Crise financière (1) : Pourquoi ? Histoire du capitalisme moderne
Nous traversons actuellement la plus grande crise financière depuis 1929. Il peut être éclairant dans un premier temps d’observer de quelle façon a été gérée cette crise de 1929, celle qui a le plus de similarités avec la crise actuelle. Il est également interressant d’observer comment les changements initiateurs des mécanismes responsables de la crise actuelle ont eu lieu.
I Une précédent historique, la crise de 1929.
La crise que nous subissons aujourd’hui est la conséquence directe de la bulle spéculative immobilière. Les marchés financiers sont partis du principe que l’immobilier allait indéfiniment monter. Dans le même temps nos sociétés se sont converties à la libéralisation de l’économie. Ce schéma est exactement le même qu’en 1929, à l’époque le capitalisme moderne naissant était de fait libéral puisque les états ne s’étaient pas encore préoccupés de sa régulation ou de son contrôle. Par ailleurs la spéculation boursière aux USA a créé une bulle qui reposait sur le principe que les valeurs boursières allaient globalement monter indéfiniment. Or la déconnexion de la réalité qui se trouvait être une surproduction industrielle a engendré la plus grande crise économique de l’histoire.
II La réponse à la crise de 1929 : les politiques keynésiennes.
Les états démocratiques, confrontés à l’effondrement du système en 1929 ont dû proposer des mesures radicales permettant de redresser l’économie et d’empêcher que de telles crises se reproduisent.
Intéressons nous au cas particulier des USA, qui en raison de leur puissance déterminent de facto les évolutions dans les autres pays. Roosevelt, conseillé par une personne brillante : Keynes, a alors lancé son "New Deal". Il s’agissait bien d’une politique révolutionnaire. L’état désormais, allait se mêler de l’économie, provoquer la demande, redistribuer les richesses, investir dans le développement des infrastructures créant des conditions propices au développement industriel, mettre en place des dispositifs de protection sociale destinés à corriger les lacunes du système et à maintenir un minimum de cohésion dans la société. Par une politique de développement industriel et divers moyens, l’état allait investir dans les secteurs dont il juge le développement à long terme comme étant bon pour l’intérêt général. Le développement des secteurs économiques clés aux USA, qui a permis d’asseoir leur développement économique et leur puissance fut le fruit de choix politiques. L’aviation avec Boeing fut soutenu par le gouvernement et tous les avions responsables du développement de cette entreprise et des ruptures technologiques aptes à asseoir sa domination furent financés par des appels d’offre de l’état pour du matériel militaire. L’informatique, dont IBM a été l’une des entreprises les plus directement responsables du développement, était sous tutelle de l’état. Sans oublier le spatial avec la NASA.
Un tel système progressiste a permis de surmonter la crise de 1929 et posé la base des sociétés occidentales jusqu’en 1980. Que ce soient alors les démocrates ou les républicains, les bases de la politique keynésienne ne furent pas remises en cause.
Par ailleurs ce système est par essence plus démocratique qu’un système libérale puisqu’il permet à l’état, donc à la volonté populaire, d’orienter de façon bien plus marquée les choix économiques.
Pour autant, il ne remet pas en cause la propriété privée des entreprises, ni la liberté d’entreprendre. En ce sens il reste capitaliste. Or, aux USA, l’application d’une politique keynésienne a conduit à faire monter la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu à 79% entre les années trente et les années soixante, pour obtenir une répartition plus équitable des richesses et soutenir la croissance par la consommation des classes moyennes.
Ainsi, jusqu’aux années 1980, et malgré certaines périodes de récession liées à des perturbations extérieures (pic pétrolier) qui ne furent pas anticipées et mal gérées, aucune crise économique de l’ampleur de celle que nous connaissons n’eut lieu. Cette période constitue certainement la période de prospérité la plus stable de l’histoire occidentale moderne.
III la révolution conservatrice et le règne du néolibéralisme
Pourtant, cette politique fut totalement remise en cause au début des années 1980 par le couple Reagan - Thatcher. Reagan a au moins le mérite d’être honnête en baptisant sa politique la révolution conservatrice.
Ainsi, Reagan va réduire considérablement les impôts et leurs caractères progressifs. Il dérégule également les marchés faisant de l’offre et de la demande la loi universelle conduisant à l’équilibre supposé et une juste répartition des richesses. D’autre part, il relance la compétition internationale avec l’URSS qui se trouvait déjà en bout de course en accroissant considérablement le budget de la défense.
Toutes ces mesures d’allégement fiscale et de dérégulation, corrélées à une stimulation de la demande par les commandes de l’armée vont bien avoir un effet, boostant l’économie US à court terme, mais dans le même temps elles vont enclencher un mécanisme de déséquilibre dans la répartition des richesses qui conduit aujourd’hui au point de rupture que constitue la crise actuelle. De plus les baisses d’impôts combinées à une augmentation forte des dépenses militaires conduisirent à un énorme déficit budgétaire, qui gonfla de près de 200 % entre le début du mandat de Reagan et celui de son successeur George Bush et initia la croissance de la dette qui est aujourd’hui colossale.
En aucun cas ce libéralisme économique ne repose sur la liberté. La liberté ne signifie pas faire tout ce qu’on veut. Dans le domaine pénale nous somme libres, pour autant nous ne sommes pas libres de tuer si on le souhaite. Personne n’aurait idée de revendiquer le droit de tuer en revendiquant une liberté. Quel que soit le domaine ou on l’applique, si l’on supprime toute règle, seule la loi du plus fort s’applique (c’est la loi de la nature), et cela conduit inévitablement à l’établissement de mafias. Cela est valable pour le domaine économique comme pour tous les autres et aujourd’hui ce sont bel et bien des mafias qui dominent la planète économie. Cette loi du plus fort est certes naturelle mais sûrement pas humaine car c’est une des caractéristiques spécifiques de l’homme que de s’extraire des lois de la nature et de modifier son environnement où s’appliquent ses propres lois plutôt que d’être modifié par son environnement.
Par ailleurs, beaucoup avancent que le libéralisme est juste puisque l’offre et la demande rémunèrent les contributions de chacun de la manière la plus efficace. Mais cela ne repose sur rien. Et de quelle efficacité est-il question ? Et en quoi la justice est elle liée à l’efficacité ?
La conduite de politiques ultralibérales sur le modèle de Reagan ne peut en aucun cas être le signe d’une quelconque modernité puisqu’elle va contre le sens de l’histoire depuis la grande dépression et qu’elle reproduit le modèle qui était déjà en place avant 1929. IL S’AGIT DONC FACTUELLEMENT D’UNE RÉGRESSION. Les mêmes causes ayant les même effets, nous nous trouvons aujourd’hui comme en 1929 devant une crise systémique à l’echelle mondiale.
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