Bitcoin : faut-il y investir une petite partie de son capital ? (par Wences Casares)
Cet article est une traduction autorisée de l'essai de Wences Casares "the case for a small allocation to Bitcoin" publié le 1er mars 2019 sur https://www.kanaandkatana.com/valuation-depot-contents/2019/4/11/the-case-for-a-small-allocation-to-bitcoin
Entrepreneur à succès, Wences Casares siège au conseil d'administration de Paypal et a fondé Xapo, une société de conservation sécurisée de bitcoins.
Cet article ne constitue pas une recommandation d'investissement en Bitcoin. Wences informe le lecteur sur le fonctionnement du Bitcoin, son histoire et fait différentes hypothèses pour son avenir. Enfin, il explique son approche d'investissement, que le lecteur est libre de suivre ou pas !
N'étant pas un traducteur professionnel, j'ai fait au mieux, en ajoutant certains commentaires en italique.
Résumé
Le Bitcoin est une expérience fascinante mais ce n’est encore que cela : une expérience.
A ce titre, le Bitcoin peut encore échouer et devenir sans valeur. Mon opinion (subjective) est que le Bitcoin a, au minimum, 20% de chances d’échouer.
Mais, après dix ans d’un fonctionnement sans interruption, avec plus de 60 millions d’utilisateurs faisant circuler un milliard de dollars sur le réseau par jour, et l’arrivée, chaque mois, d’un million de nouveaux investisseurs, le Bitcoin a une bonne chance de réussir.
Mon opinion (subjective) est que les chances de réussite sont d’au moins 50%. Si Bitcoin réussit, un Bitcoin peut valoir plus d’un million de dollars d’ici 7 à 10 ans. Cela représente 250 fois plus que sa valeur actuelle (4’000 dollars au jour de cet article).
Je suggère qu’un portefeuille de dix millions de dollars doit investir au plus 100'000 dollars en Bitcoin (pas plus de 1% à cause du risque important de perte). Si le Bitcoin échoue, ce portefeuille perdra $100'000 ou 1% d’ici 3 à 5 ans, ce qui reste supportable pour la plupart des investisseurs. Si le Bitcoin réussit, ces 100'000 dollars peuvent en valoir plus de 25 millions, soit plus du double de la valeur du portefeuille initial.
Dans le monde actuel où la valeur de chaque actif est estimée à la perfection, il est difficile de trouver un actif aussi mal évalué et avec un potentiel de résultat aussi asymétrique. Le Bitcoin représente une opportunité de transformer un investissement peu important en un résultat très significatif.
Il serait irresponsable d’avoir une exposition au Bitcoin que l’on ne puisse se permettre de perdre, parce que le risque de perte totale existe vraiment. Mais il serait tout aussi irresponsable de ne pas avoir d’exposition du tout.
Qu’il y a-t-il de si intéressant à propos de la Blockchain Bitcoin ?
Dans cet essai, j’utilise la terminologie « Blockchain Bitcoin » lorsque que je fais référence à la plateforme Bitcoin tout entier, incluant la monnaie Bitcoin. De nombreux systèmes différents pour des usages divers peuvent un jour fonctionner sur la Blockchain Bitcoin.
Lorsque j’utilise le mot « Bitcoin », je fais référence à la monnaie, qui peut être achetée, vendue, envoyée, reçue, conservée, etc. Vous pouvez considérer la monnaie Bitcoin comme étant le premier système à fonctionner sur la Blockchain Bitcoin.
L’état actuel de la Blockchain Bitcoin est similaire à celui d’Internet en 1992. A l’époque, Internet était naissant et expérimental. Comme au début d’Internet, on entend de nombreuses affirmations péremptoires disant que la Blockchain Bitcoin va révolutionner le monde et résoudre quantité de problèmes. Souvent, ces affirmations sont exagérées ou fausses.
Même si la plupart d’entre nous a l’impression de ne pas comprendre la Blockchain Bitcoin, nous y arriverons tous un jour. Si l’on pense que disposer d’une plateforme souveraine n’offre aucune valeur, on peut être en droit d’estimer que la consommation en électricité de la Blockchain Bitcoin n’est qu’un immense gaspillage.
Les mineurs de Bitcoin sécurisent la Blockchain Bitcoin parce qu’ils sont payés en Bitcoin pour le faire. La Blockchain Bitcoin est sécurisée à un haut degré grâce aux bitcoins que les mineurs gagnent. Si vous enlevez les bitcoins, la majorité des mineurs cesseraient le minage et, en conséquence, la Blockchain Bitcoin serait peu robuste et peu souveraine.
Dans les milieux d’affaires, surtout dans les institutions financières, il est à la mode de dire « Je suis intéressé par la blockchain mais pas par le Bitcoin », ce qui revient à dire « je suis intéressé par le web mais pas par Internet. »
La seule innovation de la blockchain est sa souveraineté. La seule blockchain souveraine jusqu’à présent est la Blockchain Bitcoin, et le carburant qui permet de maintenir sa souveraineté est la monnaie Bitcoin. C’est l’histoire de la poule et de l’oeuf.
Si une organisation voulait aujourd’hui retirer sa souveraineté à la Blockchain Bitcoin, elle aurait non seulement besoin de moyens financiers extraordinaires, mais encore d’une capacité à fabriquer en grande quantité du matériel spécialisé de minage . Elle aurait également besoin d’avoir accès à de l’énergie équivalente à celle du plus grand barrage hydraulique américain pendant une longue durée.
Cela serait une entreprise difficile mais pas impossible. Chaque jour qui passe rend plus difficile de porter atteinte à la souveraineté de la Blockchain Bitcoin. Cette souveraineté a été attaquée par le passé mais elle est toujours demeurée intacte (en fait, une de ces attaques m’a placé dans le mauvais camp, ce qui m’a valu d’apprendre de nombreuses leçons dans la douleur, mais c’est une autre histoire…NDR lorsqu’il découvrit le Bitcoin, Wences Casares aurait engagé un groupe de hackers pour tenter de pirater sa blockchain, sans succès). Nous pouvons nous attendre à voir la souveraineté de la Blockchain Bitcoin attaquée par davantage de mauvais acteurs, mieux outillés, mettant des ressources en commun, voire même par des Etats-Nations. Seul le temps permettra de dire si le Bitcoin est réellement souverain.
En quoi une plateforme souveraine offre t-elle de valeur ?
Il est beaucoup plus aisé de dire en quoi la Blockchain Bitcoin n’offre pas de valeur.
Pour en offrir, une blockchain doit être l’arbitre ultime de la vérité. Rien ne doit pouvoir la contester ou la modifier.
Pour tous les cas où l’information d’une blockchain serait contestable ou modifiable par un gouvernement, par un registre officiel, par une cour de justice, par la police, par l’autorité des marchés financiers ou une quelconque autorité, il est inutile d’utiliser une blockchain.
Les affirmations selon lesquelles la blockchain peut résoudre la sauvegarde de titres de propriété, le règlement de transactions, la gestion de chaînes d’approvisionnement, l’authenticité d’œuvres d’art, sont souvent déplacées. Il est vrai que les systèmes que nous utilisons aujourd’hui pour ces cas-là sont anciens, passés et inefficaces. Et il est vrai que pour tous ces cas-là, il existe une quantité d’acteurs utilisant des systèmes aux formats différents et des protocoles-maison. Mais toutes ces problématiques seraient résolues si les acteurs s’entendaient pour utiliser de meilleures solutions technologiques, ouvertes à tous.
Très souvent, le mot « Blockchain » est agité frénétiquement par des consultants voulant inciter leurs clients commerciaux à investir dans de nouveaux projets technologiques, ou par des cadres ne comprenant pas la « Blockchain » mais comprenant qu’ils peuvent obtenir un budget de leur entreprise en disant que leur projet aura recours à la « Blockchain », ou par des entrepreneurs pensant qu’il leur sera plus facile d’obtenir un financement ou une couverture médiatique s’ils ajoutent « Blockchain » à leur champ d’activité.
Donc, en quoi une plateforme souveraine offre-t-elle de la valeur ?
