Lettre ouverte à Sarkozy
Lettre ouverte à Sarkozy, elle émane d'un groupe de citoyens, tous membres du forum SARKOSTIQUE.
Monsieur Sarkozy,
Je vous écris suite à l'annonce par vos soins de la création de 7 heures par semaine de travail obligatoire pour les allocataires du RSA, et de votre discours à l'occasion de cette annonce, des extraits ayant été publiés dans le nouvel observateur, la tribune, et j'en suis sûre bien d'autres médias.
Je ne peux pas dire que votre discours est la goutte d'eau qui fait déborder le vase, il faudrait que le vase soit aussi grand que les réserves d'eau de la planète.
Votre discours qui alterne contre-vérités et mépris du peuple fait qu'aujourd'hui je m'adresse directement à vous, afin d'exprimer ce que votre politique m'inspire.
Je fais partie d'un petit groupe de citoyens, qui, comme tant d'autres, suit votre action et la politique que vous impulsez, d'abord comme ministre de l'intérieur depuis novembre 2006, puis comme président de la République en mai 2007.
Cette politique est la destruction totale et massive des acquis sociaux du Comité National de la Résistance dont vous galvaudez le nom régulièrement. C'est la redistribution des richesses vers les gens qui n'en ont pas besoin pour vivre, avec comme conséquence à terme la faillite du pays, faillite que vous feignez de ne pas voir arriver. Et je ne parle pas d'un arrêt de paiement de la dette, votre « principale préoccupation », mais bien d'un arrêt quasi total de l'économie... Parce que, Monsieur Sarkozy, ceux que vous oubliez régulièrement ou ceux dont vous n'avez cure, ce sont les citoyens à revenus modestes de ce pays. Ce sont aussi la majorité des clients des entreprises que vous glorifiez... Je vais faire simple, puisqu'il paraît qu'il faut « parler aux français avec des mots simples »
Les pauvres n'ont plus d'argent, ils ne consomment plus, les entreprises font faillite. L'argent doit circuler dans une économie, Monsieur Sarkozy, c'est ça qui crée de la croissance et des emplois.Mettez l'argent sur des comptes où il ne sert à rien, vous mettez un pays en faillite. C'est de l'économie de base, il suffit d'avoir validé sa seconde pour savoir ça. Bien sûr, les personnes qui vous conseillent et vous même se fichent comme d'une guigne des citoyens du pays et même de la faillite du pays lui même.
Je suppose que c'est parce que vous êtes persuadé que les contribuables vont payer encore et encore et encore. Mais ce n'est pas le cas. Peu importe le moment, il y aura un moment où il y aura une taxe ou une mesure de trop, et où les citoyens diront « non ». Sauf si vous n'êtes pas ré-élu et que quelqu'un d'autre propose enfin une politique décente à la France.
Revenons à ce discours contre la fraude qui personnifie toute votre politique nauséabonde. S'il y a bien un discours qui doit faire se lever en hurlant, c'est celui là. Reprenons en les points phares :
« Voler la sécurité sociale, c'est trahir la confiance de tous les français ».
Je suis d'accord avec vous, l'Etat qui ne reverse pas aux comptes de la sécurité sociale les taxes qui ont été créées pour son financement, comme celles sur le tabac et les alcools, c'est du vol. Que cette action crée en plus un « trou de la sécu » qu'on peut exploiter à loisir pour mener une politique de déremboursement des médicaments, hausse du forfait hospitalier, franchise de un euro déremboursé par consultation, et j'en passe... Faire payer à tous ceux qui consultent et donc à une majeure partie de personne à bas revenus, l'euro de hausse des consultations de médecins, qui ne sont pas vraiment une catégorie à bas revenus, c'est très fort.
« La fraude, c'est la plus terrible et la plus insidieuse des trahisons de l'esprit de 1945. C'est la fraude qui mine les fondements même de (la) République sociale »
Décidément, l'esprit de 1945, ça revient souvent. Est-ce un embryon de mauvaise conscience qui vous fait répéter sans cesse cette expression ? La plus terrible et la plus insidieuse trahison de l'esprit de 45, c'est d'utiliser cette expression alors qu'on détruit tout ce qui a fait 45.
Des exemples ? Mais à votre service.
Le durcissement de la justice des mineurs, c'est vous (ordonnance de 45).
Commencer à évaluer les enfants dès trois ans, votre idée (pas encore en place, mais ça, ce n'est pas grâce à vous).
La tentative de dépouiller le juge des enfants de sa spécificité, c'est encore vous.
Enfin, la destruction de la sécurité sociale que j'ai évoqué plus haut, obligeant les français à se soigner en fonction de leurs moyens et non plus en fonction de leurs besoins.
