Des messages du Monde Entier
L’indignité élevée en système universel
Les maîtres du monde, bien calfeutrés dans leurs résidences, bénéficiant d’une garde médicale rapprochée, de traitements préventifs et d’une protection à nulle autre pareille viennent de découvrir interloqués d’abord, incrédules ensuite, effarés pour finir que l’un des leurs est la proie du mal qui fait des ravages parmi les gueux. Ils n’en reviennent pas, eux aussi, ne seraient donc que de simples mortels, de pauvres proies pour la méchante bête ?
Le réflexe corporatif fonctionne alors à plein. Les télégrammes, les messages de sympathie, les déclarations de soutien ou d’empathie arrivent de tous les palais, chancelleries, bunkers et autres succursales de ce nouvel Olympe. La presse, toujours fidèle à sa vassalité se fait l’écho de l’émotion immense et démonstrative de nos Seigneurs et Maîtres.
Les mêmes se sont montrés moins prolixes pour évoquer tous ceux qui avant leur collègue ont été touchés par ce mal étrange qui ne respecte pas leur position sociale. Il semble évident que nous ne partageons pas les mêmes préoccupations, que nous ne sommes rien à leurs yeux. Il faut bien l’admettre, ce réflexe corporatif est d’une touchante sensibilité quand par ailleurs il y a eu jusqu’alors de bien dramatiques lacunes dans leur compassion.
Que dire du nombre de victimes anonymes effacées des statistiques en Chine ? Il est vrai qu’aucune ne devait appartenir à la galaxie d’un pouvoir central si peu démocratique. Que penser de l’indigne effacement des victimes de nos Ehpad durant quinze jours dans ce pays qui se prétend encore patrie des droits de l’homme mais plus des vieillards ? Que conclure des propos du guignol de la maison blanche qui soudain découvre que cette pandémie n’est pas une farce ?
Soudain la tragédie devient tangible pour ces grands personnages parce que l’un d'eux est sur le même lit de douleur que des milliers d’anonymes de par la planète. La révélation est admirable, nous découvrons ainsi que rien de ce qui nous arrive ne les concerne vraiment. Jusqu’alors, c’était l’état de l’économie qui les préoccupait vraiment. Pourront-ils éviter la crise économique ? Comment feront-ils pour assurer leur chère relance ? Doivent-ils profiter de l’aubaine pour réduire à néant les libertés et organiser le suivi absolu du peuple ?
Soudain, avec ce malheureux grain de sable dans leur conviction absolue qu’ils sont au-dessus des lois communes, ils découvrent que l'immunité politique n’a aucun lien avec le système immunitaire de l’organisme. Une révélation qui, il faut bien l’admettre, provoque un véritable tremblement de terre dans leur microcosme.
Il est grand temps d’abolir définitivement ce système féodal. Aucun humain ne devrait bénéficier d’un traitement supérieur à ses homologues terriens. Nous sommes tous égaux devant la maladie, la souffrance, la mort. Il conviendrait de retrouver un peu de dignité dans nos médias et dans les hautes sphères alors que les parents et amis des victimes sont privés de ce besoin absolu de faire le deuil de leurs défunts.
Ce déferlement de messages de sympathie dans un tel contexte est d’une parfaite indignité, d’un manque absolu de compassion pour la plèbe. Il me paraît inconcevable que nous devions collectivement nous émouvoir que pour celui-là. Notre sympathie devrait aller pour tous les autres, ceux qui sont morts dans le silence et l’absence des leurs. Que ce monsieur guérisse, c’est tout ce que nous pouvons lui souhaiter mais ni plus ni moins que tous les autres.
Le monde d’après devra se passer de ce délire de la personnalité, de ce culte du grand personnage, de cette dévotion pour des pantins dérisoires. C’est en retrouvant le sens du collectif, de la solidarité et de l’égalité de tous que nous sortirons d’une crise provoquée largement par les pleureuses de l’heure et leurs prédécesseurs.
Anonymement leur.
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