Par exemple, un système d’identification peut bénéficier d’une plateforme souveraine. Nous ne devrions pas laisser toutes nos données personnelles (nom, numéro de sécurité sociale, date de naissance, noms de nos parents, conjoints et enfants, adresse, informations de passeport ou de paiement, etc.) sur notre téléphone, car il peut facilement être piraté. Nous ne voulons sûrement pas donner non plus toutes ces informations à Google, Facebook ou à notre gouvernement.
Une plateforme souveraine que personne ne peut corrompre ou contrôler, et qui garderait nos données personnelles en sécurité et qui nous demanderait notre autorisation dès lors qu’un tiers souhaite y accéder, ferait sens.
Avec cet exemple, essayons seulement d’être créatif et de dessiner une utilisation possible. Je suis certain que nous serons épatés par des entrepreneurs inventifs et révolutionnaires qui proposeront des solutions que nous ne pouvons pas encore imaginer, en tirant profit d’une plateforme souveraine.
Mais il existe une utilisation sensée, et qui en fait fonctionne déjà plutôt bien. C’est celle qui recourt à une plateforme souveraine pour le fonctionnement d’un système global de règlements et de transfert de valeur. C’est celle que le Bitcoin, la monnaie, peut devenir, de façon similaire à ce qu’a été l’or pendant 2000 ans, et à ce qu’est le dollar depuis 70 ans.
Bitcoin a un potentiel supérieur à l’or et au dollar en tant que réserve de valeur globale et apolitique, car il n’y aura jamais plus de 21 millions de bitcoins and parce que le Bitcoin repose sur un système ouvert et résistant à la censure. Il n’y aura que 21 millions d’unités parce que Bitcoin fonctionne sur une plateforme souveraine, et que nul ne peut modifier ou augmenter cette quantité.
En outre, le Bitcoin est résistant à la censure car il repose sur une plateforme souveraine où nul ne peut modifier une transaction déjà enregistrée sur le réseau, et où nul ne peut empêcher au réseau d’accepter de nouvelles transactions.
Cela permet une liberté économique sans précédent, de la même façon qu’Internet a permis une liberté d’information sans précédent.
L’or a l’avantage d’être tangible et nombreux sont ceux qui préfèrent quelque chose qu’ils peuvent palper (surtout parmi les seniors, qui ont généralement de plus grands moyens financiers). L’or a aussi comme atout d’être utilisé depuis plus de 2000 ans, et il sera sûrement impossible au Bitcoin de rivaliser sur ce point.
Le dollar a l’avantage d’être facilement accepté et compris dans le monde entier et de bénéficier d’un effet de réseau remarquable. Ses qualités sont telles qu’il pourrait être difficile au Bitcoin de les dépasser. A moins que la collectivité ne vienne à apprécier les avantages d’une monnaie numérique à quantité limitée et résistante à la censure. Seul le temps le dira.
Le Bitcoin n’est pas un actif. Il ne produit ni revenu, ni dividende et ne génère aucun intérêt. Il n’a pas de valeur intrinsèque. Le Bitcoin est tout simplement de l’argent, et les principales formes de « bon argent » n’ont aucune valeur intrinsèque. L’or, le dollar et les autres monnaies étatiques n’ont aucune valeur intrinsèque, mais parce qu’ils représentent une valeur monétaire depuis longtemps, la plupart des gens leur attribuent une valeur intrinsèque, ce qui est un grand avantage. Le principal obstacle à franchir pour que le Bitcoin réussisse est de développer à grande échelle une perception sociale de valeur ; y arriver est un objectif ambitieux.
A quoi ressemblerait un monde dans lequel le Bitcoin aurait réussi ?
Si le Bitcoin réussit, il ne devrait, selon toute vraisemblance, remplacer aucune monnaie nationale. Il pourrait être une monnaie supranationale placée au-dessus des monnaies nationales. Si le Bitcoin réussit, il pourrait être un étalon global et apolitique de valeur et de règlement.
Le monde dispose déjà d’un étalon international et apolitique de mesure avec le mètre, ainsi qu’un standard de poids avec le kilo. Pourriez-vous imaginer un monde dans lequel la longueur d’un mètre ou le poids d’un kilo changeraient régulièrement selon des circonstances politiques ? Pourtant, c’est ce que nous faisons avec notre étalon de valeur.
