Fichage en Sarkoland : rebelote
On vient à peine d’obtenir la suspension d’un fichier de police dénommé Ardoise, visant à ficher (afin de faire des "statistiques") les homos, trans, syndicalistes, prostitués et handicapés physiques et mentaux. Eh bien la semaine dernière, Sarko a remis ça : il nous a pondu un décret établissant le fichier Edvige, complètement liberticide, et 100 % vichyste (on doit à Pétain la carte d’identité, les RG ou les CRS, ce n’est pas pour rien...)
Le syndicat de la magistrature a dénoncé, dans un communiqué de presse daté du 3 juillet, un nouveau fichier : Edvige. Fort justement, le syndicat "appelle à la mobilisation contre la mise en place de ce fichier d’inspiration anti-démocratique". Mais - comme par hasard - personne n’a rien dit, ni chez les politiques ni chez les syndicats ni dans les médias.
Dans ce décret ("n° 2008-632 du 27 juin 2008 portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Edvige »), signé par Fillon et Allliot-Marie, on préconise de ficher tout citoyen de plus de 13 ans engagé dans une association ou un parti, ou menant une quelconque activité citoyenne. Ledit fichier est destiné à être utilisé par les RG et la DST, chargée de la surveillance du territoire. Les deux sont aujourd’hui, sur une idée de Sarkoléon, réunis dans la Direction centrale de la sécurité publique.
Encore une fois, comme la loi sur la détention préventive, Edvige stigmatise une partie des citoyens pour peu qu’ils soient susceptibles de troubler l’ordre public. Ce ne sont plus les "infractions constatées" qui sont listées, mais des gens qui pourraient peut-être, un jour, entrer dans une forme de contestation qui nuirait forcément à "la sûreté de l’Etat". Ainsi, un écolo de Greenpeace, par exemple, est forcément un suspect potentiel risquant de se livrer à une quelconque opposition à l’Ordre établi.
Voici le texte :
Le ministre de l’Intérieur est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé et des fichiers de données à caractère personnel intitulés Edvige (Exploitation documentaire et valorisation de l’information générale) ayant pour finalités, en vue d’informer le gouvernement et les représentants de l’Etat dans les départements et collectivités :
1. de centraliser et d’analyser les informations relatives aux personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif, sous condition que ces informations soient nécessaires au gouvernement ou à ses représentants pour l’exercice de leurs responsabilités ; quelle restriction ! ;
2. de centraliser et d’analyser les informations relatives aux individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l’ordre public ;
3. de permettre aux services de police d’exécuter les enquêtes administratives qui leur sont confiées en vertu des lois et règlements, pour déterminer si le comportement des personnes physiques ou morales intéressées est compatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées. Cela veut simplement dire qu’il y aura des enquêtes systématiques pour vérifier que tout le monde reste bien dans le rang.
Art. 2
Conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, et dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à la poursuite des finalités mentionnées à l’article 1er du présent décret, les catégories de données à caractère personnel enregistrées dans le traitement mentionné à l’article 1er et concernant des personnes physiques âgées de 13 ans et plus sont les suivantes :
― informations ayant trait à l’état civil et à la profession ;
― adresses physiques, numéros de téléphone et adresses électroniques ;
― signes physiques particuliers et objectifs, photographies et comportement ;
― immatriculation des véhicules ;
― informations fiscales et patrimoniales ;
― déplacements et antécédents judiciaires ;
― motif de l’enregistrement des données ;
― données relatives à l’environnement de la personne, notamment à celles entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec elle. Cet article est très grave, puisqu’il permet d’enquêter sur l’entourage de toutes les personnes impliquées dans des assos, partis ou autre. En gros, nos amis et leurs amis seront fichés également. Comme ça, ils auront l’ensemble des réseaux de relation de ces gens, et s’ils veulent nous choper, un jour dans un Etat policier, ils n’auront plus qu’à faire le tour de nos relations.
Les données collectées au titre du 1 de l’article 1er du présent décret ne peuvent porter ni sur le comportement ni sur le déplacement des personnes.
Le traitement peut enregistrer des données à caractère personnel de la nature de celles mentionnées à l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée. Celles de ces données autres que celles relatives aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou à l’appartenance syndicale ne peuvent être enregistrées au titre de la finalité du 1 de l’article 1er que de manière exceptionnelle. Il est interdit de sélectionner une catégorie particulière de personnes à partir de ces seules informations.
Le traitement ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de la photographie.
