Déchéance nationale, pour qui et pouquoi ?
Juste avant de partir en vacances, Nicolas Sarkozy a jeté un pavé dans la mare en se positionnant à la limite de l’extrême droite, mais surtout en brandissant la « menace » d’une future loi sur la déchéance nationale et un certain nombre de mesures « sécuritaires » pour reprendre les termes employés en ce moment dans les médias. Au-delà des fantasmes et des peurs que génère cette idée, qu’en est-il de la situation réelle en France vis-à-vis des immigrés, existe-t-il une relation directe entre la délinquance et l’immigration, une telle loi serait-elle efficace, et surtout, est-elle compatible avec notre constitution républicaine et nécessaire en l’état actuel des lois ?
L’article 2 de la Constitution précise : « La langue de la République est le Français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est la Marseillaise. La devise de la République est ‘Liberté, Égalité, Fraternité’. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. »
Je vous la cite puisque j’ai dû me familiariser avec cette constitution alors que j’avais 18 ans, date à laquelle j’ai demandé moi-même ma naturalisation Française. Car contrairement à la majorité des lecteurs de ce site, j’ai dû choisir de devenir Français … ou pas. Et franchement, je me demande si à force, on ne va pas me le faire regretter un jour. A l’époque, j’avais été quelque peu surpris par le processus discriminant de cette naturalisation. Tandis que j’avais dû attendre presque trois ans de pouvoir obtenir la nationalité du pays dans lequel j’ai grandi, ce qui m’a passablement blessé dans mon amour propre, je remarquai au passage que des hordes entières de maghrébins se faisaient naturaliser en quelques mois par « regroupement familial » dans le même temps. Quand j’eus l’audace de poser la question à la préfecture, on me répondit « mon garçon, c’est que l’Algérie, par exemple, bénéficie d’un statut particulier, en tant qu’ancienne colonie ». Voilà une réponse qui me laissa bien pensif. D’un côté, on veut oublier le passé colonial de la France, tenter de rétablir un semblant d’équité entre le Maghreb et la France, et de l’autre, on naturalise des personnes parlant à peine Français, en six mois, parce que des accords de cette même époque post-coloniale ont été passés. Et pendant ce temps-là, des intellectuels de renom ne peuvent obtenir la nationalité Française aussi facilement et même les étudiants nés à l’étranger mais ayant grandi en France doivent attendre plusieurs années avant d’obtenir ce sésame. Moi-même j’ai dû répondre à des questions aussi bidons que « est-ce que tu as des amis Français ? » … Intéressant. A mesure que je continuais mon apprentissage de la vie, j’appris un jour que le nombre d’immigrés en France avoisinait chaque année les 100.000 individus, ce qui est largement inférieur aux chiffres de nos voisins italiens ou allemands et même insuffisant dit-on pour un pays grand comme le nôtre. Imaginez, c’est à peine 0.1% de la population Française… pas de quoi en faire un drame. Par contre, un amalgame xénophobe et aux forts relents de FN semble établir en tant que vérité vraie dans l’opinion publique l’idée selon laquelle les malfrats de tous bords, et surtout les stars du moment, à savoir, les « jeunes délinquants des banlieues » seraient tous issus d’une immigration actuelle.