Aujourd’hui, nous utilisons le dollar en tant qu’étalon global de valeur, ce qui est mieux que rien mais reste imparfait. Le dollar a perdu beaucoup de sa valeur depuis sa création, il est difficile de savoir combien en seront créés dans le futur, et la possibilité ou l’impossibilité d’y avoir recours dépend de plus en plus de considérations politiques. Le monde gagnerait à disposer d’un étalon international et apolitique de valeur.
Cela vaut également pour un étalon global et apolitique de règlement. Les banques sont les seules à pouvoir participer aux principaux systèmes de règlement (comme SWIFT, Fedwire, ACH aux USA, CHAPS en Grande-Bretagne, SEPA en Europe, Visa et Mastercard, etc.). Les individus, les entreprises et les gouvernements ont seulement accès à ces réseaux de règlement via les banques.
Utiliser ces réseaux prend du temps (parfois plusieurs jours), le processus est opaque et coûteux, et y avoir accès dépend de plus en plus de considérations politiques. Imaginez une plateforme ouverte où chaque individu, entreprise ou gouvernement pourrait régler une transaction avec contrepartie n’importe où dans le monde en temps réel, gratuitement, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, 365 jours par an. Cela ferait pour l’argent la même chose qu’Internet a fait pour l’information.
Dans un monde Bitcoin, toutes les monnaies seraient cotées en satoshis (la plus petite fraction d’un Bitcoin). Lorsque votre petite-fille demandera le cours du dollar néo-zélandais, on pourrait lui donner une réponse en satoshis : aujourd’hui, le dollar néo-zélandais vaut 72 satoshis. Et le prix de la livre turque ? 21 satoshis. Le dollar américain ? 107. Un baril de pétrole ? 5600. Le PIB mondial ? 97,356,765 bitcoins. Le PIB indonésien ? 1,417,007 bitcoins. Les réserves de la banque centrale sud-africaine ? 53,230 bitcoins.
Vous avez compris le principe. Toutes ces valeurs seraient donc facilement comparables en toute heure et en tout lieu.
Quand votre petite-fille vous demandera : « Grand-père, comment faisiez-vous pour suivre la valeur de toutes ces choses, lorsque vous n’aviez pas le Bitcoin ? » Votre réponse sera « Nous utilisions le dollar américain » et elle pourrait répliquer « Vraiment ? N’est-ce pas pourtant la monnaie des Etats-Unis ? » A votre réponse positive, elle pourrait demander « Et comment suiviez-vous la valeur du dollar ? », ce à quoi vous répondriez « Eh bien… principalement en le comparant à l’Euro, parfois au Yen, au Franc suisse ou à d’autres monnaies selon les circonstances. ».
Elle pourrait trouver cela bizarre.
Et une autre crypto-monnaie au lieu du Bitcoin ?
Il existe environ un millier de crypto-monnaies ayant au moins une transaction par jour. Donc pourquoi le Bitcoin et pas l’une d’entre elles ?
Plus de 60 millions de personnes possèdent du Bitcoin et, chaque mois, un million de nouveaux investisseurs en achètent. Les mille autres crypto-monnaies comptent moins de 5 millions de propriétaires au total, ce qui signifie que le Bitcoin va compter davantage de nouveaux utilisateurs dans les 5 prochains mois que ces mille monnaies en ont accumulé depuis leur création. Le réseau Bitcoin fait circuler un milliard de dollars par jour ce qui est plus que toutes les autres monnaies combinées.
L’indicateur le plus important, cependant, est de savoir dans quelle mesure nous pouvons utiliser ces plateformes avec confiance, autrement dit leur degré de souveraineté. La mesure de leur souveraineté est le carré de la puissance de calcul dont elles disposent. En dérivant la puissance de calcul de la consommation électrique de ces plateformes, ce millier de crypto-monnaies dispose au total de moins d’un pourcent de la puissance de calcul de la Blockchain Bitcoin.
Donc, aucune d’entre elles n’est réellement souveraine et, dans de nombreux cas, leur code est contrôlé par une personne ou un petit groupe d’individus.
De nouvelles technologies pourraient accéder à la souveraineté sans recourir à de la puissance de calcul et sérieusement concurrencer la Blockchain Bitcoin. Mais si ces technologies venaient à ne jamais être développées ou après bien longtemps, il leur sera difficile de détrôner la Blockchain Bitcoin.
