du sort de ces travailleurs ; Ca nous change de vos articles un peu lambdas, au titre reconnaissable entre mille, si fait qu’on peut en identifier l’auteur instantanément. Cependant je leur reconnais une fraîcheur et une capacité d’interpellation ; Je vous reprocherais toutefois de ternir la vigueur du problème, par des amalgame, ce qui est fréquent chez vous, et dénature le discours, en en faisant quelque chose de terne. Car dire :
« Et cette règle là s’applique à bien des métiers : aucun n’est épargné, tous les travailleurs peuvent aussi être soumis au stress, à la fatigue, aux tâches multipliées »..
C’est totalement lissé le problème, en le banalisant. Si le problème est le même que partout ailleurs, pourquoi en parler. M’enfin, même si le stress est constitutionnel de l’existence humaine, et si le métier qu’on fait peut le catalyser, il est bien évident que beaucoup ronds de cuir n’ont pas les soucis physiques et mentaux liés aux métiers de l’abattage. Si vous en doutez, allez faire un stage de 15 jours en immersion chez Doux par exemple.
J’ai vu en psychiatrie plusieurs travailleurs travaillant sur les chaines de production d’abattage de poulets complètement démolis par leur boulot inhumain, certains ayant vraiment pété les plombs, autrement dit ayant fait des « bouffées délirantes », qui sont un must extraordinaire au niveau de la clinique ; cependant on en revient ; le diagnostic d’évolution n’est pas aussi défavorable qu’on pourrait le craindre, surtout comparé à des névroses larvées, beaucoup moins spectaculaires, mais qui peuvent vous amener au suicide, fréquent aussi en ces milieux. ...
J’ai vu des femmes pendant des jours et des jours continuer à miner leurs gestes sur une chaine de production, jour et nuit, au bord de la déshydratation, qu’on devait sédater, pour leur éviter l’épuisement complet. Ne parlons pas des problèmes ostéo tendineux qui sont niés souvent par la médecine du travail, jusqu’au moment où elles deviennent totalement invalidantes.Le menagment dans ces boites est basé sur le clivage, le harcèlement, et les plus faibles ou les moins fous ou les plus sensibles ne peuvent guère rester bien longtemps, à moins qu’ils n’aient pas le choix.
Après cela vous ne pouvez plus manger de poulet. Bien que travailler dans la santé est exigent, j’ai mesuré la chance que j’avais par rapport à elles : J’étais fonctionnaire, et je travaillais dans le social, avec des gens pacifiés, éduqués, cherchant le bonheur de leurs semblables.... Je ne doute pas un instant que vous auriez la même impression en regagnant vos classes, qui même si elles offrent des difficultés, ont bien des compensations narcissiques, et ne vous mèneront surement pas à la folie.