De l’impact des réseaux sociaux sur la vie publique
Dans un récent article trouvé sur l'Express, on lit que le F-haine a déjà gagné la bataille numérique avant de remporter la victoire dans les urnes.
Or une observation quelque peu attentive des commentaires ou "posts" d'inspiration frontiste peuvent laisser penser qu'il n'est pas nécessaire de dire des choses intelligentes pour gagner des voix. La présence suffit-elle ?
Cela fait maintenant 10 ans, quasiment, que le repositionnement de l'image du F-haine est devenu une priorité pour Marine Le Pen, et celle-ci s'appuie non seulement sur les médias traditionnels, qui font certainement la part trop belle à la formation d'extrême droite et sont actuellement décriés pour cela (pricipalement par Mélanchon), mais aussi sur les réseaux sociaux et les outils numériques.
A ce titre, la stratégie de Nouvelle Donne, la nouvelle formation politique emmenée par Pierre Larrouturou, affiche clairement ses ambitions dans ce domaine. Et cela semble payer puisqu'elle a recruté plus de 7000 adhérents (qui paient une cotisation, sans compter les sympathisants et futurs votants non déclarés) en quelques mois, soit plus qu'EE-LV en plusieurs années.
« Nous avons 7 000 adhérents, annonce le co-président du mouvement Pierre Larrouturou. Plus qu’Europe-Ecologie/Les Verts » (source : ND).
Cette présence numérique, couplée à un programme aussi ambitieux que novateur, permet donc à Nouvelle Donne de dépasser rapidement des partis installés depuis longtemps dans le paysage politique français.
L'article de l'Express précise que cette stratégie de numérisation du contenu et des recrutemente s'est massifiée depuis les dernières élections présidentielles de 2012. L'UMP et le PS ont ainsi investi sur les réseaux sociaux plus de 2 millions d'euros chacun à cette occasion, mais en retard sur le F-haine qui avait entamé sa stratégie numérique de "normalisation" depuis longtemps déjà.
Qu'apportent les réseaux sociaux ?
Les réseaux sociaux permettent de diffuser et / ou d'accéder simplement et rapidement à de l'information en fonction de critère de recherche ou de filtrage. L'esprit communautaire y est très marqué et permet de cibler des thèmes précis (de même que le GPS, en nous évitant de nous perdre, nous empêche aussi de découvrir). Mais ceci implique une maturité que tous les internautes n'ont pas.
Pour faire une comparaison, prenons comme exemple les "exposés" que demandaient certains professeurs du collège ou du lycée il y a 20 ou 30 ans. La difficulté à l'époque consistait à trouver l'information pertinente. Il fallait souvent passer des heures dans des bibliothèques, passer en revue des dizaines d'ouvrages avant d'espérer trouver les bonnes sources. Avec internet, c'est une révolution. La recherche peut se faire n'importe où, n'importe quand. Les moteurs de recherche permettent d'accumuler en quelques dixièmes de secondes des masses d'informations qu'il faudra ensuite valider. Car là se trouve la nouveauté : internet, ce n'est pas que des scientifiques ou des encyclopédies, c'est aussi tout et n'importe quoi. Le recoupement des informations et leur validation deviennent des étapes incontournables si l'on ne veut pas être victime d'informations erronées produites par n'importe quel gogo.
C'est certainement le même phénomène qui explique la perte de terrain de la presse écrite depuis plusieurs années. Il était utile et instructif de lire les journaux afin d'avoir un décodage de l'information, une analyse par des journalistes souvent spécialisés. A présent, les journaux produisent des scoops, des exclus, des articles présentant souvent de nombreuses fautes d'orthographe ou coquilles, qui privilégient la vitesse de transmission de l'information plutôt que le finesse de son analyse.
L'époque est donc aux informations nombreuses et rapides, plus aux informations vérifiées, analysées, mises en perspective.