La Blockchain Bitcoin est un protocole ouvert et non une société. L’histoire des protocoles est bien différente de celles des sociétés. Dans l’histoire des sociétés, il y a de nombreux changements, innovations et renversements (Microsoft-Apple, eBay-Amazon, Altavista-Google, MySpace-Facebook, etc.). L’histoire des protocoles est très différente. Une fois qu’un protocole est établi, il ne change pratiquement jamais. Par exemple, nous utilisons le protocole IP (Internet Protocol ou tout communément l’Internet) pour la quasi-totalité du transfert de données (jusqu’à la fin des années 1990, les routeurs Cisco fonctionnaient sur une douzaine de protocoles différents, maintenant uniquement sur IP). Nous n’utilisons qu’un seul protocole pour Internet et qu’un seul pour les e-mails. Ce dernier est, par exemple, assez basique. Au niveau du protocole, il n’y a aucun moyen que je sache si vous avez reçu mon e-mail, encore moins que vous l’ayez lu. De votre côté, vous ne pouvez pas vérifier mon identité lorsque je vous envoie un e-mail, il n’y a pas moyen de gérer les spams et bien d’autres choses qui pourraient résolues au niveau du protocole. Je suis sûr qu’on a déjà développé de bien meilleurs protocoles e-mail, mais nous n’en avons jamais entendu parler et probablement n’en saurons jamais davantage : quand un protocole est établi, il devient le seul protocole pour une utilisation donnée et il n’est plus possible de le remplacer par un meilleur. A ce jour, il semble que le protocole standard pour une plateforme souveraine soit celui de la Blockchain Bitcoin.
De nombreuses technologies et applications intéressantes sont actuellement testées sur d’autres crypto-monnaies et blockchains et, si elles s’avèrent réussies, pourraient être ajoutées à la Blockchain Bitcoin. Il est inefficace de mobiliser une grande quantité de machines et d’électricité pour atteindre un niveau de souveraineté, alors que nous disposons déjà de la robustesse et de la solidité de la Blockchain Bitcoin. Il est plus efficace de construire sur ses fondations.
Par exemple, la Blockchain Bitcoin est limitée en cela qu’elle ne peut traiter qu’environ 3000 transactions toutes les 10 minutes. Vous devez attendre 10 minutes avant que la transaction soit enregistrée sur la Blockchain et jusqu’à une heure pour qu’elle devienne irréversible. Et vous devez payer entre 5 et 50 centimes en frais de transaction pour que les mineurs traitent votre transaction. Le réseau Éclair (Lightning Network) tire avantage de la robustesse de la Bitcoin Blockchain et fonctionne comme une « deuxième couche » sur celle-ci, permettant des milliers de transactions par seconde, pour des montants aussi minimes que 1 satoshi ($0.00004), gratuitement et en temps réel. Un autre exemple de « deuxième couche » fonctionnant sur le réseau Bitcoin est RSK (NDR : Rootstock) qui permet à toutes les fonctionnalités de Ethereum d’opérer sur la Blockchain Bitcoin, qui est bien plus robuste.
Liquid est un réseau ouvert pour le règlement de transactions en paquets, développé par Blockstream, qui tourne sur la Blockchain Bitcoin. Il y a de nombreux autres exemples de technologies en cours de développement qui tirent avantage de la solidité de la Blockchain Bitcoin, tout en construisant sur celle-ci et en l’enrichissant de nouvelles fonctionnalités.
Comment le Bitcoin peut-il échouer ?
Le Bitcoin peut échouer de différentes manières. Il peut être pris sous la coupe d’un acteur malveillant. Il peut être remplacé par une meilleure plateforme ou il peut être piraté. Et le Bitcoin peut échouer d’une multitude de façons, que nous ne pouvons pas encore imaginer. Vu que le Bitcoin n’a pas de valeur intrinsèque et que sa valeur dépend d’un consensus social qui est, selon moi, une sorte de croyance collective, j’estime que le plus grand risque qu’encourt le Bitcoin est celui d’un climat de panique. Si nous estimons tous en même temps que le Bitcoin est sans valeur, il le devient. C’est une prophétie qui s’accomplit toute seule. Si le cours du Bitcoin devait retomber à zéro ou presque, et même si le réseau demeure intact, sa réputation en souffrirait tant qu’une génération pourrait s’écouler avant que la confiance ne revienne.
