L’OpenData, c’est bien plus que de la communication politique !
Né de projets « grassroots » structurés autour d’organisations citoyennes comme la Sunlight Foundation, MySociety ou l’Open Knowledge Foundation, l’OpenData investit pas à pas le champ institutionnel : San Francisco, Toronto, New York, projets data.gov américain, anglais ou encore piémontais, …
Cette émergence institutionnelle ouvre une opportunité politique aux pays, comme la France, qui n’ont pas encore rejoint le mouvement. Encore faut-il pour cela ne pas réduire cette démarche à de simples gadgets politiques. Au-delà des pures positions de principe, l’OpenData doit respecter certaines règles pour être réellement source d’innovation sociale, politique et économique. Pour faire émerger des usages innovants, la question des licences libres est un point clé.
Des initiatives françaises sous influence commerciale
Quelques initiatives locales prennent pourtant petit à petit la bonne direction. Les villes de Brest, Nantes ou Bordeaux ont ouvert la réflexion. A Plouarzel ou Rennes, on passe à l’action. Dans la capitale bretonne, l’opérateur des transports en commun Keolis Rennes a commencé à ouvrir ses données en mars 2010. Bien que proposant d’abord des licences non-commerciales, Keolis revient rapidement sur ses premiers choix pour s’orienter progressivement vers de véritables licences libres au sens de l’OpenDefinition, c’est-à-dire sans imposer de restriction à l’usage. Le même choix a été fait par Plouarzel, petite ville du Finistère : c’est ce qui lui permet d’utiliser OpenStreetMap comme outil de cartographie communal.
Limiter la réutilisation des données aux usages Non-Commerciaux (NC) représente un vrai risque juridique pour les (ré)utilisateurs. Savoir évaluer si un usage est commercial ou non relève parfois du véritable casse-tête. Les journalistes vendent leurs articles : devraient-ils arrêter de le faire s’ils utilisent des données dont la diffusion commerciale est limitée ? Si un internaute décide de créer une application internet innovante à partir de données publiques, peut-il y intégrer de la publicité pour couvrir ses frais d’hébergement sans être considéré comme un usage commercial ? De même, un important opérateur internet proposant un service cartographique sans publicité mène-t-il une action non-commerciale ? Tous ces problèmes juridiques constituent autant de freins à la réutilisation des données et l’émergence d’outils et de services innovants. Alors que les gros acteurs pourraient assumer ce coût d’accès, les actions menées par des citoyens (Wikipedia, OpenStreetMap, …) et des petites entreprises innovantes sont limitées par cette clause NC. Nous y reviendrons plus précisément dans un prochain billet.
L’Open Data parisien risque le contresens historique
C’est d’abord avec enthousiasme puis plutôt déçus que nous avons appris vendredi dernier la volonté de la Mairie de Paris de se lancer sur le terrain des données publiques. La première étape politique passait par une délibération (DAJ 18) à l’ordre du jour du Conseil de Paris en début de semaine. Sous le vocable de l’OpenData et en prenant appui dans son exposé sur les initiatives étrangères, le projet du responsable TIC de la Mairie, Jean-Louis Missika, prenait en réalité fortement la direction tarifée prônée par l’APIE. Une direction opposée aux principes de bon fonctionnement de l’ouverture des données.
Les initiatives officielles d’OpenData ont toujours nécessité des prises de position politique fortes présentant la libération des données comme vecteur d’innovation sociale et économique. Ici, l’exécutif parisien se repliait derrière une fantasmagorique complexité juridique afin d’éviter de trancher une position politique.
Un lobbying citoyen et transparent
Comme nous le faisons ponctuellement en soutenant l’association nantaise LiberTIC ou en valorisant les évolutions constructives de l’initiative Rennaise, nous avons décidé de participer à la promotion de l’OpenData à Paris en procédant en toute transparence à un lobbying citoyen autour de cette délibération. Objectif : faire évoluer la position de l’exécutif parisien. Nous avons débuté avec Twitter en relayant le programme des débats, puis en échangeant publiquement avec divers acteurs comme Wikimedia ou même l’exécutif parisien, doté pour l’occasion d’un tout nouveau compte de com’ intitulé OpenDataParis. Nous avons également formulé un amendement visant à compléter les manques du texte et l’avons transmis à divers canaux politiques.
Jean-Louis Missika parlait dans son discours d’un « chantier historique ». L’histoire ne retiendra pas cette délibération timorée. Mais nous continuerons notre dialogue transparent avec les services parisiens comme avec ceux des autres villes en espérant que l’Open Data ne soit pas restreinte à un simple gadget politique alors qu’elle constitue un véritable vecteur d’innovation sociale et économique. Les exemples anglais, italien, canadien ou américain, ainsi que les études européennes, démontrent cette opportunité. Avec un peu de courage politique, la France et Paris peuvent encore prendre le train en marche et avancer vers une société de l’information ouverte et innovante.
Délibération du Conseil de Paris du 08/06/10 sur l’ouverture des données
from RegardsCitoyens on Vimeo.
Article publié originellement sur le blog de RegardsCitoyens.org
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