Boutons-les indésirables !
Orléans, son histoire toujours en marche
L'histoire d'Orléans est intimement liée au commerce qui durant des siècles emprunta les chemins de l'eau pour se diffuser dans ce qui était alors le royaume de France. Sa position centrale et septentrionale sur la Loire avait fait de cette ville le nœud des échanges commerciaux à défaut de devenir une Capitale comme elle l'a rêvée plusieurs fois.
La communauté des marchands avait le monopole sur le fret fluvial disposant d'un tel pouvoir que c'est eux qui fixaient les prix et engrangeaient les bénéfices. Ils étaient en cela les précurseurs du libéralisme. Ils connurent cependant bien des déboires puisque cette plaque tournante de la richesse attisa bien des convoitises.
Les invasions ou les sièges voulurent au fil des temps mettre à genoux cette opulente cité tout comme porter un coup décisif au pouvoir royal. Les Huns et les Anglois, les Vikings et les Alamans vinrent faire razzia pour répartir autrement les richesses de cette vallée opulente. L'histoire a mis en exergue deux héros emblématiques qui ont bouté les vilains agresseurs. Saint Aignan tout d'abord, suivant l'exemple de Sainte Geneviève à Lutèce, chassa la bande d'Attila sans ménagement ni dédommagement (version officielle) puis survint une pucelle lorraine pour bouter les Anglois d'un bain de siège qui mettait à mal l'économie du royaume.
La ville sera éternellement reconnaissante à Jeanne, héroïne emblématique, figure charismatique et presque christique derrière laquelle rien ne peut se faire à Orléans. C'est ainsi qu'un maire décida d'installer au-dessus de la gare, un centre commercial hideux qu'il baptisa Place d'Arc. Les marchands pouvaient faire feu de tout bois, ils avaient plus d'une corde à leur Arc pour parvenir à satisfaire leur appétit.
Les années ont passé, le Centre a connu des concurrents comme ce Cap Satan qui correspond davantage aux canons de l'époque. Les sous-sols de la Place d'Arc sont devenus un refuge pour une misère pourtant hors-la-loi par arrêté municipal dans cette ville bourgeoise et pudibonde. Tous les vagabonds, gens de la rue, miséreux de la terre en transit ou non trouvèrent là de quoi dresser un abri dérisoire de toile, dans le bruit et l'agitation des clients, voyageurs, passants.
Le contraste entre ces deux mondes était plus insupportable encore que ces tentes plantées le long du périphérique. Les orléanais passaient à pied devant ce spectacle lamentable, ils ne pouvaient détourner les yeux, feindre de ne pas voir. Il fallait agir pour l'honneur de la cité. Un nouveau héros s'est dressé pour bouter ceux qui osaient souiller la mémoire de dame Jeanne. Les lanciers du roi arrivèrent pour lever ce siège de la honte et renvoyer loin de là, les malheureux exilés de la prospérité.
L'histoire se répète inlassablement. Cet épisode trouvera-t-il sa place dans le livre des grandes heures et des malheurs de la cité Johannique ? On peut en douter mais on n'est jamais sûr de rien. Il est possible au demeurant que ce coup de force soit du goût de nombre de gens d'ici. Il conviendra alors de dresser une oriflamme aux couleurs de l'instigateur qu'il fut Lazare, Flageolet, Judas ou Bambochette, de ce haut fait d'armes. Elle trouvera tout naturellement sa place à côté de celle de Gilles de Rais qui continue de trôner au cœur de la cathédrale.
Comparaison n'est pas raison. Je veux bien l'admettre même si certains télescopages ne sont pas heureux et peuvent choquer. Il se trouve que nos élus ont demandé l'autorisation de communier le 8 mai ceints de leur écharpe. Je crains pour eux que l'hostie soit amère ce jour-là si notre bon évêque, véritable homme de bien et de cœur, leur rappelait lors de son prêche que ce sont les marchands que Jésus chassa du Temple. En attendant les SDF, puisque les mots manquent (on leur préfère des sigles bien plus impersonnels et qui ne blessent pas la bouche et la conscience) pour qualifier l'indignité d'une société opulente, incapable de prendre en compte les oubliés de la réussite, ont connu les affres de l'expulsion qui ne règle rien en soi.
Indignement vôtre.
Photographies de France Bleu Orléans et La République du Centre
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