Les données concernant les mineurs de 16 ans ne peuvent être enregistrées que dans la mesure où ceux-ci, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l’ordre public. Mon œil, je suis déjà fichée au moins depuis mes 16 ans, quand on faisait des manifs au lycée contre les lois Allègre anti-mamouth.
Les données collectées pour les seuls besoins d’une enquête administrative peuvent être conservées pour une durée maximale de cinq ans à compter de leur enregistrement ou de la cessation des fonctions ou des missions au titre desquelles l’enquête a été menée.
Dans la limite du besoin d’en connaître, sont autorisés à accéder aux informations mentionnées à l’article 2 :
― les fonctionnaires relevant de la sous-direction de l’information générale de la direction centrale de la sécurité publique, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur central de la sécurité publique ;
― les fonctionnaires affectés dans les services d’information générale des directions départementales de la sécurité publique ou, à Paris, de la préfecture de police, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur départemental ou, à Paris, par le préfet de police.
Peut également être destinataire des données mentionnées à l’article 2, dans la limite du besoin d’en connaître, tout autre agent d’un service de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, sur demande expresse, sous le timbre de l’autorité hiérarchique, qui précise l’identité du consultant, l’objet et les motifs de la consultation.
Art. 4
Le traitement et les fichiers ne font l’objet d’aucune interconnexion, aucun rapprochement ni aucune forme de mise en relation avec d’autres traitements ou fichiers.
Art. 5
Conformément aux dispositions prévues à l’article 41 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, le droit d’accès aux données s’exerce auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Le droit d’information prévu au I de l’article 32 et le droit d’opposition prévu à l’article 38 de la même loi ne s’appliquent pas au présent traitement. Ca, ça veut simplement dire qu’on peut toujours se brosser si on veut connaître le contenu du fichier à notre nom, alors qu’en principe, dans une société démocratique, les citoyens ont le droit de vérifier les informations les concernant. Ne serait-ce que parce qu’il y a environ 30 % d’erreurs dans les fichiers RG et de police, du moins ceux auxquels on peut encore avoir accès.
Art. 6
Sans préjudice de l’application de l’article 44 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, le directeur général de la police nationale rend compte chaque année à la Commission nationale de l’informatique et des libertés de ses activités de vérification, de mise à jour et d’effacement des informations enregistrées dans le traitement.
Art. 7
Le présent décret est applicable sur tout le territoire de la République.
Art. 8
Le présent décret entre en vigueur le jour de l’entrée en vigueur du décret n° 2008-631 du 27 juin 2008 portant modification du décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 relatif aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux et du décret n° 2007-914 du 15 mai 2007 pris pour l’application du I de l’article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.
Art. 9
La ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer et des Collectivités territoriales est chargée de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 27 juin 2008.
François Fillon
Par le Premier ministre :
La ministre de l’Intérieur,
de l’Outre-Mer et des Collectivités territoriales,
Michèle Alliot-Marie
Conclusion : le fossoyeur de l’Etat de droit poursuit son travail de sape des libertés et des restes de démocratie.
Mais qui est visé, en fait, par ces délires ? Les fameux "anarcho-autonomes" bien sûr ! Ceux-là même dont Le Figaro nous rebat les oreilles depuis l’élection de Sarkoléon et la semaine d’émeutes qui a suivi la grande victoire du chef.
Le syndicat de la magistrature a d’ailleurs alerté lesdits gauchistes au mois de juin, les prévenant que "Le 13 juin dernier la Direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice a publié une note à destination des parquets afin de faire face à « la multiplication d’actions violentes commises sur différents points du territoire national susceptibles d’être attribuées - ça n’est donc même pas sûr - à la mouvance anarcho-autonome », notion dont il convient d’observer l’absence de contours précis."
Le communiqué poursuit, en précisant l’idée qu’ils ont derrière la tête, là-haut. Pour le chef, les "anarcho-autonomes" font des tags, s’en prennent aux institutions et sont présents dans les manifs pour les étrangers ou pour les prisonniers politiques. Le syndicat s’inquiète surtout du fait que Sarko a demandé aux magistrats « d’informer dans les plus brefs délais la section antiterroriste du parquet de Paris pour apprécier de manière concertée l’opportunité d’un dessaisissement à son profit » et, par voie de conséquence, de permettre une extension quasi illimitée d’une législation d’exception. C’est simple : les RG et la DST géreront seuls la question des gauchistes, de ce qu’ils appellent "la mouvance anarcho-autonome".
48 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON