La diversité à l’Assemblée nationale
De la représentativité multiculturelle et sociale dépend la bonne santé de la démoctratie française. Alors que les partis traditionnels sont incapables de redresser la situation, et que les extrèmismes débordent, ce sujet devient un enjeu majeur pour les prochaines législatures.
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De la diversité, on dit beaucoup de choses mais on ne sait rien. Tous les politiques de droite comme de gauche ont un jour largué les amarres pour entamer une longue odyssée sur les océans de la diversité. La plupart ont cédé aux sirènes de la démagogie, et sans pouvoir trouver leur chemin, ont retrouvé à leur retour, le portique du Palais de l’Elysée ouvert, et Marianne au bras d’un autre homme. Si Sarkozy a accueilli dans son gouvernement des ministres que l’on a dit issus de la diversité comme Rachida Dati, Rama Yade, ou encore Fadela Amara, aucun d’entre eux n’a su porter un message audible, ni se hisser au rang de porte-parole des minorités. Au-delà de la portée symbolique de ce geste venant d’un président connu pour ses diatribes incongrues sur l’identité nationale en général, et l’immigration en particulier, l’opération aura été « chaotique » pour reprendre les termes employés par le quotidien l’Express. Du côté du Parti socialiste, Harlem Désir est devenu le Premier secrétaire du PS en octobre 2012, mais se présentant lui-même comme un Premier secrétaire de transition, l’ancien Président de l’association SOS Racisme devrait jouer un rôle d’intérimaire en attendant que les éléphanteaux remplacent les mammouths au Parti Socialiste. Le problème de la représentativité ne concerne pas seulement la diversité multiculturelle mais également la diversité sociale. Après l’affaire Cahuzac, les membres du gouvernement ont dû rendre une déclaration de patrimoine. Et le 15 avril 2013, lorsque le patrimoine des ministres a été dévoilé sur un site gouvernemental, la France a pu s’apercevoir que, paradoxalement, les Ministres du gouvernement de gauche de Jean Marc Ayrault n’étaient pas les plus mal lotis, et avaient pour certains d’entre eux, une grande fortune personnelle.
En vertu de l’article 3 de la Constitution de 1958 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par la voie de ses représentants et par la voie du referendum », et le second alinéa vient ajouter : « Aucune section du peuple, ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice ». Le problème de la représentativité en politique n’est pas nouveau, puisqu’à l’aune de la République, une élite éclairée élue par le suffrage censitaire gouvernait le peuple pour le guider vers la voie du bien commun. De 1791 à 1848, le suffrage censitaire aura fait des retours remarqués au sein des institutions françaises notamment au cours de la Restauration et de la Monarchie de Juillet. Le suffrage censitaire réserve le droit de vote à une certaine catégorie de citoyen, capable de payer un impôt dépassant un certain seuil, le cens. S’agissant de la diversité multiculturelle, Blaise Diagne, premier député issu des colonies élu en 1914, a longtemps brillé au sein de l’Assemblée nationale pour son franc-parler, et son rêve d’imposer l’égalité en droit entre les citoyens, et d’exclure toutes formes de discrimination à l’égard des « indigènes ». Il deviendra Sous-secrétaire d’Etat aux colonies. La comparaison avec la France coloniale peut paraître abrupte mais à la différence des autres puissances coloniales, la France a admis des représentants issus des colonies dans l’antre de l’assemblée nationale. L’accueil que leur a réservé la presse n’a sans doute pas été des plus chaleureux. Le sentiment de supériorité dominait les esprits à cette époque, et les journaux caricaturaient Blaise Diagne avec des lèvres épaisses, et un air ahuri, le racisme n’a pas d’âge.
Que dire aujourd’hui de la représentativité sociale et multiculturelle à l’Assemblée nationale, la chambre élue par le bicaméralisme français pour devenir le dernier bastion démocratique contre la volonté de l’exécutif de faire du Parlement une simple chambre d’enregistrement. La diversité progresse, pour la première fois huit députés issus « de la diversité » siègeront à l’Assemblée Nationale dont le très médiatique Malek Boutih, élu de la 10ème circonscription de l’Essonne. Cependant, ces huit seuls députés ne suffisent sans doute pas à illustrer le visage multiculturel de la France, elle reste manifestement insuffisante. Quant à la diversité sociale, il ne faudra pas attendre une déclaration de patrimoine des députés pour se rendre compte qu’entre la France et ses parlementaires, il y a un fossé, un gouffre d’argent et de pouvoir, qu’aucun vote si légitime soit-il ne saurait justifié. Pour se rassurer, encore faut-il rappeler que la parité homme-femme au sein de l’assemblée nationale ne s’est imposée que très récemment sous l’impulsion d’une entente entre les deux grands partis de gouvernement. Mais lassés du trust des deux grands partis que sont le PS et l’UMP, de leur manque cruel de représentativité, et des affaires qui sont le lot quotidien de la République, lorsque l’on se refile le flambeau comme un relais dans une course où il n’y a aucun vainqueur, mais qu’un seul vaincu, la France, les français pourraient bien se tourner vers un parti d’extrême gauche, ou pire encore d’extrême droite.
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