Travailler plus et plus longtemps... pour mourir plus jeune ?
Encore une aberration économique et sociale prise dans la précipitation.
Au nom de la « liberté » de travailler plus longtemps, le gouvernement croit judicieux d’autoriser le travail jusqu’à 70 ans, sans se préoccuper du contexte économique ni même de la santé des travailleurs.
Comme si le travail était le but suprême de la vie, alors même que les aspirations des hommes sont à l’opposée de cette conception. Que le travail soit une chose nécessaire est un fait, mais il ne fait aucun doute qu’il ne constitue pour la plupart qu’une contrainte dont on s’accommode pour la survie, et que l’on supporte en espérant s’en libérer le plus vite possible.
Pour certains, bien sûr, le travail est le sens de leur vie et se définirait plus comme l’accomplissement d’une passion que comme un travail, et on comprend bien qu’ils souhaitent le prolonger le plus longtemps possible. Mais, pour ceux dont le travail est pénible ou inintéressant, on imagine bien que l’idée de travailler plus longtemps sonne plus comme une punition que comme une volonté. Et ces personnes sont nombreuses.
Mais face à la conjoncture économique actuelle, cette « liberté » offerte va vite se transformer en obligation. Au-delà de la difficulté matérielle de faire fonctionner cette mesure (on a déjà du mal à faire employer les plus de 55 ans), il est évident que le gouvernement n’a pas réfléchi aux conséquences de celle-ci.
Ou alors…
Prenons un étudiant : sorti du bac vers 18 ans, il se trouve dans le meilleur des cas avoir terminé ses études vers 22 ans, pour un bac+3, ce qui signifie en termes de salaire un léger mieux que le salaire minimum, sans compter les périodes de stages (gratuits ou sous-payés) qui peuvent parfois durer plusieurs années. Pour ceux qui prolongent leurs études, il n’est pas rare de les voir signer leur premier CDI à l’âge de 30 ans. S’ajoutent quarante années de cotisations, pour ceux qui bénéficient de ce système. Travailler jusqu’à 70 ans ne sera qu’une conséquence de cette arrivée tardive sur le marché de l’emploi.
Pour ceux qui n’ont pas fait ce genre d’études, ils entrent plus tôt sur le marché du travail, mais leur salaire est souvent moins conséquent et leur travail physiquement plus éprouvant. A 60 ans, ils sont physiquement diminués et leurs retraites ne sont pas lourdes. La décision de travailler plus longtemps ne sera pour eux sans doute pas dictée par le désir, mais plutôt par la nécessité, celle de survivre plus longtemps de manière décente.
D’autant qu’à 70 ans et au vu des nombreux éléments précisant les dangers pesant sur la santé, il se peut que dans quelques années la différence entre le début de la retraite et celui de la sénilité se raccourcisse dangereusement.
En y ajoutant la hausse des dépenses de santé et la baisse des remboursements octroyés par l’Etat, il se pourrait bien qu’à terme l’allongement de la durée du travail ne fasse que raccourcir la durée de vie ou, au moins, de vie « valide ». En quelque sorte, on finira par contraindre les gens à travailler plus longtemps pour toucher une retraite qu’ils dépenseront en soins pour réparer les maux créés par leur travail.
De cette manière, le gouvernement cherche sans doute à se remplir les poches de cotisations qu’il ne redistribuera pas ou moins longtemps ?
Ou cherche-t-il à démoraliser un peu plus un peuple qui se sent souvent esclave de son travail ?
Car enfin à quoi cela sert-il de continuer à cotiser ?
Le travail au noir ne deviendrait-il pas plus rentable à partir du moment où les avantages du travail légal deviennent négligeables ?
Est-ce là tout le bonheur que nous promettent nos dirigeants, travailler toute sa vie, pour arrêter lorsque nous sommes juste bons à envoyer en maison de retraite ?
A quoi cela peut-il bien servir de travailler pour une vie dont le but ultime est de conserver les capacités de vivre pour travailler ?
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