Le rêve américain, vraiment ?
J'ai toujours été mauvais élève. Puis, mauvais garçon. Puis, mauvais citoyen. Puis, mauvais à tout. N'est-ce pas dans la progression que la société mesure et identifie les futurs coupables ? Quoi que je fasse, quoi que je dise, j'ai toujours été laissé de côté. Parce que je sautillais sur la marge pendant que les autres filaient en rang d'Ognon ? Pourquoi ce mauvais regard alors que je ne posais que des questions simples ?...
C'était à la belle époque des trente glorieuses et du rêve américain. Un vrai virus, ce putain de rêve ! Ça contaminait tout sur son passage. Mais cela suffisait à faire bander du corgnolon le petit bougnoule que j'étais, avant que des sales types ne disent que j'étais de la mauvaise graine bonne pour la potence. Pourquoi qu'ils disaient ça ?... Ce n'est que bien plus tard que j'ai su ce que c'était qu'une potence, en regardant des films américains qu'on diffusait dans le cinéma du quartier. L'homme aux colts d'or, Ben-Hur, Les dix commandements, Barabbas, des histoires à dormir debout, mais moi ça me tenait bien ligoté au fauteil. Je vous garantis que je rêvais Amérique comme personne, à sa grandeur, aux étoiles sur le drapeau. Pour vous dire, mes copines du quartier mettaient des écharpes aux couleurs du drapeau américain par plus 40° degrés à l'ombre ! Je me souviens de John Wayne, Gary Cooper, Burt Lancaster, Errol Flynn. Quel pirate çuilà ! De Marilyn et de bien d'autres canons de beauté sur lesquels je jetais des lorgneries à mettre le feu à l'écran du cinoche, au quartier, à la ville. La Marilyn et son poupoupidou ! (pas confondre avec notre sinistre Pompidou, hein). Rien que pour zieuter son balconnet, ou celui de la Sofia Loren, ou le regard chavirant d'Ava Gardner j'aurais sulfaté tous les copains de la cité ! Et même ceux de la cité voisine !
Rien à faire, né « bougnoule » je n'avais d'autre droit que celui de subir sans gémir les regards haineux, le mépris, les coups de pied au cul !... Y en a qui naissent bon et y en a qui naissent mauvais, disaient-on avec fatalisme, j'étais donc de ceux-là ! Un vrai mauvais ! Je pensais que nous naissions tous bons et que c'est après que ça se gâtait…
J’ignore encore à l'instant à quoi ressemble le « rêve américain », mais s'il s'agit de celui qu'on a montré aux indiens avec l'arrivée des caravanes des conquérants, c'est loupé ! Pareil que partout où ce « rêve » est venu fragmenter, rompre, vendre et avilir des humains, dévastant les cultures, faisant de la vie un enfer et du rêve un cauchemar. C'est cela que nos politiques cherchent à imposer en Hexagonie : privatiser un peuple pour le vendre en tranches ?...
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