Parler du CNR quand on applique le programme de Denis Kessler, c'est fort de café.
« Voulons-nous d'un système de sécurité sociale qui ne serait qu'un guichet auquel chacun pourrait se servir comme bon lui semble ? »
Parfois, je me demande à quel point l'inconscient intervient dans vos discours. Bien sûr que vous ne voulez pas d'un système de sécurité sociale qui ne serait qu'un guichet auquel chacun pourrait se servir comme bon lui semble... Vous l'avez déjà !!! Mais vous, ce n'est pas juste la sécurité sociale..
Vous vous êtes auto-augmenté à partir d'un salaire qui est déjà indécent.
Vous avez dépensé 180 millions pour la rénovation non nécessaire d'un avion.
Vos trop fréquents déplacements sont ruineux pour la France tant le nombre de gardes du corps et forces de l'ordre mobilisées pour préparer votre venue est important...
Vous convoquez des conseils de ministres où les ministres voyagent en train mais font venir leurs voitures par la route !!
Vous souhaitiez placer votre fils à la tête de l'EPAD !
Bien entendu, ce ne sont là que quelques exemples. La République est votre guichet, Monsieur Sarkozy, le vôtre et celui de vos subordonnés, rien d'étonnant à ce que vous souhaitiez que ce guichet soit chasse gardée... Si je devais lister ici les dépenses inutiles de votre gouvernement, votre majorité et vous même, je n'aurai pas assez de papier...
J'ai beaucoup ri en apprenant qu'on gelait votre salaire. Comment peut-on croire une seule seconde que c'est une mesure qui va convaincre qui que ce soit ? Le salaire des fonctionnaire est gelé depuis deux ans, vous n'avez pas donné de coup de pouce au SMIC, et vous espérez montrer votre « courage » en ne touchant qu'environ 20 000 euros par mois ?
« Le mot "devoir" n'est pas un gros mot, c'est la contrepartie des droits ».
Ah ça.... Si seulement vous aviez une petite idée de ce que ça veut dire, au lieu de prendre la République pour un paillasson et un tiroir caisse... J'ai une autre citation pour vous « A grand pouvoir grandes responsabilités », mais vous ne devez pas la connaître non plus, ni en mesurer la portée. Les Français que je connais, Monsieur Sarkozy, remplissent bien plus leur devoir que vous ne remplissez le vôtre, qui est d'être au service du peuple et de gouverner le pays en « bon père de famille ». La plupart cherchent désespérément un emploi, ou bien travaillent, généralement sous payés. Quelle que soit la situation ils y mettent le maximum de leurs possibilités, de leurs efforts, jusqu'à en mourir parfois (les suicides au travail).
Vous avez tenté de faire passer une quatrième journée de carence pour les arrêts maladie.
Avez vous une seule idée de la souffrance au travail de certaines personnes et du nombre de personnes qui devraient être arrêtées et qui ne s'arrêtent pas ? Parce qu'elles ne veulent pas laisser tomber leur travail d'abord, parce qu'elles n'en ont pas les moyens ensuite ?
Notez bien, Monsieur Sarkozy :
D'abord parce qu'elles ne veulent pas laisser tomber leur travail. Parce que ces personnes ont le sens du devoir, justement.
J'aimerais également savoir ce qu'est un arrêt maladie « frauduleux ». Surtout en sachant que 80% des fraudes à l'assurance maladie sont le fait de professionnels de santé... pour bien plus d'argent que les salariés.
Parce que généralement, Monsieur Sarkozy, un salarié n'abandonne pas de gaieté de coeur 40% de son salaire juste pour le plaisir de tondre sa pelouse... Je sais, vous, 40 % de salaire en moins, ça fait toujours plus de 10 SMIC par mois. Donc pas de quoi s'inquiéter. Ca peut paraître fou vu d'en haut, mais les gueux ont besoin de l'entièreté de leur salaire pour vivre (ils ont des loyers à payer, pas d'indemnité de représentation pour la nourriture et tout un tas d'autres aléas...)
Accessoirement, cette mesure sera inefficace et encore une fois (mais y a-t-on échappé une seule fois en cette mandature !!), aura des conséquences que vous n'avez jamais envisagées ou dont vous vous gaussez éperdument. Les gens n'auront peut être plus d'arrêt courts, qui ne sont pas des arrêts de confort mais bien des arrêts nécessaires à la récupération d'un corps malmené. Par contre, quand ils craqueront, ils auront des arrêts. Longs. Beaucoup plus longs que s'ils avaient pu se reposer quand c'était nécessaire. Mais ce n'est pas grave, n'est ce pas, alea jacta est, après tout.