Et c’est là que le bas blesse. En 2005, M. Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, devait faire face à une vague de soulèvements de « racailles » dans toute la France. On se souviendra, merci, des voitures brûlées de citoyens, et des survêtements-baskets défiant les forces de l’ordre. Le problème n’est pas réglé et je soutiens complètement l’idée selon laquelle l’intégration à la Française est un total échec et mériterait une main de fer pour remettre de l’ordre dans certains esprits égarés. Le fait est que ces individus, justement, sont pour la plupart des jeunes de 3e ou 4e génération maghrébine, qui sont d’ailleurs les mêmes qui nous font de grands discours sur l’Islam sans pour autant parler l’Arabe littéraire ou avoir ouvert un Coran dans leur vie (j’ai adoré la focalisation sur le voile, qui pourtant n’a rien de spécifique à l’Islam), qui se veulent originaires de pays dont ils ne savent rien mais qui persistent à se démarquer du citoyen moyen en adoptant volontairement un style très codifié (survêtement de marque, baskets nike air max, chaussettes de marque par dessus le pantalon, langage agressif et emprunt de quelques mots arabo-maghrébins comme « la bess », « hamdullah », etc). Je ne m’étalerai pas davantage, tout le monde les connaît, il suffit de prendre le métro, le RER, le TER ou le TGV ou se rendre dans un des nombreux « quartiers chauds » de France pour les observer dans leur activité favorite de « trouble à l’ordre public ».
Bizarrement ces individus, qui sont bien Français, issus de parents eux-même nés en France, et de grands-parents naturalisés se présentent comme des étrangers à la société, brandissent des drapeaux nord-africains les soirs de match, se persuadent d’une paranoïa selon laquelle l’Etat Français est leur ennemi mais pointent à la CAF dans le même temps… et surtout entretiennent la peur de la population française moyenne vis-à-vis des étrangers. De même, ils sont un réel problème pour les vrais immigrés, surtout d’ailleurs pour les musulmans eux-même, qui voient d’un très mauvais œil ces extrémistes imprévisibles d’un nouveau genre, qui réinventent la religion à leur propre sauce, salissent l’image des anciens travailleurs maghrébins mais aussi celle des nouveaux arrivants.
Mais malheureusement, aucun de ces individus n’est concerné par la proposition de loi qui se profile, car tous sont nés en France de parents Français.
Quant aux roms et aux excisées (Maliennes ?), laissez-moi rire, ce ne sont que quelques milliers d’individus et par ailleurs, les roms étant européens, ils ont tous droit de séjour en France, au titre de l’espace de libre circulation de Schengen. Donc une telle loi ne les touchera pas vraiment non plus et ne les empêchera pas de venir mendier au prochain feu rouge que vous croiserez.
Donc si je résume, on nous promet une loi qui va permettre ce qui est déjà permis par le code civil, à savoir la déchéance de nationalité (http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/les-francais-etranger_1296/vos-droits-demarches_1395/nationalite-francaise_5301/index.html) et qui par contre va stigmatiser l’attention du peuple Français sur les personnes de nationalité récente, mais qui ne permettra pas de régler le problème des pseudo-étrangers de 3e ou 4e génération mal intégrés dans la société Française.
Bien malin qui aura compris la manœuvre de ce gouvernement pour focaliser les attentions sur la peur de l’autre, sondages bidons en prime… Ne pensez-vous pas qu’il serait bon d’arrêter de tourner en rond avec des lois qui n’en sont pas et de prendre le taureau par les cornes pour mettre un terme définitif à la question des jeunes banlieusards égarés et des assistés de France à qui l’on trouve toujours toutes les excuses du monde ? Avez-vous pensé à ce que penseront ou pensent déjà les personnes « civilisées » et « cortiquées » qui souhaiteraient s’établir ou sont déjà établies dans ce pays, lorsque cette loi entrera en vigueur ? Pour ma part, j’ai choisi la citoyenneté Française parce que je partageais un certain nombre de valeurs communes avec cette république, même si c’est une question qui ne m’a jamais été posée durant le processus de naturalisation. J’ai déjà été bien agacé de savoir que mon lieu de naissance suffisait à poser le doute sur ma possible accession à cette nationalité. J’ai encore été outré lorsque j’ai su que certains étrangers obtenaient celle-ci plus facilement que d’autres, sur des critères qui n’avaient rien de républicain. Aujourd’hui, je suis édifié d’apprendre à la télévision que 70% des Français soutiennent une politique qui stigmatise une population dont je fais partie malgré moi.
Bien à vous, et bonne réflexion.
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