500 000 ou 1 500 000 manifestants anti-CPE ?
Les organisateurs des manifestations d’hier contre le contrat première embauche réclament du gouvernement qu’il prenne l’initiative de demander au Parlement d’abroger la loi qu’il lui a demandé de voter il y a deux semaines ou de ne pas la mettre en oeuvre de son propre chef. Cette exigence est fondée sur l’ampleur supposée des manifestations qui reflèterait la volonté populaire et exprimerait une légitimité supérieure à celle qui résulte des élections.
Que l’on accepte ou non ce raisonnement, il serait en toute hypothèse utile que le pays ait une vision exacte du nombre de Françaises et de Français, qu’ils soient jeunes ou moins jeunes, qui ont fait l’effort d’aller défiler pour exprimer leur rejet du contrat première embauche. Or, tout ce dont nous disposons, ce sont deux évaluations aux antipodes l’une de l’autre, rapportées benoitement par les médias, sans autre commentaire.
Si c’est le chiffre attribué à la police qui est le bon, 500 000 manifestants dans toute la France, il s’agirait à l’évidence d’un échec pour les organisateurs, qui ne pourrait qu’inciter le gouvernement à maintenir sa position. Si, au contraire, c’est le chiffre de 1 500 000, avancé par la CGT, qui reflèterait la réalité, il s’agirait d’un succès, créant un nouveau rapport de forces dans le pays, dont il serait difficile de ne pas tenir compte.
Par réflexe de bon sens, on pourrait se dire que, dans une telle circonstance, il faudrait pouvoir faire confiance au service public, ce qui serait mon inclination naturelle, et donc retenir le chiffre de la police comme valide. Mais la plupart de nos compatriotes, à tort ou à raison, ne se satisferont pas de cette référence pour se former un jugement. De même auront-ils du mal à accorder leur confiance à celui de la CGT sans autre forme de procès. Retenir la moyenne, tentation habituelle face à un tel dilemme, ne correspondrait à aucune rationalité particulière.
Pour sortir de cette difficulté, il me semble que ce serait aux médias de jouer le rôle d’arbitre, en demandant que la police et la CGT fournissent le détail de leurs méthodes d’évaluation, en procédant aussi peut-être à leur propre analyse et en proposant au public une estimation raisonnable et objective, au surplus susceptible d’être comparée à des évènements similaires du passé.
Il serait surprenant, en ce début de vingt-et-unième siècle, que l’usage des techniques statistiques, électroniques et photographiques ne permette pas de réduire significativement cet écart du simple au triple, et de fournir à l’opinion des éléments d’appréciation raisonnables sur la véritable intensité des préoccupations du pays en ce qui concerne le contrat première embauche.
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