« Il n'y avait pas d'autre solution que de réformer la retraite » (je résume)
Mais si, Monsieur Sarkozy, il y avait d'autres solutions...
1 – Aller chercher l'argent là où il se trouve, dans les poches des personnes riches et sur les transactions financières. Avec les dents, peut être. Comme la croissance que vous n'avez pas réussi à attraper.
2 – Suivre votre pays modèle, l'Allemagne. Sur la durée de cotisation, qui est de 35 ans. Chose qu'on omet bien sûr de préciser dans les discours « En Allemagne les gens partent à 67 ans ». Vous n'avez pas juste relevé l'âge du départ en retraite à taux plein à 62 ans. Non, en allongeant la durée de cotisation, vous vous êtes consciemment assuré que la majorité des français qui commençent actuellement à travailler après 20 ans, et surtout connaissent à un moment donné le chômage, ne partiront pas à 62 ans.
D'un côté vous gémissez sur les résultats de la France en matière recherche et d'éducation (alors que proportions gardées, ils sont plutôt extraordinaires vu les moyens donnés à l'éducation et la recherche actuellement), de l'autre vous instaurez 42 ans de cotisation.
C'est incompatible. Si si, en reprenant calmement, les maths, tout simplement.
Autant dire carrément que vous souhaitez que toutes les formations s'arrêtent à bac+2 et que les élèves en difficulté scolaire n'aient aucune chance de se rattraper, s'ils ont trébuché dans leur parcours scolaire. Ca s'appelle faire face aux conséquences de ses paroles.
« Trop longtemps, il fut de bon ton dans certains milieux de nier la fraude ».
Tout à fait.
Alors que maintenant, vous la déclamez, vous reconnaissez sa présence avec emphase...tout en pointant du doigt ceux qui ne sont responsables que de 15% de la fraude sociale au maximum.
Oui, Monsieur Sarkozy, il y a deux types de fraudes.
La fraude aux allocations, toutes allocations confondues, qui est estimée entre 2 et 3 milliards d'euros. Sachant qu'une erreur de la CAF (et elle peut en faire, nul n'est infaillible) est considérée comme une fraude, on peut se poser la question de la valeur de cette estimation. Et cette fraude est à 90% récupérée par les caisses.
La fraude aux prélèvements, c'est à dire celle des patrons (ceux qui se lèvent tôt, les entrepreneurs, le dynamisme de la France, je reprends votre discours), est estimée entre 8 et 15 milliards d'euros. Quatre fois plus. Dont quel montant est "récupéré" ? J'aimerai bien le savoir...
Et que fait-on ? On diminue les moyens des inspecteurs du travail, ils risquent leur vie, se font tuer pour certains. Et...on renforce les contrôles sur les allocataires sociaux.
J'en viens enfin à la pire phrase, selon moi, de votre discours, même si elle est enrobée de bonnes paroles. La phrase que vous utilisez pour justifier (à vos yeux peut être) l'annonce de 7 heures de travail obligatoire pour les allocataires du RSA.
« On n'a pas de dignité quand on ne peut survivre qu'en tendant la main. »
Après avoir lu cette phrase, je sais que je n'ai pas d'anévrisme au cerveau parce qu'il aurait sûrement explosé au moment où je mesurais la portée de la phrase...
1 – Vous assimilez le RSA à la mendicité : C'est ignoble.
La France est un pays riche, très riche (plus de millionnaires que les autres pays d'Europe). La France peut donc largement se permettre d'aider les personnes en difficulté, quelles qu'elles soient. Quand on sait que toutes les personnes ayant droit au RSA ne le demandent pas, quand on sait qu'elles font tout pour se débrouiller par elles mêmes et que la majorité ont travaillé, dans de mauvaises conditions la plupart du temps... Quand on sait que c'est un chômage structurel de masse organisé de par les conditions de travail qui fait que les personnes se retrouvent au RSA... On n'assimile pas ça à de la mendicité. Le RSA est un droit, et les personnes au RSA continuent de payer des impôts tous les jours avec la TVA, alors ce n'est pas de la mendicité, c'est un juste retour des choses.
2 – Que savez vous exactement de la situation de « tendre la main » ?
Fils d'avocate et petit fils de chirurgien, élevé dans un hôtel particulier, vous avez toujours connu une situation aisée.
Les mots « fin de mois difficile » n'ont aucun sens pour vous. Je vais encore une fois faire simple. Votre salaire mensuel, c'est 47 RSA mensuels (RSA amputé du « forfait logement », soit ce que touchent la majorité des allocataires), ou quasiment 4 RSA annuels. Vous touchez en un mois quasiment 4 ans de RSA, et je me base sur votre salaire de 2008, et je ne prends pas en compte tous les autres avantages qui transforment votre salaire en argent de poche.