Un tel scénario peut se produire si les gens achètent du Bitcoin pour des montants qu’ils ne peuvent pas se permettre de perdre, correspondant par exemple à des avoirs de retraite ou des économies pour les études des enfants. En cas de baisse des cours, ils seraient forcés de vendre, accentuant la baisse et entraînant les ventes d’autres investisseurs. C’est pourquoi, j’estime que le plus grand risque pour le Bitcoin est celui de voir des gens investir plus qu’ils ne peuvent se permettre de perdre.
A ce jour, la majorité du capital investi en Bitcoin semble être du capital que les gens peuvent se permettre de perdre. Ce n’est pas parce qu’ils font preuve de sagesse ou parce que les pouvoirs publics ont pris des mesures efficaces ou parce l’industrie a été prudente. La principale raison pour laquelle les gens n’ont que des montants qu’ils peuvent se permettre de perdre provient de la volatilité des cours du Bitcoin. Ironiquement, la volatilité des cours est la meilleure assurance contre le pire risque du Bitcoin. Si le Bitcoin commence à être perçu comme une valeur refuge avant sa pleine maturité et que les investisseurs se mettent à investir des sommes déraisonnables, nous avons tous lieu de nous faire du souci. Cela se produit dans une certaine mesure à chaque envolée des cours du Bitcoin, mais jusqu’à présent la correction des prix qui s’en est suivi, n’a -heureusement- jamais détruit le Bitcoin. Un jour, cela ne pourrait pas être le cas.
Après dix années d’un fonctionnement sans interruption, il ne faudrait pas tant se soucier d’un échec du Bitcoin, mais plutôt du fait qu’il devienne inutile. C’est ce qu’a connu le protocole BitTorrent, qui existe toujours, mais qui est de moins en moins utilisé car la vraie révolution dans le partage de fichiers numériques et de divertissement s’est faite via les sociétés Dropbox, Spotify, Netflix et d’autres.
Aussi, il existe une probabilité que le Bitcoin n’échoue pas mais qu’il reste seulement utilisé par un petit groupe de supporteurs et fanatiques, sans parvenir à entrer dans les mœurs. Cela pourrait arriver si les institutions financières, les gouvernements et les autorités parviennent à ostraciser et isoler le Bitcoin du reste du monde financier, en tant qu’unité monétaire non-convertible, voire même si le monde financier continuait à lui ouvrir ses portes.
Si le Bitcoin ne se démocratise pas, il aura toujours une valeur mais sûrement bien plus basse que celle d’aujourd’hui. Mon opinion (subjective) est qu’il existe une probabilité de 30% que cela se produise.
Les mouvements de cours du Bitcoin
Le Bitcoin a été lancé en janvier 2009 mais n’a pas eu de valeur avant juillet 2010 où les premiers échanges se firent à 5 centimes (NDR : de dollar américain) par Bitcoin. En novembre 2010, le Bitcoin connut son premier boom et son cours monta jusqu’à 39 centimes avant de « crasher » à 19 centimes. Son pic à 39 centimes ne dura que très brièvement et le volume de transactions à ce niveau fut négligeable. La plupart des observateurs du Bitcoin ne retinrent que l’envolée qui emmena le Bitcoin de 5 à 19 centimes, soit un bond de 280%. Toutefois la majorité des commentaires de l’époque se focalisa sur le « crash » de 50% entre 39 et 19 centimes.
L’histoire s’est répétée à l’identique six fois dans l’histoire du Bitcoin. Il y a eu six envolées durant ses dix années d’existence, et entre chacune de ses envolées, le cours du Bitcoin stagna ou baissa durant des mois ou des années. Durant ces dix années, la presse s’est toujours polarisée avec inquiétude sur le dernier « crash » du Bitcoin.
On peut se demander comment une chose qui passe de 0.05 à 4000 dollars peut continuellement « crasher » ? Si vous observez une hausse de 0.05 à 4000 dollars mais que vous voulez faire gober aux autres un scénario d’échec, agissez durant les périodes de forte volatilité !
