Après Alstom, EDF, Suez… : le président resté banquier d’affaires
La condition d’origine ne doit pas préjuger une personne. Beaucoup parviennent à s’en extraire quand ils évoluent, tel le Général de Gaulle qui faisait bien la différence entre le rôle d’un militaire et celui d’un politique. Malheureusement, avec EDF et Suez, Macron démontre une propension toujours plus inquiétante aux montages dignes d’un banquier d’affaire, au mépris de l’intérêt des Français.
Bureaucrate fou au service du capitalisme actionnarial
Tout le monde se souvient de la vente du pôle énergie d’Alstom à General Electric, nouvelle étape dans le démantèlement de l’ancien Alcatel-Alstom. Macron, devenu ministre à l’été 2014, avait conclu en novembre la vente de cet actif industriel majeur du pays au géant étasunien. Un montage extraordinairement complexe avait été conçu, avec des filiales distinctes, où la France gardait une part pour tenter de calmer les critiques. Dans les faits, comme toujours, Alstom a été dépecé et les emplois détruits… Pire, Marianne avait décrit la belle vie de ses fossoyeurs et pointé qu’un ancien conseiller de Macron à Bercy avait étonnamment fini par prendre la présidence de GE en France ! Et il faut rappeler qu’un ancien dirigeant d’Alstom, Frédéric Pierucci a dénoncé dans « Le piège américain » les pressions venues d’outre-Atlantique pour obtenir la vente de cet actif stratégique à GE, avec l’aide de l’appareil d’État…
Avec un tel passif, comment ne pas être très préoccupé à l’égard des grandes manœuvres actuelles autour de deux autres grandes entreprises. Il y a d’abord le projet de rachat de Suez par Véolia. Parce que ce sont deux leaders des services, cela imposerait non seulement une fusion, mais une découpe, puis revente d’une partie des actifs, notamment Français. Un extraordinaire mécano, qui engendrerait des coûts phénoménaux en avocats, financiers et conseil, tout en générant le cortège habituel de restructurations et suppressions de poste, ne serait-ce que pour financer tous ces coûts et les synergies promises aux marchés pour justifier cette opération. Marianne pointait il y a deux mois le soutien de l’Elysée et Bercy à cette opération, soutien qui pose problème quand on sait que le patron de Véolia est un soutien non dissimulé du président, faisant dire à l’hebdomadaire qu’il y avait une nouvelle affaire Alstom.
Mais le plus gros morceau est probablement la poursuite du démantèlement d’EDF, actuellement négocié entre Paris et Bruxelles, un sujet qui justifie à lui seul de sortir de l’UE. Après un premier charcutage qui a extrait RTE et Enedis de l’entreprise, et mis en place une effarante concurrence administrée sans le moindre intérêt pour les citoyens, les prix ayant monté, arrive le projet Hercule. C’est un nouveau charcutage visant à couper en trois EDF, une entité nucléaire, une entité hydroélectrique, ouverte à la concurrence, et une entité pour les énergies renouvelables, dont 30% serait vendue en bourse. Tout dans ce projet est effarant. Passons sur l’extraordinaire complexité du shéma, alors qu’il y a vingt ans, EDF assurait seul un bon service à notre pays… Pire, la production d’électricité impose une coordination, avec le stockage d’excès de production par les barrages, que la découpe d’EDF compliquerait…
Le soutien de l’Elysée à une telle opération, que rien ne justifie, si ce n’est les chiffons de papiers européens que nos dirigeants ont pu signer, est très révélateur du mode de pensée de Macron. Il n’agit pas comme un président qui défend nos intérêts, le service public ou notre indépendance. Il semble agir comme le banquier d’affaire qu’il était, soutenant des opérations extraordinairement complexes, comme la découpe d’une très grande entreprise, qui va générer des centaines de millions de frais de restructurations, financiers, juridiques, organisationnels, comme pour Alstom. Pourtant, la complexité des organisations ainsi dessinées est totalement injustifiée et contreproductive. Il est bien évident que l’éparpillement des responsabilités et des modèles d’affaires ne sert pas le bien commun, mais ne servira que les intermédiaires, et le nombre considérablement accru des dirigeants de ces nouvelles entités…
Heureusement, une large mobilisation se fait jour pour s’opposer au projet Hercule, malheureusement un peu occultée par l’actualité sanitaire. Quand Martine Orange, de Médiapart, s’unit à Julien Aubert, qui mène une trentaine de parlementaires dans Valeurs Actuelles, ou Marianne, pour s’opposer au projet Hercule, on peut raisonnablement penser que ce projet est une folie douce qui révèle une fois de plus la folie de ce projet européen qui fait du charcutage de notre service public de l’énergie un de ses objectifs ! Mais la macronie est malheureusement assez étanche à toutes les considérations que les opposants mettent en avant. Il faudra une mobilisation très forte pour mettre en pièce Hercule. L’approche de la présidentielle est une opportunité, si Macron sent que l’opinion y est fortement opposée. Il sera donc crucial d’en parler le plus possible et relayer les actions contre ce funeste projet.
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