Supplique à Laurence Ferrari, David Pujadas, Alain Duhamel, Guy Lagache et autres futurs intervieweurs du Président
Cet article n’a pas pour objet de commenter la nature des propos échangés lors de la soirée télévisée du jeudi 5 février, au cours de laquelle, suite à la mégamanif du 29 janvier, le Président Sarkozy avait invité certains journalistes à l’interviewer sur les suites à donner au mécontentement d’une (grande) partie des Français dans un contexte de crise financière et économique mondiale.
Mais de s’interroger sur le fonctionnement de la communication dans un pays démocratique.
Phase 1 : Les services de communications de l’Elysée font savoir que suite aux importantes manifestations du 29 janvier, le Président désire s’adresser aux Français sous forme d’un entretien questions-réponses et invite dans ce but les directions de TF 1, France 2 , M6 et RTL à designer les journalistes devant y participer.
Commentaires : pas grand-chose à dire, sinon que, pourquoi pas un journaliste de France Inter, par exemple, ainsi que le commentait Nicolas Demorand le 3 février sur cette radio, pourquoi Arlette Chabot à la trappe ? Etc…
Pour TF1, on peut penser que les relations qu’entretiennent le Président avec celui de TF1 ont sans doute joué un rôle sans ce choix : le (ou la) journaliste choisi(e) ne créera pas trop de misères avec des questions qui fâchent !
Pour France 2, l’affaire est claire est nette : là en fait, le journaliste interroge son propre patron : rien à craindre de ce côté !
Pour RTL, on ne peux m’empêcher de penser qu’un petit doigt a susurré le nom du journaliste désiré dans l’oreille du directeur des programmes, n’en déplaise à Michel Apathie… Quant à Alain Duhamel, il est trop malin pour risquer de ne plus être invité aux prochains rendez-vous médiatiques !
Pour M6, le même groupe de presse Bertelsmann que RTL, pas de conflit d’intérêt à craindre de ce côté, d’autant que pour Guy Lagache, plutôt bon, d’un certain point de vue, c’est le baptême des sunlights de l’Elysée.
Phase 2 : les journalistes sont désignés par leurs directions et leurs noms sont rendus public probablement après acceptation élyséenne.
Commentaire : là encore, pas grand-chose, sinon que tous, Elysée, directions des chaînes et journalistes semblent satisfaits
Phase 3 : Les journalistes peaufinent leurs interventions et s’arrangent la cravate pour connaître l’ordre des interventions et la répartition des sujets abordés. C’est du moins ainsi, sans autre information sur le sujet, que la chose a été ressentie.
Commentaire : C’est là que ça ne va plus ! Car, ou bien les journalistes poseront les questions qui fâchent, et le Président ne sera pas content, et ce président là, quand il n’est pas content, devient méchant, et alors l’affaire risque de déraper, les directions des chaîne de se faire engueuler par le Président, les journalistes de se faire foutre au placard voire à la lourde, etc…
Ou bien on est gentil, titillant gentiment le Président, mais surtout le laisser parler sans l’interrompre, au risque de paraître un peu servile, lui servant les questions qui épargnent sa sensiblité. Tout l’art du journaliste consistant justement à se cantonner dans le politiquement correct sans paraître trop flagorneur aux yeux des téléspectateurs. Y ont-il réellement réussi ?
Mais là où nous ne sommes pas contents, c’est qu’on aurait bien voulu qu’un des quatre ose la question suivante : « Monsieur le président, vu le bourbier (on ne dit pas merdier quand on s’adresse au Président à la télé) vu le bourbier, donc, dans lequel le pays se trouvait déjà avant la révélation de la « crise » mais qui s’est aggravé encore depuis, pourquoi ne trouvez vous pas opportun à tout le moins de différer le bouclier fiscal qui obère nos finances publiques et reduit nos marges de manœuvres et nos moyens de relance ?
A l’évidence, nous étions nombreux en attente de cette question !
Mais pourquoi les journalistes ne l’ont-ils pas posée ? Trouille ? Respect d’une interdiction ? Auto-censure ?
Car enfin, c’était très simple : si au lieu de se pavaner du soi-disant honneur qu’on leur faisait d’interroger le Président, ils s’étaient tournés vers leurs auditeurs-téléspectateurs, au travers de leurs blogs, par exemple, pour demander : « quelles questions désirez-vous que je pose au Président ? »
Il n’y aurait eu aucun problème à déclarer lors de la séance des questions : « Monsieur le Président, voici les questions que les auditeurs ou téléspectateurs de ma station m’ont demandés de vous poser » !
Voici donc la supplique :
Mesdames et Messieurs les journalistes, pour la prochaine fois, s’il vous plaît, demandez préalablement au peuple les questions que le peuple voudraient vous voir poser au Président.
Un petit exercice de démocratie ne peut faire que du bien, histoire de rappeler à notre Président qu’il a bien été élu… par le peuple.
Bien à vous
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