La seconde envolée du Bitcoin s’est produite en février 2011 et amena le cours du Bitcoin au-dessus d’un dollar pour la première fois, avant de « crasher » à 68 centimes. La troisième arriva en août 2011 et tira le Bitcoin jusqu’à 29 dollars avant de « crasher » à 2 dollars. Le quatrième date d’avril 2013 quand on atteignit 230 dollars avant de revenir à 66 dollars. Le cinquième se produisit en décembre 2013 et amena le cours jusqu’à 1’147 dollars avant un « crash » à 177 dollars. Le sixième (et dernier en date) remonte à décembre 2017 et amena le cours à 19’783 dollars avant de « crasher » sous les 3’200 dollars (et tant que le marché baissier n’est pas terminé, on ne sait jusqu’où il peut descendre).
Les envolées du cours du Bitcoin représentent son plus important moyen de propagation. Les gens se passent le mot et davantage de personnes veulent en posséder. Il s’agit d’un mécanisme risqué, qui a bien fonctionné jusqu’à présent, mais qui peut un jour amener au désastre. Les envolées de cours sont à la fois les meilleurs moments du Bitcoin, mais aussi les plus dangereux et ceux qui le rendent plus vulnérable.
Chaque marché baissier vise à purger les excès de l’envolée précédente. Quand les prix flambent, trop de gens achètent trop de bitcoins, pensant pouvoir les revendre rapidement et à bon compte, ce qui ne se produit généralement pas. Imaginez un arbre produisant des fruits sains et des fruits pourris. Un marché baisser du Bitcoin ressemble à une période où l’arbre est agité jusqu’à ce que tous les fruits pourris tombent au sol. A chaque secousse, des fruits pourris tombent. L’arbre est agité par la baisse des prix et par le temps qui passe. Plus le prix baisse et plus le temps passe avant une nouvelle envolée, plus les gens renoncent à leurs ambitions initiales, vendent et ajustent leur exposition et leurs attentes. A un moment, vous pouvez continuer à agiter l’arbre mais plus aucun fruit n’en tombe. C’est alors que le marché est prêt pour une nouvelle envolée.
Si le Bitcoin réussit, il est probable que nous passions par une nouvelle série de six envolées dans les 7 à 10 prochaines années. Quiconque se targuant de connaître le prix du Bitcoin la semaine prochaine ou a fortiori l’an prochain, est soit un ignorant, soit en train de vous mentir éhontément. Il est impossible de savoir quand le cours va toucher le fond et quand la prochaine hausse va démarrer. Ceux qui se risquent à deviner le timing du marché encourent le risque de perdre davantage que ce qu’ils voulaient économiser. Si vous décidez d’acheter du Bitcoin, définissez simplement la somme que vous êtes prêts à perdre (idéalement moins de 1% de votre fortune), investissez sur le champ et n’y pensez plus pendant 7 à 10 ans. J’ai prodigué ce conseil depuis 6 ans et, en voyant comment les gens le suivaient, je peux affirmer que « ne plus y penser pendant 7 à 10 ans » est l’ingrédient de ma recette le plus difficile à respecter. Ce manque de discipline détruit bien plus de valeur qu’on l’imagine. La volatilité des cours désoriente les gens et les amènent à boursicoter de nouveau. En cas de forte baisse, les gens en achètent davantage pour réduire leur prix d’achat moyen, ce qui les amène à avoir une exposition supérieure à ce qu’ils peuvent se permettre de perdre, et donc une sensibilité accrue à la volatilité des prix.
Encore pire, si le prix décuple, ils décident de vendre car le Bitcoin représente une part trop importante de leur fortune et donc trop de risque (il est difficile de doubler la valeur de votre portefeuille en partant d’un investissement de 1% si vous réduisez ce dernier à chaque fois que vos gains décuplent).
Si vous pensez que cela peut vous arriver, je vous conseille d’investir en 2 tranches : gardez une tranche que vous ne toucherez pas pendant 7 à 10 ans et une autre sur laquelle vous boursicoterez autant qu’il vous plaira (en vous assurant que la valeur cumulée des 2 tranches représente une somme que vous pourriez vous permettre de perdre).
