Cyberbudget, ou comment contrôler vous-même les impasses financières des candidats
Vous voulez savoir quelle dette et quel déficit vous laisseraient les candidats à l’élection, s’ils réalisent leurs promesses ? Ce qui suit vous explique comment procéder !
L’initiative de www.debat2007.fr de chiffrer les promesses prononcées publiquement par les candidats donne une information intéressante et utile, non parce qu’elle apporte des chiffres à graver dans le marbre (chacun peut avoir son idée sur ce qui sera fait, ou pas fait, et avoir ses propres hypothèses de chiffrage), mais surtout parce qu’elle pose un débat sain pour le choix démocratique.
Mais le coût d’un projet présidentiel (souvent en milliards) donne un chiffre abstrait. Il serait plus utile de disposer d’informations sur le niveau de dette, du déficit ou des
prélèvements qui attendent les Français - ou de vérifier si les déclarations de dépenses, de dette et de déficit sont cohérentes entre elles !
Pour cela, il faut savoir passer du
coût des projets présidentiels à une estimation rapide du déficit ou de la
dette fin 2012. C’est exactement ce que fait l’outil « cyberbudget »
(http://www.debat2007.fr/index.php?id=653) : permettre à chacun (journalistes,
enseignants, citoyens...) de passer des promesses de dépenses à une estimation
du déficit ou de la dette et de vérifier la crédibilité et la sincérité des
projets présidentiels. Il me donne l’occasion de donner quelques informations en matière de finances publiques.
Méthodologie
D’abord, quelques chiffres. Le déficit public (hors soultes et autres effets comptables) devrait s’établir fin 2006 autour de 2,8 points de PIB, différence entre des dépenses (53,8 points de PIB environ) et des recettes (51 points du PIB). La dette s’établira quant à elle à environ 65 points de PIB.
La façon dont ce déficit évolue au cours du temps peut se calculer de façon relativement simple, sur la base de l’hypothèse suivante : les recettes sont stables par rapport au PIB, alors que les dépenses (hors grands projets présidentiels) progressent généralement moins vite. Ainsi, si on suppose que l’ensemble des dépenses ne progresse que de 1,5 % par an hors inflation (ce qui n’est arrivé que quatre fois dans les vingt-cinq dernières années) alors que la croissance s’établit à 2,5 % par an, la dépense publique rapporté au PIB baisse de 1 % chaque année. En effet si la dépense augmente de 1,5 % et le PIB augmente de 2,5 %, la dépense divisée par le PIB baisse de 2,5 - 1,5 = 1 %.
On peut ensuite estimer la dette : en montant absolu, la dette une année est égale à la dette l’année précédente plus le déficit. Si la croissance fait 2,5 % et l’inflation 2 %, la dette en points de PIB progressera 4,5 % moins vite que la dette en niveau absolu. Ainsi, s’il n’y a pas de déficit le niveau absolu de la dette restera constant, ce qui représente une baisse 4,5 %. Avec une dette qui représente 65 points de PIB, le seul effet de l’inflation et de la croissance fait baisser la dette de 2,8 points par an environ.
Utilisation du modèle sur un exemple
Le modèle cyberbudget (lien : http://www.debat2007.fr/index.php?id=653 ) réalise pour vous les calculs exposés ci-dessus.
Prenez par exemple un candidat hypothétique qui promettrait une baisse de prélèvements de 4 points de PIB, et dont vous estimez que le programme coûterait 3,2 points de PIB. Son programme coûterait donc au total 7,2 points de PIB.
Placez 7,2 (ou 7.2 si votre navigateur est configuré pour le système américain) dans la case « coût du programme de la rubrique « Variables ». Cliquons sur le petit rond après « Dette » puis sur « Calculer » : nous obtenons le niveau de dette auquel conduirait le projet, soit près de 74 points de PIB (soit nettement au-dessus du seuil de 60 % de nos engagements européens) !
Cliquez maintenant sur le petit rond après « croissance » et inscrivons « 50 » dans la case « Dette » de la rubrique « Variables ». Cliquez sur « Calculer » pour obtenir le taux de croissance qui permettrait de financer ce programme en réduisant la dette à 50 points de PIB : il faudrait une croissance de près de 4,5 % pour y arriver !
Inscrivez « 64 » dans la case « Dette » de la rubrique « Variables », et 2.5 % dans la case « Croissance ». Cliquez sur le petit rond après « Coût du programme », puis sur « calculer », pour obtenir le coût du programme qui permettrait d’avoir une dette en 2012 inférieure à celle de 2006. La réponse est de 3,45 points de PIB : autrement dit le si ce candidat veut maîtriser la dette, ce candidat ne fera pas la moitié de ce qu’il a annoncé !
Utilisation du modèle sur des vrais candidats
Vous pouvez trouver sur http://www.debat2007.fr/index
De là, il est facile de calculer le coût du programme en points de PIB : un point de PIB « valant » 17 milliards, le coût en points de PIB s’obtient en divisant par 17 le coût en milliards d’euros.
Vous pouvez enfin ajuster les hypothèses d’inflation ou de croissance (les valeurs par défaut constituant des valeurs « raisonnables » au vu de l’Etat actuel des finances publiques et de l’économie française.
4. Deux tests de la crédibilité d’un programme
Deux « tests » peuvent être utilisés pour vérifier si un programme est crédible :
-
finit-il en 2012 avec un niveau de dette de l’ordre de
60 % du PIB ? Dans le cas contraire, il est probable que le programme ne
soit pas réalisé, tant la pression de nos partenaires européens, mais également
l’application des critères de Maastricht, excluent que la France se lance dans
une voie d’augmentation de sa dette, alors qu’elle dépasse déjà largement le
seuil de 60 %
-
repose-t-il sur des hypothèses réalistes de progression des dépenses publiques ? Au vu des vingt-cinq dernières années, le niveau de 1,5 % est déjà ambitieux, puisqu’il n’a été atteint quatre fois. De plus, les dépenses publiques sont constituées pour près de la moitié par les dépenses de santé, dont l’évolution ne se stabilisera pas, notamment pour des raisons tenant au vieillissement : selon la Cnam, les dépenses de santé s’élèvent à moins de 900 € par an pour les moins de 25 ans, à 3 000 € pour les 60-74 ans et plus de 5 200 € pour les plus de 75 ans. D’ailleurs, dans tous les pays, les dépenses de santé progressent plus vite que le PIB : le stabilisation de l’ensemble des dépenses publique est donc irréaliste, sauf à supprimer des remboursements (ce qui ne diminuera pas les dépenses de santé des Français, mais fera baisser la part comptabilisée en dépense publique).
Si le programme ne passe pas ces tests, il a toutes les chances de ne pas être réalisé. On peut alors calculer le « taux de sincérité » du candidat, c’est-à-dire la part des propositions susceptibles d’être réalisées, comme dans l’exemple ci-dessus.
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