Les indignés 57
Paradoxalement, c'est de la part de militants (de partis politiques essentiellement de gauche, la vraie et de syndicats) que les indignés perçoivent souvent des réticences.
Ce qui revient toujours c'est :
« Vous n'arriverez à rien. Ce qu'il faut, c'est une grève générale ; il n'y a que de cette façon qu'on obtient quelque chose. » (Notez le « vous » alors que cela devrait être « nous »)
Ma réponse est bien rodée maintenant :
« Depuis combien de temps attendez-vous cette fameuse grève générale ? Ne remontons pas jusqu'à la préhistoire, parlons seulement de la période de contestation de la régression des retraites, automne 2010. Même dans ce contexte où la majorité de la population était contre le projet du gouvernement, où plus de trois millions de personnes étaient dans les rues, vous n'avez pas obtenu une grève générale... et vous y croyez encore ? Et cela reste encore votre cheval de bataille ?
Vos adhérents sont si peu nombreux par rapport à la population... peanuts, les amis, peanuts... et pourtant, vous existez depuis des décennies !!!
Prenez conscience que vos discours sont formatés, répétitifs et, surtout, inefficaces, ceci dit sans vouloir vous fâcher, c'est un constat, simplement un constat dont vous devriez tenir compte pour réfléchir et changer de méthode.
Vous êtes dans une ornière et vous vous obstinez à y piétiner encore, ne faisant que creuser encore plus la dite ornière … bientôt, vous n'y serez même plus visibles.
Pensez autrement ! Faites un pas de côté !
Nous n'avons pas (encore) la solution pour sortir du bourbier mais, ça y est, nous avons fait un pas de côté.
Ah ! Bien sûr, il n'est pas confortable, ce chemin inconnu où tout est à découvrir, à défricher... il est difficile de prévoir ce que l'on va trouver plus loin... il est facile de retomber dans l'ornière... nous veillons à ce que cela n'arrive pas et nous devons tout apprendre au fur et à mesure.
Pour sortir de ce système qui nous broie, nous avons compris qu'il ne faut plus du tout appliquer ses règles : non, nous ne voulons pas créer un énième parti politique, non, nous ne voulons pas de représentants de notre mouvement, non, nous ne nous contentons pas de la majorité pour décider de quelque chose, nous pratiquons le consensus jusqu'à obtenir l'unanimité, non, nous ne voulons pas être récupérés ni par un parti politique, même « ami », ni par un syndicat. »
En ce qui concerne les citoyens « lambda », la palette de réactions est plus large et va de :
- « C'est bien ce que vous faites, bravo ! » (Notez encore le « vous » au lieu du « nous »... ne nous dites pas bravo, il n'y a aucun héros, ici ; rejoignez-nous, c'est mieux)
- « Alors ? Que proposez-vous ? » (Encore le « vous »... nous n'avons pas à proposer quelque chose, nous ne sommes pas des politiques en campagne électorale, nous sommes des citoyens... réfléchissons, cherchons ensemble)
- « Vous devriez avoir un leader ! » (toujours le « vous » !!! Quand donc nos concitoyens cesseront d'attendre un homme providentiel ? Quand comprendront-ils que c'est à eux de prendre leur destin en mains ?)
- « Nous sommes en démocratie ! Que voulez-vous de plus ? » (Euh... non... justement... et de développer notre argumentaire : la démocratie ne se résume pas au seul droit de vote, il faut un contre-pouvoir citoyen au pouvoir politique, etc...)
Jusqu'à la pollution quasi quotidienne de fachos qui arrachent nos affiches, inscrivent des insultes, des appels à la violence, des propos racistes sur le mur de la démocratie que nous avons installé avec les moyens du bord. (nous devons « faire le ménage » à chaque fois)
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Nous sommes sur le Titanic qui coule par soubresauts successifs.
Le capitaine et l'équipage, censés faire évacuer les passagers, sont déjà dans les canots de sauvetage et s'apprêtent à abandonner le navire tout en jurant qu'ils s'occupent de tout et que tout le monde sera sauvé. Ils emmènent déjà avec eux les passagers de 1ère classe.
D'ailleurs, des gilets de sauvetage sont à la disposition de chacun et si la température de l'eau est à environ deux degrés, il faut bien comprendre qu'il faut accepter de faire des sacrifices en une telle circonstance.... et...
il faut du monde pour aider à porter les caisses de champagne, les paquets de nourriture de luxe, les coussins moelleux, les radiateurs dans les canots... certains des passagers se précipitent pour apporter tout ça, puis retournent à leur place, sur le pont du bateau... c'est normal... l'équipage, les passagers de luxe, ils font partie de l'élite, ils ont plus d'importance que la populace.... au fait..
il y a aussi besoin de quelques-uns, bien costauds pour ramer... ce n'est pas aux membres de l'équipage de le faire, ils ont déjà tant de responsabilités pesant sur leurs épaules... Pour les nourrir, nous avons tout un sac rempli de pain rassis...
immédiatement, des volontaires se bousculent...
une voix s'élève sur un des canots déjà presque plein : « En plus, il faut les nourrir ! Comme c'est ennuyeux... ce sac de pain, ça prend de la place ! Ah ! Les travailleurs, quelle plaie ! » - « Voyons, voyons » lui répond quelqu'un « N'oublions pas que la devise de la France, qui fait partie de son identité, est « liberté, égalité, fraternité », offrons-leur la possibilité de manger ce pain rassis, soyons généreux. » et, le visage transfiguré par l'immense joie d'avoir, de façon magistrale, prouvé sa bonté d'âme, il réajuste avec soin la ravissante couverture en fourrure de vison dont il est enveloppé.
