La fin des 35 heures au Conseil Départemental des Alpes Maritimes
Eric CIOTTI, président de l’assemblée départementale sait communiquer et soigne son image de rigueur en annonçant que les 4500 agents de la collectivité qu’il préside vont devoir revenir sur leurs avantages actuels en matière de temps de travail avec la perspective du retour aux 39 heures. Dans un premier temps les congés des agents du Conseil départemental des Alpes Maritimes vont diminuer de 14 jours.
Un peu d’histoire
Autrefois, il était de bon ton de critiquer les fonctionnaires qui « se croisaient dans les couloirs des ministères entre ceux qui arrivaient et ceux qui partaient ». Cette image appartient au passé depuis la mise en œuvre des 35 heures dans la fonction publique depuis près de 15 ans qui s’est souvent accompagnée de la mise en place de système de gestion du temps travaillé, autrement dit de « pointeuses ».
Mais voilà, ce qui aurait dû être à l’origine un mouvement bienvenu d’harmonisation du temps de travail entre public et privé, s’est souvent transformé en mascarade politico-syndicale, les premiers prêts à lâcher du lest en descendant en dessous des 35 heures réglementaires par pur opportunisme politique et par lâcheté, les seconds voulant à tout prix conserver les « avantages acquis », c’est-à-dire reconnaissant implicitement que certains agents n’effectuaient déjà pas 35 heures du temps des 39 heures et voulant signer des accords prenant en compte cette anomalie pour ne pas déplaire « à la base ».
La chienlit
Aujourd’hui, la situation d’un conseil départemental à l’autre et d’une manière générale d’une collectivité territoriale à une autre est très variable et le clivage entre exécutif de droite et de gauche n’est pas la bonne manière de voir les choses. En effet, et c’est le cas du Conseil départemental des Alpes Maritimes, les exécutifs de droite n’ont pas été les moins généreux ou les plus rigoureux dans leur manière d’appréhender le temps de travail et M. CIOTTI revient en fait sur la décision d’un de ses prédécesseurs UMP qui a signé un accord à 1568 heures annuelles travaillées au lieu des 1607 réglementaires.
D’autres départements, dont un dirigé par un centriste cumulard aux discours critiques sur la fonction publique ont même bénéficié d’accord encore plus avantageux que dans certains départements ou collectivités dirigées par des socialistes, voire des communistes, à tel point que la durée du temps de travail est un critère pris en compte par les agents qui souhaitent être mobiles d’une collectivité à une autre. Et tout cela grâce ou à cause du jeu de rôle néfaste entre syndicats et exécutifs.
LE cynisme de M. CIOTTI
M. CIOTTI fait preuve d’opportunisme politique avant tout en déclarant qu’il approuve le message du Ministre de l’économie, Emmanuel Macron sur la remise en cause des 35 heures, preuve que droite et gauche peuvent se rejoindre dès qu’il s’agit de restreindre les droits des salariés. Il s’appuie par ailleurs sur la baisse des dotations de l’Etat pour dire qu’il faut absolument faire des économies (4 à 5 Millions d’euros par an).
Il fait preuve aussi sans doute d’une grande solidarité vis-à-vis de Christian ESTROSI, son collègue UMP Président de la Métropole niçoise, collectivité vers laquelle des transferts d’agents départementaux sont prévus en application de la loi NOTRe, ce qui permettra sans doute à ce cher collègue UMP de s’appuyer sur ces nouvelles règles du temps de travail pour les imposer à ses propres agents.
M. CIOTTI déclare « qu’être à la tête d’un exécutif nécessite du courage ». On a envie de dire qu’il faut avant tout faire preuve de cynisme.
Prochaine étape : la remise en cause du statut
Qu’on se s’y trompe pas : l’axe CIOTTI/MACRON sur le retour aux 39 heures, voire plus, sera bientôt à nouveau opérant pour remettre en cause les statuts de la Fonction Publique, et le modèle anglais de dérégulation globale du marché du travail avec le contrat zéro heure dans le privé à de beaux jours devant lui en France.
Face aux menaces qui pèsent sur les salariés qu’ils soient du public ou du privé, quelles sont les solutions ?
S’en remettre aux seuls politiques en jouant sur la carte de la concurrence entre partis est totalement illusoire et on le voit bien actuellement : le débat est totalement pollué par « le réalisme économique », concept qui permet de mutualiser les pertes et de privatiser les bénéfices, de verser ou d’exempter les entreprises de dizaines de milliards d’euros sans que l’on voit poindre le moindre emploi créé.
S’en remettre aux syndicats qui courent après les adhérents et sont davantage préoccupés par la préservation de leurs parts de marché, quand ce n’est pas d’entretenir l’illusion du « grand soir », constituerait une erreur.
Rétablir la vérité
Alors il faudra bien que les lignes bougent et que les fonctionnaires publics, notamment dans les collectivités territoriales nomment les choses et communiquent avec les citoyens, leurs vrais employeurs, pour dire que la gabegie n’est pas là où les politiques se complaisent à la désigner, mais qu’elle est dans les décisions qu’ils prennent eux-mêmes, dans les dépenses parfois inutiles qu’ils votent eux-mêmes et surtout dans l’existence d’une myriade de couches de collectivités locales qui nourrissent très bien les élus et leurs obligés en leur permettant de faire carrière.
Dans mon département, ce sont 11 millions par an qui pourraient être économisés (au moins) en supprimant le Conseil départemental (les élus et les contractuels politiques qui gravitent autour d’eux, le tout payé par les contribuables) et en transférant ses compétences et les agents qui les exercent à d’autres collectivités (Région, Intercommunalités, CAF,…).
…Bien mieux que les 4 à 5 millions annoncés par M. CIOTTI, qui préfère développer un discours anti-fonctionnaire populiste dans l’air du temps, plutôt que de faire son boulot d’élu.
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