Pourquoi je pense qu’un Bitcoin peut valoir un million de dollar d’ici 7 à 10 ans ?
Estimer la valeur d’un Bitcoin, au cas où le Bitcoin réussit, est purement hypothétique. A l’heure actuelle, la valeur du Bitcoin est d’environ 70 milliards de dollars (environ 17.5 millions de bitcoins x 4000 dollars par bitcoin). Si le Bitcoin devient un jour un étalon global de valeur et de règlement, il devrait valoir davantage que l’or et moins que l’agrégat étroit de la monnaie en circulation dans le monde. Tout l’or extrait du sol vaut 7’000 milliards de dollars tandis que l’agrégat étroit de monnaie en circulation représente environ 40'000 milliards de dollars.
Si le Bitcoin atteint la même valorisation que l’or, chaque bitcoin vaudra environ 300'000 dollars. Et s’il équivaut à la valeur de l’agrégat étroit de monnaie en circulation, son cours serait de 2 millions de dollars.
Ma méthode préférée pour estimer le cours potentiel du Bitcoin est plus prosaïque. J’ai remarqué que le cours du Bitcoin avait tendance à équivaloir à 7000 dollars x le nombre de détenteurs de bitcoins. Si cette constante demeure et si 3 milliards d’humains viennent à en posséder, sa valeur serait de 21'000 milliards de dollars, soit 1 million par bitcoin.
Conclusion
Cet essai a pour but d’expliquer le bien-fondé d’investir une petite partie de ses avoirs en Bitcoin et, en conséquence, se concentre sur le potentiel de gain en cas de réussite du Bitcoin. Mais si le Bitcoin devient pour l’argent ce qu’Internet est devenu pour l’information, les perspectives de liberté économique sont bien plus excitantes que tout gain potentiel.
J’ai grandi en Patagonie (Argentine) où mes parents sont éleveurs de moutons. En grandissant, j’ai vu mes parents perdre toutes leurs économies trois fois : la première à cause d’une forte dévaluation, la deuxième suite à de l’hyperinflation et la dernière lorsque le gouvernement a confisqué tous les dépôts bancaires. A chaque fois que la situation semble s’améliorer, une nouvelle et différente tempête économique nous emporte.
Le souvenir de ces événements n’est pas tant pécunier qu’émotionnel. Je revois mes parents se battre pour leur argent, je me souviens avoir été effrayé et que tout le monde autour de nous l’était, et se terrait dans une attitude désespérée, quasi animale. Je me souviens aussi à quel point ces crises étaient injustes, frappant les plus pauvres le plus durement.
Ceux qui avaient suffisamment d’argent pour acheter des dollars se protégeaient de cette façon. Les mieux nantis se protégeaient en achetant de l’immobilier, et les super-riches s’abritaient derrière un compte bancaire à l’étranger. Mais les plus pauvres n’avaient accès à aucune de ces protections et furent frappés le plus durement.
Lors de l’émergence d’Internet, j’étais jeune et idéaliste. Je pensais sincèrement qu’Internet permettrait de démocratiser l’argent et de régler les problèmes monétaires pour de bon. Trente ans après sa création, Internet a réglé de nombreux problèmes, toutefois le renforcement de la liberté économique n’en fait pas partie.
Je pensais avoir perdu tout espoir qu’Internet règle ce problème lorsque j’ai par hasard découvert le Bitcoin. Au début, j’étais très cynique mais plus je m’y intéressais, plus je devenais curieux. Après six mois d’apprentissage et de pratique du Bitcoin, j’ai décidé d’y consacrer le reste de ma carrière, mon argent et ma réputation pour aider le Bitcoin à réussir.
Rien ne me rendrait plus fier que de pouvoir dire à mes petits-enfants que je faisais partie d’une très large communauté ayant aidé le Bitcoin à réussir. Et que grâce à cette réussite, des milliards d’individus peuvent désormais envoyer, recevoir et conserver autant d’argent qu’ils souhaitent, aussi facilement et de façon aussi sûre que l’on envoie ou conserve une photographie. De sorte que ce qui est arrivé à mes parents et à d’innombrables autres personnes ne puisse plus jamais se reproduire.
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