Contrôle routier inopiné
Peur sur la route …
Il est bien loin le temps où un gendarme qui arrêtait un véhicule, gratifiait ses occupants d’un salut, d’un sourire accompagnés d’un martial geste de la main. Les gants blancs octroyaient alors une solennité qui incitait sans doute le digne représentant de la maréchaussée à une grande courtoisie, y compris quand il s’agissait pour lui de dresser procès-verbal pour une infraction au code de la route.
Depuis, nous avons changé d’ère, franchi un cap nous conduisant dans un tout autre monde. Les sourires ont été rayés de la face de ces soldats de la route, bardés de gilets pare-balle, armés, sourcilleux et menaçants. Nous sommes devenus des ennemis et non des usagers de la route. La méfiance est devenue défiance et plus encore. Entre eux et nous, il n’y a plus la place pour une aimable plaisanterie. Pire, le moindre geste, relève désormais de la menace mortelle.
Nous sommes prévenus et pourtant, nombre encore de nos concitoyens n’ont pas encore compris que nous avons définitivement renoncé à l'appellation Gardien de la Paix. Notre démocratie se transforme progressivement en dictature sournoise, brimant les libertés individuelles, plaçant les citoyens sous contrôle permanent et faisant d’eux des délinquants en puissance, des dangers potentiels.
De retour d’une fête marinière en compagnie de mon ami Gérard, pilote intrépide, nous fûmes arrêtés dans notre trajet par le surgissement soudain d’un faisceau lumineux. Un signal stressant, inopiné, violent de nature à provoquer une réaction de crainte. Avant de comprendre qu’il s’agissait d’un contrôle routier, nous nous demandâmes déjà quel crime nous avions pu commettre sans nous en rendre compte.
Point de salut, le pandore n’est pas là pour jouer les amabilités. Il se place à hauteur de la portière arrière, braque un projecteur puissant sur l’intérieur du véhicule, forcément suspect. Deux de ses collègues se placent eux aussi à distance des malfaiteurs potentiels qu’ils viennent d’arrêter. L’homme en tenue de guerre civile s’adresse à nous de manière injonctive, cassante, brève. L’école policière a certainement écarté de sa formation les formules de politesse. L’aménité n’est plus de mise dans la profession, l’inimitié l’a boutée à tout jamais !
Vos papiers ! La formule a le mérite d’être efficace et sans appel. Aucune fioriture, pas le moindre « s’il vous plait ». Il n’y a plus à se leurrer, nous sommes des ennemis de classe. Mon camarade s'exécute. Il a la conscience tout autant que le gosier tranquille. Il sort son permis et sa carte grise qu’il présente par sa fenêtre ouverte. Ça ne convient pas, l’homme s’impatiente tandis que mon ami ne comprend pas ce qu’on lui reproche. Pire même, il se trouve aveuglé par le faisceau lumineux.
Le représentant de la force est resté très en arrière. C’est au chauffeur de se contorsionner pour fournir ce que réclame l’agent. Je m’étonne à la fois de la manière dont il s’adresse à nous tout autant que de son placement très en retrait. L’homme répond sèchement qu’il ne fait que respecter les consignes, la peur est aussi dans les rangs de la police … Décidément, la démocratie en prend un sacré coup !
Pour le contrôle d’alcoolémie, les échanges sont de même nature. Un collègue apporte la pipette puis s’écarte. Des gyrophares se mettent à tourner, il faut donner de la solennité à cet instant dramatique. Gégé n’a pas fauté, il n’a pas picolé et notre tourmenteur en est presque dépité. C’est alors que je lui demande si ce contrôle est justifié par les quelques facéties que je me suis permis lors de mes contes alors que la brigade y était de faction …
C’est seulement là que l’homme nous identifie. Soudain plus aimable, il se fait enfin humain et nous salue avant que de nous laisser poursuivre notre route. Je me suis souvenu alors d’un autre contrôle, en pleine nuit, avec, sur une route de campagne sinueuse, soudain, un projecteur braqué sur le pare-brise. J’en avais eu un mouvement de surprise.
Je m’étais arrêté sans comprendre véritablement ce qui se passait. Découvrant que c’était un contrôle, je m’étais exclamé : « Vous m’avez effrayé ! J’aurais pu avoir un mauvais réflexe pour éviter ce que j’ai pris pour un traquenard ! » J’avais pensé qu’il s’agissait de pirates de la route tant la procédure était violente et agressive tandis que le projecteur m’avait totalement aveuglé. Le gendarme de me répondre sèchement : « Mais nous sommes là pour faire peur ! » Il n’y avait plus rien à ajouter. La République avait déjà basculé dans l'irrationnel !
Usagèrement leur.
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