Qui s’intéresse aux modalités du débat public ?
Quand de grands débats comme le débat public nanotechnologies arrivent sur le devant de l’actualité, les polémiques sur la manière dont ils sont organisés vont bon train. Mais quand une proposition de loi visant à « l’organisation du débat public sur les problèmes éthiques et les questions de société » s´invite à l’ordre du jour de l’Assemblée, ça ne semble plus intéresser personne, ou presque. C’est l´association Sciences & Démocratie qui a donné l’alerte et ouvert un débat sur le débat.
- Le champ d’application n’est pas assez large. Certains députés souhaiteraient l’étendre à d’autres questions sociales et sociétales que celles « soulevées par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé » : OGM, déchets radioactifs…
- La forme imposée – états généraux incluant des conférences de citoyens – est trop restrictive. Il y a d’autres manières d’associer le public aux décisions.
- Les conférences de citoyens ne font pas de place aux corps intermédiaires, aux associations, ni à l’Etat. Elles soulèvent d’autre part un certain nombre de questions : comment assurer la représentativité des citoyens et la légitimité du panel ? Comment donner une formation neutre de qualité aux citoyens en quelques jours ?
- L’initiative d’organiser des débats devrait être laissée au Parlement. La CCNE ne présente pas de garantie de neutralité suffisante pour organiser des débats, puisqu’elle doit rendre elle-même des avis. Et comment va-t-on articuler le CCNE et la CNDP (Commission nationale de débat public) ?
- Il ne faut pas tomber dans une « parodie de démocratie » avec des « citoyens alibi ». Les Etats généraux de 2009 ont été un débat d’experts « dirigeant les débats d’en haut », sans « véritable délibération collective ».
- Elle remet en question le fait que le débat public ne soit envisagé que pour préparer l’examen de projets de loi déjà bien ficelés qui n’autoriseraient plus que des ajustements à la marge.
- Elle met en lumière le fait que cette proposition de loi ne serait là que pour rendre acceptable la suppression prévue de l’obligation de réviser la loi de bioéthique tous les 5 ans et critique le caractère facultatif du débat public.
- Elle regrette que le législateur, en donnant tout pouvoir d’initiative au CCNE (Comité consultatif national d´éthique), n’ait pas laissé de place à l’initiative citoyenne.
- Enfin, sur les modalités du débat, elle ne se satisfait pas du texte qui « en dit trop ou trop peu (…). Ces démarches participatives peuvent présenter des biais de procédures qui en compromettent la régularité. Par exemple, il est possible d´orienter les conclusions des panélistes d´une conférence de citoyens via le choix des formateurs qui leur sont attribués et des personnes qu´elles peuvent consulter. Lors des Etats généraux de la bioéthique 2009, les organisateurs ont fait le choix de ne pas exposer les panélistes aux arguments des militants associatifs, pour éviter que les sentiments qu´ils n´auraient pas manqué d´éprouver lors de ces échanges ne brouillent leur jugement. Ce choix est tout à fait discutable ».
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