La stratégie numérique du F-haine surfe sur cette vague. En proposant aux lecteurs des informations simples, faciles à comprendre, dans la grande tradition des syllogismes de Le Pen-père (souvenez-vous du célèbre : "il y a 3 millions d'arabes, il y a 3 millions de chômeurs", nous laissant conclure que le second était la conséquence du premier), le parti de Le Pen-fille chauffe les esprits à blanc en polémiquant sur des sujets d'actualité sans rien proposer de tangible. On entretient un mécontentement de fond en versant, chaque jour, un peu d'huile sur le feu. Les réseaux-sociaux sont incroyablement adaptés à cette stratégie de communication.
L'Express met également le doigt sur un phénomène intéressant que l'on pourrait nommer le sens unique.
Le principe est simple : dans les instances dirigeantes du F-haine, on décide qu'une information peut-être livrée à la connaissance du public. Elle est communiqué sur un réseau social mais uniquement en mode "push". Les abonnés peuvent alors en prendre connaissance mais ils ne peuvent pas réagir sur cette information car le sens remontant (de l'abonné vers le parti) est bloqué. Les seules discussions possibles sont alors à la charge des abonnés eux-mêmes qui, chacun de leur côté, vont la diffuser sur leurs propres réseaux sociaux. Certains créeront des blogs par exemple, d'autres interviendront dans des publications de tiers, parfois sans relation avec le F-haine. Les éléments de langage frontistes vont donc petit à petit "infecter" les discussions initiées entre des personnes tierces non-liées au F-haine. L'adjonction de liens dans des articles ou des échanges tiers permettront de diriger les éventuels intéressés vers des lectures plus pointues, sur des sites plus spécialisés ou plus engagés.
Une impression de corruption.
Pour les personnes qui souhaitent avoir véritablement de vrais échanges, les réseaux sociaux peuvent parfois ressembler à d'immenses décharges dans lesquelles des agents infiltés du F-haine viennent déverser des tonnes d'ordures, au départ par petites touches jusqu'à ce que cela devienne normal. On retrouve les éléments de langage typiques du F-haine : UMPS, contraction de UMP et PS ; l'état qui "rackette" ; les "pseudo"-démocratie ; le célèbre couple franc-maçonnerie + sionisme.
Et ne parlons pas des pages officielles telles que la page Google+ de Marine Le Pen sur laquelle elle délivre de l'information que les membres défendent bec et ongles. Pas question ici d'émettre la moindre critique, le moindre avis dissonnant sous peine d'être noyé de mails d'insultes évoquant un florilège de nomx d'oiseaux (communistes, sale race, etc.).
Les réseaux sociaux sont donc à la fois un espace d'échange et de partage, mais également de corruption de cet échange.
Les réseaux sociaux à venir.
Devant une telle profusion d'informations, vérités ou contre-vérités, l'internaute a besoin de se former. Ce que faisaient auparavant les spécialistes, les journalistes, en terme d'analyse et de filtrage, c'est à l'internaute de le faire en développant son sens critique. Et pour cela, il n'y a d'autre solution que l'enrichissement intellectuel et la culture qui sont, depuis Jules Ferry, les piliers de la République et de l'éducation.
D'autre part, la façon dont sont structurés ces réseaux est importante. L'organisation traditionnelle "top-down" (du haut vers le bas, ou verticale), n'est plus adaptée. L'avenir est à présent à la sociocratie, une organisation "horizontale" qui requiert l'implication des individus à tous les niveaux.
Et là, pas de doute. Si le F-haine a su faire sa mue en matière de normalisation ou d'approche "démocratique" de sa communication, son organisation reste par trop archaïque et n'est pas orientée vers l'avenir tant reste prégnant la place du "chef". Il en va de même des partis comme l'UMP ou le PS (bataille des chefs, élections primaires).
Un parti comme Nouvelle Donne, au contraire, a tout compris. Il y a une cohérence globale entre son discours, les idées qu'il porte, et l'organisation sociocratique qu'il a adoptée, qui promeut l'intelligence collective au service du succès de l'organisation.
Wake up.
Lovegiver.
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