De l’inexorable conservatisme des politiques économiques
Il n’était plus un jour sans que ne pleuvent les mauvaises nouvelles du monde macroéconomiques et la bourse chutait sans vergogne. Mais rassurons nous, cette période est à jamais révolue et nos dirigeants, se rendant compte du caractère anxiogène du climat médiatique, on décidé d’ « agir ».
Toute action publique est fondée sur une modélisation à minima de la suite des événements. Non pas que cette dernière soit entièrement prévisible, surtout en les temps qui courent mais il est tout de même nécessaire d’adopter un modèle en vue de piloter l’action publique.
Les critiques ont plu sur le manque de coordination dans les politiques de relance européennes mais s’il est bien une chose qui était partagée par tous, c’est bien le modèle d’une crise en « V ». Une crise en « V » est un grand classique du capitalisme d’inspiration libérale : lorsque l’économie a trébuché sur une bulle, ou une instabilité du prix du pétrole, une stimulation adéquate permet de « relancer » ladite économie jusqu’à la prochaine crise tout en conservant une croissance sur le long terme.
Tout le vocabulaire des « plans de relance », « injections temporaires » de liquidités par les banques centrales trouve ses racines dans cette croyance qui s’est pour le moment toujours vérifiée dans l’histoire du capitalisme de marché. Toujours ? Non, un exemple de taille est omis dans l’équation qui régit l’architecture des fameux plans de relance : l’exemple Japonais. Le Japon a eu beau baisser ses taux d’intérêts à des niveaux proches de zéro, lançant d’ailleurs par la même occasion de juteuses opérations de Carry Trade avec des Pays à taux élevés, sa croissance n’a jamais redécollé réellement depuis 90.
Le Japon serait-il à ce point un pays à la puissance négligeable pour que nous puissions nous permettre de ne pas évaluer son exemple et en tirer les conséquences ?
L’inexorable conclusion, lorsqu’on observe l’exemple Japonais est qu’il ne suffit pas d’une politique de taux de refinancement agressive (voir jusqu’au quantitative easing, le nouveau nom de la planche à billets…) pour faire « redémarrer » l’économie.
Aujourd’hui, le scénario d’une crise en « L » (ndr qui chute mais ne remonte plus) ne semble même pas effleurer l’esprit de nos dirigeants, ni c’est peut être plus grave, nos médias grand public.
Aujourd’hui, on semble penser que des signes réels de reprise ont été entrevus et c’est ce qui fait remonter la bourse dans un mouvement incompréhensible pour les salariés de Caterpillar ou d’Arcelor Mittal qui, dans la grande tradition libérale, ont servi de variable d’ajustement à un système mondialisé sauvagement ces dernières années… Quels sont ces signes ? La baisse de l’accélération de l’écroulement de l’économie réelle ? On est allé jusqu’à calculer les différentiels d’accélération de la dégradation pour « redonner le moral » à la bourse ou au « consommateur ».La seule annonce des résultats de
Goldman Sachs adossés, au vu et au su de tout le monde d’un gigantesque « oubli » comptable (on a "oublié" le mois de décembre !) est symptomatique à la fois des aspects tristement ubuesques du système et de l’incapacité de nos dirigeants à sortir de l’ornière par un modèle innovant.
Lorsque nous aurons compris qu’il s’agit ni plus ni moins que de changer de paradigme dans les économies du monde, nous aurons peut être réalisé une partie du chemin mais les G20 et autres sommets n’ont pas franchi le Rubicon. Il se peut néanmoins que les dés soient d’ores et déjà jetés pour le modèle actuel.
Nos dirigeants n’ont, au contraire, de cesse que de tuer dans l’œuf des initiatives qu’ils avaient parfois eux-mêmes suscitées. En France, l’Etat demande décalage de la sortie du rapport du groupe d’économistes présidé par Joseph Stiglitz qui devait trouver un indicateur plus « humain » que le PIB pour traduire le développement de nos sociétés. Le rapport n’est –semble-t-il plus à propos compte tenu de la crise. Aux USA, un jeune président, noir de surcroît, découvre en dépit de ses promesses électorales que la loi des lobbies bancaires est toujours plus forte que la démocratie.
Il n’a pourtant jamais été si urgent de rendre compte autrement du développement humain des sociétés. Prendre en compte d’une certaine manière ce qui n’est pas comptable aujourd’hui : l’éducation, la recherche, le bien être des populations, leur sécurité. Dans un monde où la seule variable d’optimisation : le PIB, après avoir provoqué tous les pires drames humains et environnementaux pour son « optimisation » permanente, ne semble pas vouloir redécoller avec les méthodes traditionnelles, il est urgent de changer de paradigme.
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