Wanted : avis de recherche
L’incident du Salon de l’agriculture aura eu au moins trois fonctions :
- faire une star d’un jour (notre photo),
- défaire un peu plus une star qui n’avait pourtant pas besoin de ça pour chuter dans les sondages d’opinion,
- masquer, une fois de plus, les faits importants de l’actualité, comme, par exemple, l’adoption du projet de loi sur la rétention de sûreté, la hausse de 30 % en moyenne des prix dans la grande distribution, pour ne citer qu’eux.
Préambule
Cet article ne fait qu’exprimer un point de vue personnel, n’a aucune intention polémique et n’engage en rien l’auteur que je cite. Afin d’éviter les commentaires assassins qui semblent être le lot de certains sur AV et qui nuisent, plus qu’ils ne servent, le libre échange des idées, j’essaierai de m’en tenir aux faits vérifiables et vérifiés. Je vous invite à constater à quel point le simple énoncé de ces faits peut suffire à illustrer le propos.
Ah ! Qu’il était bon le temps où on ne savait rien, le temps ou l’ouvrier oeuvrait courageusement dans son usine, remerciant son patron de lui permettre de nourrir sa famille, le temps où on respectait la classe dirigeante, investie qu’elle était (aïe : usage de l’imparfait supposant que ce n’est plus le cas, je m’égare. Mettons cet imparfait sur le compte du style narratif) dans l’avenir du peuple qui l’avait choisie. Le temps où les pigeons voyageurs ne s’appelaient pas ADSL, fibre optique ou satellite.
En ce temps-là, on ne savait rien, mais on était heureux. Le Front populaire était porteur d’espoir et fédérait les masses laborieuses.
Personne ne se serait permis de tutoyer un président de la République et, par voie de conséquence, nul président n’aurait songé à insulter un de ses administrés. Encore moins en public. Et quand bien même, la lenteur relative des pigeons voyageurs aurait rendu impossible la diffusion d’un tel événement.
Ces temps-là sont révolus.
Aujourd’hui, on sait tout. On sur-sait et on commente. Manifestation démocratique somme toute. Prendre la parole sur la place publique est même un des fondements de la ré-publique (Res Publica : la chose publique).
Alors où est le problème ?
Je vous invite, plutôt que de le paraphraser maladroitement, à lire l’article de Daniel Salles (formateur Clemi), intitulé « Information, surinformation, désinformation », qui dresse un état des lieux de la presse, au sens large (presse écrite, radio, TV, web).
Extrait
« En 2003, plusieurs anniversaires symboliques ont été célébrés dans le monde des médias français : les 120 ans de La Croix, seul journal survivant du XIXe siècle avec Le Figaro, les 50 ans de L’Express, news magazine à la française, les 30 ans de Libération, seul quotidien national encore vivant né après la refonte de la presse française en 1945, les 50 ans de la retransmission télévisée en direct du couronnement de la reine Élisabeth II... Après les redistributions qui ont marqué la seconde moitié du XIXe siècle, et avec le développement récent des nouvelles technologies, les médias d’information connaissent aujourd’hui, en France comme dans la plupart des pays industrialisés, des bouleversements qui touchent à leur forme, à leur contenu, à leur fonction, à leur nature même.
[...]Quant à la communication interactive, on peut penser, avec Dominique Wolton, qu’elle n’améliore pas la communication, mais accentue son emprise sur les consciences en ne permettant pas d’échapper à la tyrannie de l’instant. »
Emprise sur les consciences, tyrannie de l’instant. Voilà sans doute la recette miracle qui va permettre de noyer, dans son flux quasi-instantané et surabondant, les informations importantes, capitales, régissant l’avenir de notre société.
Le président Sarkozy lui-même, plaisantait devant PPDA lors de sa récente intervention sur TF1 (et devant tous les téléspectateurs - littéralement : spectateur à distance). Je cite de mémoire :
« Des vacances en Egypte, visite des pyramides... Que d’originalité (sourire). Le fils de Carla sur mes épaules... Scène familiale encore plus originale... »
Force nous est de constater que le sourire même du président nous incite à méditer sur l’importance donnée à ces événements... qui occupent pourtant le devant de la scène. Ce sont les faits.
J’ai pleinement conscience, en écrivant ces lignes, de ne pas échapper à cette manie moderne rendue possible par internet, de participer à cette surabondance de « l’information » ou, au moins, au "commentarisme" effréné de cette dernière. Nous ne sommes ni journaliste ni expert et ne saurions faire autre chose que partager des opinions ou, dans le meilleur des cas, rapporter des faits.
Et sans doute cette nouvelle manie, bien que trouvant sa légitimité dans l’élan démocratique de la liberté d’expression, nuit-elle à la lecture objective de l’actualité.
Mais n’est-ce pas finalement, de cette manière, que nous autorisons, contre notre volonté - en nous attardant sur des héros d’un jour du Salon de l’agriculture, du mariage express de notre président, de l’usage abusif ? (re-aïe, mon objectivité promise !) du devoir de mémoire dans nos écoles, de l’effondrement de notre pouvoir d’achat, du durcissement lent mais sensible de l’appareil légal (en clair, si les juges et les experts tombent d’accord, il est aujourd’hui possible, en France, de maintenir en captivité un détenu... Indéfiniment, de la ratification déguisée du traité de la Constitution européenne contre la volonté du peuple français - la perte d’influence qui est la nôtre sur les décisions gouvernementales ?
Sommes-nous devenus les instruments, naïfs et involontaires, de notre propre désinformation et, finalement, de notre impuissance ?
A qui profite le « crime » ? (La police anglo-saxonne a une formule encore plus claire : « follow the money » : Suivez l’argent).
Je ne fais que poser une question et laisse à chacun le soin d’y apporter une réponse.
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