Les ennemis de la vérité
Ils mentent comme ils respirent…
Le mensonge est désormais le passage obligé pour celui qui fait métier de la chose publique comme si la vérité était mauvaise à dire et qu'il convenait dorénavant de la grimer de fausseté et de propos obliques. Il en est même qui l'ont élevé au rang de vérité alternative, se faisant malin plaisir à rouler dans la farine le citoyen. Tant que le mensonge ne sera pas considéré comme une forfaiture inique, un délit contraire au code moral de la fonction, le peuple ne donnera plus créance à ses élus.
Il y avait jadis le pieux mensonge, celui qui sauvait les apparences, permettait de faire passer la pilule ou favorisait l’absorption de couleuvres. Bien des têtes couronnées se sont attachées à ce pieu pour justifier des abominations, les couvrir d'un épais brouillard, brouiller les pistes et les propos. Ce procédé avait une dimension sacrée, se paraît d'une onction divine quand la fonction était le fruit d'une mission sacrée.
Le mensonge par omission a pris la place puisqu'il n'était pas convenable de s'en référer à l'être suprême pour raconter des sornettes. Le mensonge devenait alors une sorte d'amnésie commode, de trou de mémoire dans lequel recouvrir les mauvaises actions avec des paroles qui détournaient l'attention. Nous avions alors une feinte destinée à leurrer le corps électoral.
Puis il y a eu le mensonge d'État. Une stratégie collective visant à détourner le regard, à troubler les pistes, à monter un gros bobard pour cacher une vilaine action, un crime inavouable. Tous les rouages de l'administration se mettant en branle pour servir une version conforme à la morale quand la vérité suintait l'abjection. Le secret nimba ce mensonge d'une couverture qu'il était impossible de soulever.
C'est alors qu'est apparu le mensonge ordinaire, usuel, quasi quotidien. Une forme de réflexe conditionné pour prendre les électeurs à leur propre piège en les berçant d'illusions. Constitué de promesses vaines, de données faussées, d'analyses erronées, de propos fielleux, cette pratique est devenue monnaie courante au point que dans la bouche d'un responsable, il est impossible maintenant de démêler le vrai du faux.
Se rendant compte que leur crédibilité était en berne, ils ont fait appel à des officines spécialisées qui ont cherché à travestir leurs discours en usant de toutes les techniques de la dialectique pour mentir vrai, pour brouiller les pistes, pour noyer le poisson en usant à loisir de formules alambiquées qu'ils ont nommé : « Éléments de langage ! ». Comme si le mensonge était consubstantiel à leur fonction, ce qui finit hélas par être le cas.
Poussant le bouchon plus loin, de plus retors, de bien plus vicieux se sont dit qu'il n'était pas besoin de prendre tant de précautions. Mentir volontairement, dire des énormités, balayer la raison et la logique pouvait parfaitement entrer dans une stratégie qui élève le mensonge au rang de Principe de Gouvernance. Ils ont ainsi mis en avant ce qu'ils appellent la vérité alternative, la face sacralisée du mensonge.
Plus c'est gros plus ça marche tandis que les braves gens, habitués à ce que plus rien ne soit vrai dans la bouche des gouvernants, se complaisent à choisir la version la plus énorme, celle qui s'éloigne le plus d'une vérité plausible. Dans cet univers où la sincérité n'a plus cours, cette forme exacerbée a au moins le bonheur de plaire et de divertir.
Nos chères têtes couronnées mentent comme elles respirent sous assistance respiratoire. La main sur le porte-monnaie, ils ne cherchent même plus leur cœur. Ils jurent leur grand dieu que leur parole est gravée dans le marbre dont Yahvé fit jadis les tables de la Loi. Nous savons qu'ils sont tous parjures et qu'il n'est plus rien à espérer de ces immondes canailles.
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