Un conseiller de l’ANPE incité à avisé la police lors de la venue d’une personne recherchée, des travailleurs sociaux clairement menacés par des fonctionnaires de la PAF d’être poursuivis pour « aide au séjour irrégulier d’étranger », une personne qui souhaite faire valoir ses droits à la retraite appelée à « justifier que ses parents et grands-parents n’ont jamais abandonné leur nationalité française lors de leur séjour en Amérique latine »... Les exemples ne manquent pas du durcissement de la politique d’immigration qui se transforme selon de nombreux observateurs en « chasse aux étrangers ».

Selon
Dominique Rols, fonctionnaire à la Direction du travail de Saint-Etienne,
"la situation des étrangers, sans papiers, mais aussi en situation légale sur le territoire français, devient de plus en plus difficile". A tel point qu’un réseau,
le REFI, vient de se mettre en place à Lyon, sur le modèle du Réseau éducation sans frontière (RESF), pour rassembler et coordoner les informations sur ces durcissements organisés au niveau des préfectures par le ministère de
Brice Hortefeux.
La constitution de fichiers
A la demande de ce ministère en effet, une section spéciale d’inspecteurs du travail a été détachée, non pas pour traquer le travail clandestin, ce qui est une de leurs missions, mais pour "faire la chasse aux étrangers". Comme par hasard, les employeurs de travailleurs sans papiers ont dorénavant moins de souci à se faire : selon une circulaire récente, il leur suffit de "transmettre aux préfectures, quand ils ont des doutes, les photocopies des titres de séjours de leurs salariés étrangers pour dégager leur responsabilité pénale". Et ainsi grossir les fichiers des personnes à expulser ! Car "si la préfecture ne répond pas dans les 48 heures, l’employeur ne peut plus être poursuivi". Les personnes ainsi expulsées, dans le cadre de procédures ultrarapides, n’ont même plus le temps de faire valoir leurs droits (salaire, prime de précarité...). Tout bénéfice pour l’employeur !
Dans les ANPE et les Assédic, on demande maintenant aux fonctionnaires de photocopier systématiquement les titres de séjours d’ étrangers, qui, par nature, s’ils touchent les Assédic, ne sont pas des primo-arrivants. La plupart sont en France depuis plusieurs dizaines d’années, titulaires de titres de séjours réguliers. D’après les responsables du REFI, ces demandes visent clairement à contourner les directives de la CNIL (Commission informatique et liberté) qui interdit le croisement de fichiers anciens, en en créant d’autres, beaucoup plus actualisés et performants. Il s’agit donc petit à petit d’établir un "filet" dans lequel se retrouvent tous les étrangers et personnes d’origine étrangère, qui se sont adressés à un moment ou un autre à une institution comme la CAF, La Poste, l’ANPE, l’Urssaf et même la Caisse d’assurance maladie.
Le ministère de la Justice absent du processus
Les fonctionnaires et travailleurs sociaux membres du REFI disent "s’insurger contre des directives qui bafouent, hors de tout cadre légal, le secret professionnel auquel ils sont soumis" et les met en rapport direct avec la police à laquelle ils sont tenus de divulguer des informations confidentielles. "Il est symptomatique, disent-ils, que la justice, en l’occurence le procureur de la République, soit absente du processus !".
Des procédures pour aide au séjour irrégulier
A Lyon, des travailleurs sociaux en contact avec des prostituées ont été menacés directement par les fonctionnaires de la PAF (Police de l’air et des frontières) qui leur a "demandé de collaborer en appelant les personnes recherchées à venir chercher un courrier afin de pouvoir les appréhender à la porte". "Comment voulez-vous qu’on établisse des relations de confiance avec des personnes qui par nature sont très réticentes ?", demande un éducateur. Qui ajoute non sans malice que son travail sur la santé et la prévention "est financé par des fonds publics dans le cadre de programmes européens !", déclare un assistant social.
Mais les menaces ne sont pas à prendre à la légère, car les personnes qui hébergent ou ont l’intention d’héberger des sans-papiers, de même que ceux qui leur ont facilité la tâche sont aujourd’hui passibles de poursuites punies par des peines d’amendes, voire de prison.