Vous avez travaillé un mois chez un fleuriste, terrible ! Il y a quoi...30 ans ? C'est sans doute l'une des seules fois où vous avez approché le monde du travail sans pince à linge sur le nez... Vous prônez la valeur travail, mais vous n'avez aucune idée de ce qu'est un travail pénible.
Ce n'est pas le travail qui pose problème, Monsieur Sarkozy. Simplement, le travail des gens inclut leurs conditions de travail. Et leurs conditions de vie, aussi. Quand on fait un travail alimentaire, qu'on a des heures de transport dans la journée, qu'en rentrant il faut s'occuper des courses, du ménage, de la vaisselle, de faire à manger, le linge, etc... Ca fatigue. Sans parler bien sûr pour beaucoup de salariés le fait d'être subordonné à une personne qui peut faire de votre vie un enfer (et/ou vous licencier, les deux possibilités n'étant pas mutuellement exclusives...)
Ne parlons pas des salaires misérables pour la plus grande partie de la population, ce qui n'incite pas à se lever le matin. Alors évidement, quand on se lève, que le petit déjeuner est prêt, que le costume est repassé, que les sanitaires fonctionnent, qu'on sait qu'on n'aura absolument rien à faire côté intendance, qu'on est transporté par chauffeur, qu'on est payé de façon indécente et qu'on fait un travail qu'on aime, là, ça change à peu près tout.
On peut bien sûr fanfaronner sur la « valeur travail » et le fait de travailler « 70 heures par semaine », ou autre. En oubliant que certains travaillent autant sinon plus, pour beaucoup moins. Mais je m'égare...
3 – Parlons de dignité maintenant.
La dignité, c'est autant le respect de soi que le respect qui nous est accordé par les autres, par leur attitude.
En fustigeant les allocataires du RSA et tous les allocataires, vous attentez à leur dignité.
En faisant de la fraude un thème de campagne et en pointant régulièrement les allocataires, en prenant des mesures uniquement dirigées contre eux, vous attentez à leur dignité.
Vous suggérez que derrière tout allocataire se cache un potentiel fraudeur... Plus que ça, vous suggérez que les fraudeurs (prenons ceux qui fraudent réellement, pas les pauvres bougres qui perçoivent indûment 200 euros et qui après l'avoir signalé, se font traiter de fraudeurs) le font uniquement dans le but de gruger l'Etat. Vous oubliez, sans doute parce que ça ne vous a jamais effleuré, que parfois nécessité fait loi, et que la majorité des gens, s'ils n'étaient pas confrontés à des situations dramatiques et des procédures administratives ubuesques, ne frauderaient pas.
Pour rendre la dignité aux allocataires, il faudrait déjà arrêter de les fustiger en permanence et leur donner l'impression qu'ils volent leur allocation même lorsqu'ils y ont droit. Ensuite, faire en sorte qu'ils puissent trouver un travail décent, là serait la réelle mesure.
Ce n'est pas rendre sa dignité à quelqu'un que de lui imposer 7 heures de travail par semaine à un salaire inférieur au SMIC (pour la valeur qu'on s'accorde, intéressant...). Ce n'est pas rendre sa dignité à quelqu'un que de lui imposer un travail qui sera probablement ennuyeux et désespérant (les emplois qui ne le sont pas sont déjà pourvus, rappelez vous, 4 millions de chômeurs, quand même...). Ce n'est pas rendre sa dignité à quelqu'un que de l'utiliser pour finalement ne pas engager ou licencier quelqu'un d'autre... Oui, 7*5=35, 5 allocataires RSA= un emploi qui ne coûte pas cher, le calcul est facile.
La seule chose que je vous accorde, c'est que vous avez utilisé le mot « survivre ». C'est bien ça. Au RSA, dont le montant mensuel ne paie même pas un de vos déjeuners, on survit. A peine. On se désocialise. On s'en sort rarement. Et vu la gestion du pays, le nombre d'allocataires ne risque pas de baisser.
En conclusion, Monsieur Sarkozy, cessez de croire que votre discours a un sens, à part pour ceux qui n'ont jamais connu la difficulté, ceux qui ont toujours eu un salaire élevé, ceux qui comme vous n'ont pas la plus petite idée de ce que veut dire « difficulté financière » ou « impossibilité de retrouver un emploi ».
Ou alors, faites quelque chose de réellement « courageux » cette fois. Relevez un défi.
Sur un an tentez de vivre avec le RSA pour seul revenu et aucun des avantages auxquels vous êtes accoutumé.
Sarkostiquement Vôtre,
Val, raja, timbur, Lady Marwina, reveillonsnous, sarkome, cervesia, rébus, sarkonique.
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