EPR : la sûreté nucléaire en question
Pour nourrir le débat, déjà initié lors des primaires, entre le PS et leurs alliers théoriques écologistes EE LV ainsi que les futurs débats des campagnes des candidats Sarkosy et Hollande à la présidentielle, il n’est pas inutile de faire le point sur ce réacteur nucléaire de 3ème génération EPR si controversé
Où en est-on réellement ?
Divers aspects techniques plus ou moins liés à la sûreté ou à l’économie ont été évoqués soit dans le public, soit au parlement (office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques[1]), soit parmi les seuls spécialistes :
- les plus de sa défense en profondeur avancés par le constructeur AREVA NP et l’électricien EdF
- les malfaçons dans le génie civil confié à Bouyghes, évoqués par le Canard enchaîné mais aussi, beaucoup moins connu,
- le non agrément par les autorités de sûreté du système de contrôle–commande[2] (surveillance, conduite, mise en sécurité, du fonctionnement normal au plus dégradé après un accident majeur) révélé dans un communiqué concerté entre les trois autorités de sûreté de la France, du Royaume Uni et de la Finlande (peu repris par la presse)
- la dérive des coûts (de 4,5 à 6 milliards d’€uro) qui, en période de difficultés à financer les investissements, est bien malencontreuse
- Les malheurs en Finlande des partenaires allemands et français de la co-entreprise AREVA NP – qui a éclaté entre temps – pour le premier chantier d’un tel réacteur appelé à se substituer aux modèles soviétiques jusque là construits dans ce pays
Les allemands ont initié les études de comportement du corium (débrits métalliques et combustible fondu résultants d’une perte de refroidissement) ensuite poursuivies internationalement (sous l’impulsion de l’accident de Three Mile Island), ce que les inventeurs américains n’avaient pas jugé utile de faire en initiant la filière des réacteurs PWR pour les sous marins et porte-avions nucléaires (consommables avec du personnel militaire). En est résulté un réceptacle à corium qui est intégré dans l’EPR
Tous les pays possédant des réacteurs à eau se sont très tôt (bien avant TMI) posé la question de la fabrication d’hydrogène sous la cloche du réacteur dès que la gaine du combustible entre en réaction avec l’eau (vers 1500°C) en cas de sous refroidissement et ont gréé des systèmes pour soit recombiner avec catalyseurs l’hydrogène produit soit le consumer par des mini explosions localisées. Il en est résulté l’équipement des réacteurs d’EdF et bien sûr de l’EPR de Flamanville
En cas d’accident grave avec force relâchement de produits de fission, il faut grossièrement filtrer par des réservoirs de sable les relâchements concertés de gaz vers l’environnement (et donc vers les populations) destinés à soulager l’enceinte de confinement (la « cloche » évoquée ci-dessus) mise en pression par la vaporisation de l’eau du circuit de refroidissement à la suite d’une ou plusieurs avaries et/ou par la production d’hydrogène (voir ci-dessus). Malheureusement ces filtres à sable sont disposés en hauteur et ne sont encore pas dimensionnés pour un fort séisme. Leur chute possible demeure donc un problème
EdF avait déjà fortement innové pour la tranche de réacteurs de 1400 MW en proposant une conduite/surveillance totalement informatisée (plus d’analogique). L’autorité de sûreté avait tiqué puis finalement laissé faire.
Cette fois pour l’EPR de Flamanville, alors que l’objectif affiché est de diminuer d’un facteur 10 la probabilité d’occurrence de l’accident majeur, EdF y est allé encore un peu plus fort et s’est permis d’intégrer des automates « du commerce » (conduite de procédé par PC) dans les circuits de sécurité de deuxième classe de sûreté (juste en dessous de la 1ère classe de sûreté qui concerne les circuits d’arrêt d’urgence), allant même jusqu’à les mélanger avec des fonctions de servitude quasiment pas classées. Comme c’était l’impasse, qu’EdF s’est vue obligée de revoir sa copie, œuvre surhumaine en quelques mois, il est probable qu’elle va présenter une nouvelle solution en retrait, mais quand ?.
Toutes ces difficultés pourraient bien être à l’origine, et des retards, et des surcoûts
EdF et AREVA se gardent bien de communiquer sur le sujet (le public ne serait pas à la hauteur), cette dernière devant en ce moment gérer son repli dans ses filiales allemandes dont ex-Siemens Erlangen devenue AREVA NP Erlangen, qui est à l’origine du contrôle-commande contesté[3].
[2] http://www.asn.fr/index.php/S-informer/Actualites/2009/Systeme-de-controle-commande-du-reacteur-EPR
[3] Further details about TELEPERM XS are available from AREVA NP GmbH NLT-G, Steffen Richter, Paul-Gossen-Straße 100 , 91052 Erlangen, Germany
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