Sur le pont, les passagers, pour une large moitié, ont entièrement confiance et attendent patiemment le moment où l'eau les atteindra et où ils pourront agréablement flotter sur l'eau grâce à leurs gilets de sauvetage si généreusement mis à disposition.
D'autres se lamentent ou/et protestent, sans plus, en pensant qu'ils ne s'en sortiront pas dans une eau si froide : ils vont mourir d'hypothermie avant l'arrivée des secours... et attendent le moment où l'eau les atteindra et où ils pourront lentement mourir de froid en flottant grâce à leurs gilets de sauvetage que ces « enfoirés » ont mis à leur disposition.
Une minorité cherche une solution... vite !
Sur le pont supérieur, l'orchestre joue en boucle le même air.
Le Titanic, bien sûr, c'est le système qu'on nous impose depuis des décennies.
Le capitaine et l'équipage, les passagers de 1ère classe, c'est l'oligarchie qui nous opprime.
Les passagers, hors ceux de 1ère classe, ce sont les citoyens. Ceux qui font confiance aux promesses qu'on leur a faites, sont … de droite ; ceux qui se doutent qu'ils vont mourir de froid quand le bateau aura complètement coulé sont... de gauche ; la minorité qui cherche une solution en ne comptant que sur soi-même, ce sont les indignés.
Et l'orchestre, ce sont les militants évoqués plus haut, serinant le même refrain depuis des lustres, sans aucun résultat pour faire évoluer les choses. (Titre du refrain : « Il faut une grève générale »)
Les indignés commencent à s'activer tout en exhortant les autres passagers et les membres de l'orchestre à faire de même.
« Fabriquons des radeaux avec des tables, des sommiers de lit, des bancs, des portes d'armoire et de placards ! Vite ! Cherchons des cordes pour les faire tenir ! Vite ! Il faut être prêts avant que le paquebot ne sombre définitivement ! »
Peu, très peu de passagers les suit ; l'orchestre, lui, continue à jouer son sempiternel air.
Les indignés s'écrient : « Regardez ! Voyez du côté opposé à celui où vont les canots de sauvetage : une caravelle, toutes voiles hissées ! Oui, comme une de celles sur laquelle s'est embarqué Christophe Colomb ! Celle-là, elle est baptisée « réelle démocratie »... fabriquons des radeaux pour la rejoindre et monter à bord et partons chercher une nouvelle route vers les Indes... nous découvrirons ainsi un monde nouveau. »
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Depuis le 29 mai, les indignés 57 sont sur la place St Simplice, à Metz, tous les soirs, du lundi au samedi, de 19h à 21h, par tous les temps.
Tous les dimanches, à 17 h, ils organisent un débat public.
Pour faire un travail d'information, ils affichent des articles traitant de sujets jamais abordés à la télévision.. régulièrement arrachés par les fachos... tant pis, on recommence et on recommence encore.
Le 14 juillet, certains d'entre eux ont rejoint les indignés de Paris (et ont ainsi pu goûter à la joie de respirer des gaz lacrymogènes)
Fin juillet, ils sont partis 3 jours pour soutenir ceux qui luttent à Bure contre l'enfouissement des déchets radioactifs.
Jeudi 4 aôut, ils ont participé à la « faites de l'égalité » organisée par la LDH devant le centre Pompidou en y affichant ce texte :
« La déclaration des droits de l'homme peut se résumer en UNE phrase :
« Nul être humain ne sera humilié, jamais, d'aucune façon, d'aucune manière, en aucune circonstance, aucune situation »
Or, celui qui ne mange pas à sa faim est humilié,
celui qui ne dispose pas d'un logement décent est humilié,
celui qui est méprisé, violé, torturé, puni injustement est humilié.
Pendant ce temps, les puissants qui s'octroient des privilèges vivent dans le luxe, la gabegie, le gaspillage ; ils ne craignent même pas, souvent, d'être poursuivis par la justice quand ils commettent des délits.
LE PEUPLE EST EN SOUS-FRANCE ! »
Samedi dernier, une indignée madrilène est venue leur rendre visite.
Ils rejoindront les indignés espagnols qui sont partis vers Bruxelles à pied, lors de leur passage à Paris et/ou lors de leur arrivée dans la capitale belge.
Ils ont un autre projet important pour la rentrée, en septembre....
Leur philosophie est affichée sur la face avant du « mur de la démocratie » : (réécrite, déjà, trois fois pour cause de « sabotage » des fachos)
LES INDIGNÉS :
- Ne font l'apologie d'aucun parti politique
- Rejettent toute forme de racisme
- Ne sont pas tous de gauche
- En ont assez d'être en sous-France
- Veulent un réveil citoyen
- Sont solidaires des autres peuples
- Se méfient de tous les gouvernements
- Prônent la non-violence (la non-violence, ce n'est pas la passivité, c'est ne pas céder)
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En ce moment, pour cause de vacances de certains, nous sommes peu nombreux : VENEZ !
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