Le naufrage intellectuel des élites
Soyons classiques, d'abord les causes, ensuite les conséquences !
Il y a à peu près trois choses qui éduquent les enfants : les parents, les profs et la télé. On s'interroge à juste titre de manière récurrente sur les causes de l'érosion de l'éducation, à mon sens, les parents n'ont pas vraiment changé, on pourrait dire même que sans doute ils se sont améliorés. Les profs structurellement également n'ont pas vraiment changé, reste donc l'apparition du troisième acteur : la télévision, en effet pour rappel, cette dernière il y a encore deux générations n'existait pas et a pénétré plus vite que n'importe quelle technologie dans le foyer moyen bourgeois. (On pourra lire à ce sujet TV Lobotomie de M Desmurget que d'autres ici sur Agora Vox ont déjà louangé).
Interrogeons-nous un peu sur les dramatiques conséquences de ce nivellement par la bas qu'a commis la télévision : avant probablement, tous les ingénieurs avaient lu tout Victor Hugo, aujourd'hui, tout au plus connaissent-ils les résultats de la D1 (je peux en témoigner je fréquente le centre des élites de ce pays : la Défense à Paris et sur la ligne 1, le matin, les lectures vont rarement au delà d'un Marc Lévy ou d'un Guillaume Musso).
De manière plus explicite, les classes jadis étaient joliment segmentées à la manière décrite par un célèbre barbu, le conflit était facile à concevoir de cette manière et du coup trouvait facilement sa résolution.
En nous éduquant tous au petit écran (outre sa capacité à décrédibiliser l'enseignement pour des raisons qui feront à votre souhait l'objet d'un ultérieur article), nous avons aujourd'hui l'illusion de tous appartenir à une même classe/génération : le cadre supérieur et l'opérateur peuvent de la plus illusoire des manières croire se retrouver autour de valeur commune qui ne sont pas plus que des sujets de conversation que nous fournit le petit écran ; en vrac : la météo (le standard ultime), les résultats sportifs (ou le rêve des pauvres dans l'escarcelle des fantasmes compétitifs des riches), les faits divers (« le fait divers fait diversion » P. Bourdieu)...
Naturellement la télé a réussi à amasser sous son emprise l'ensemble des publics d'une génération détruisant du même coup le pluralisme des idées (« il faut combattre la logique de l'audimat au nom de la démocratie » même auteur) ce qui conduit et cela n'aura pas échappé à notre communauté à n'avoir que des tenants du oui sur le référendum européen pour ne prendre que cet exemple emblématique.
Et surtout elle a réussi à détruire la valeur de responsabilité portée par les élites, s'empressant par là même liée à son culte de l'anecdote à les rabaisser (un certain ex-président du FMI peut en fournir un bon exemple, un autre ploutocrate à la tête de la France avec son culte bling bling pourrait également être cité), la responsabilité et l'autorité qui incombait à ces dernières a donc chu. J'en veux même pour preuve que j'ai bien dû faire quelques fautes dans cet article et je vais sans doute céder à la tentation de bien y glisser un ou deux smileys : :p voilà c'est fait ! (Je vous épargne une écriture sms).
Loin de moi l'idée de jouer les chantres de Francis Cabrel (« C'était mieux avant »), j'ai dû brûler mes CD de F. Cabrel en même temps que ma TV, mais il convient de s'interroger sur ce fait qui va sans doute modeler durablement les sociétés modernes...
Bibliographie indicative :
TV Lobotomie de M Desmurget
Les petits soldats du journalisme de F Ruffin
La société du spectacle de Guy Debord
La Société de Consommation de J Baudrillard
Sur la télévision de P Bourdieu
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