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De l’intérêt des dévaluations

C’est une des dernières lignes de défense des partisans de la monnaie unique européenne, peut être pas la dernière mais sans doute une des dernières : l’euro nous protègerait des dévaluations au sein de l’Europe. Une nouvelle ligne Maginot à enfoncer.
 
Fantasmes contre réalité
 
A écouter les défenseurs de l’euro, le retour aux monnaies nationales provoquerait une vague de dévaluations apocalyptiques, une sorte de retour à l’âge de pierre économique. C’est à peine s’ils n’évoquent pas les famines ou les guerres qui s’en suivraient. En fait, le procédé est assez habile car en affirmant que les dévaluations sont dangereuses, ils parent de facto la monnaie unique de l’avantage de les éviter, par définition. Il faut donc compléter le bilan de l’euro.
 
Le problème est que le rétroviseur historique révèle une autre réalité. Dans les années 70 et 80, quand les pays européens procédaient régulièrement à des ajustements monétaires (réévaluations ou dévaluations), la croissance était beaucoup plus forte que dans le système de parité fixe de l’euro. C’est ainsi que selon les chiffres de l’OCDE la croissance de la France est passée de 2.3% par an à 1.5% des années 80 aux années 2000 (2 à 0.8% en Allemagne et de 2.6 à 0.5% en Italie).
 
Bref, les dévaluations n’ont jamais handicapé la croissance du continent européen. C’est bien la rigidité de l’euro qui créé les problèmes actuels. En outre, l’histoire économique montre bien que les dévaluations sont au contraire un procédé pour relancer la croissance. C’est comme cela que la Grande-Bretagne ou la Suède sont sortis de la récente crise économique. La baisse de la monnaie permet de relancer les exportations et pénalise les importations, favorisant la production locale et l’emploi.
 
Les dévaluations au service de la hausse des salaires
 
Mieux, en constatant que l’euro comme monnaie unique pousse à la compression des salaires en Allemagne (et bientôt partout ailleurs), on en arrive à la conclusion que les dévaluations rendent davantage possibles les hausses de salaires par rapport aux autres pays. En effet, dans un régime de changes ajustables, si un pays voit ses salaires progresser davantage que les voisins, à gain de productivité équivalent, il perd en compétitivité prix sur les coûts de production.
 
Néanmoins, il peut à tout moment effacer cette perte par une dévaluation, comme le faisaient les pays du Sud de l’Europe par rapport à l’Allemagne dans les années 70 ou 80. Au contraire, dans un système de change fixe comme l’est l’euro aujourd’hui, il n’y a plus la possibilité de dévaluer pour compenser des hausses de salaires supérieurs à celles des voisins. Résultat, le pays dont l’évolution des salaires est la plus faible gagne en compétitivité par rapport à ses voisins.
 
C’est le « modèle Allemand », où les salaires stagnent depuis près de 15 ans et la croissance depuis 10 ans. L’Allemagne l’a compris avant car elle avait les coûts les plus élevés de l’Europe à l’origine. Le problème est que si le modèle se généralise, les salaires seront poussés à la baisse, tout comme la croissance. Et il faut noter qu’alors, les gains de productivité ne peuvent plus être redistribués en partie aux salariés, pris dans une course au moins-disant salarial.
 
Le péril des dévaluations est un fantasme bien utile pour essayer de protéger l’euro. Mais dans la réalité, les dévaluations, si elles ne sont pas dénuées de conséquences négatives (renchérissement des importations…) ont également des vertus, et notamment celle de faciliter les hausses de salaires.

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6 réactions à cet article    


  • plancherDesVaches 7 décembre 2010 12:59

    "Et il faut noter qu’alors, les gains de productivité ne peuvent plus être redistribués en partie aux salariés, pris dans une course au moins-disant salarial.« 

    Parce que ce n’est pas encore le cas... ?????

    Quelle hypocrisie.

    Si vous dévaluez une monnaie, vous avez de l’inflation.
    Ce qui n’empêche pas l’inflation par spéculation, par ailleurs. Faut bien payer les »zinvestisseurs".

    Article de propagande d’extrême-droite.


    • zelectron zelectron 7 décembre 2010 14:35

      nda : c’est tout dire ! notation de l’article : triple zéro.


      • Peretz Peretz 7 décembre 2010 16:36

        La relation dévaluation/salaires n’est pas aussi simple que le dit l’auteur. Mais il est vrai que l’inflation loin dêtre handicapante, qui accompagne l’augmentation de la masse salariale, défavorise surtout la finance. Donc reprenons le franc sans essayer de se hausser au niveau de l’Allemagne qui avec un D.M fort arrive tout de même à exporter. Et les boeufs seront bien gardés.


      • plancherDesVaches 7 décembre 2010 16:46

        Oui, on se fout de nous, Jeanyvesrobert.
        Le souci est que le Français, même d’en bas, est encore le seul peuple qui a un esprit critique développé car il bénéficie encore un peu pour le moment d’une révolution de 1789.

        "la FRANCE est bien placée en taux de productivité. Relançons l’industrie lourde en réinvestissant dans la formation, la matière grise, la modernisation de nos moyens de production..."
        Rien de plus facile.
        La culture industrielle de BONNE qualité naturelle était encore présente dans les écoles de la République il y a encore juste 20 ans.
        La flamme est encore vivante dans beaucoup d’entre nous.

         Dans ce cadre, les banques ont un rôle à jouer. Que le GVT ordonne un cahier des charges. "
        Manque de bol :
        Le GVT a été acheté par les banques.
        Le mouvement, initié par Pompidou en 1973 a été freiné des quatre fers par la gauche de Miterrand mais a été amplifié par tous les autres présidents.
        Le pire a été lorsque Mr Balladur a fait signé en 1993 les accords américains sur les services et l’industrie, soit un pavé de 500 pages et 2500 pages d’annexe que les députés ont dû lire en 1,5 jour(s).

        La notion de prise en otage prend alors toute sa grandeur.


      • plancherDesVaches 7 décembre 2010 17:31

        « Reconstruire la nation. »

        C’est ce qu’il faut faire, effectivement.

        Mais avec des Rosevelt, des De Gaulle, des Hommes de bonne volonté tels qu’il existât en Grèce ou de trop rares Empereurs romains suicidés avant l’âge comme JFK.

        Mais pas des musolini, hitler, franco et autre fous.

        Choix difficile, non.. ???


      • Laurent Herblay Laurent Pinsolle 7 décembre 2010 18:30

        @ Plancherdesvaches


        Je n’ai jamais qu’il n’y avait pas d’autres facteurs expliquant que les gains de pouvoir d’achat ne se retrouvent pas dans les salaires. J’ai écrit de nombreux papiers (dont un sur l’anarchie néolibérale publié ici) qui reprend les thèses de nombreux économistes sur le fait que le libre-échange et la financiarisation de l’économie font que les multinationales sont aujourd’hui en mesure de récupérer l’ensemble des gains de productivité en leur faveur.

        J’ai également fait un papier récemment pour souligner la baisse du salaire médian, qui montre la paupérisation des classes populaires et moyennes.

        Complètement d’accord sur la loi Pompidou / Giscard / Rothschild : il faut l’abroger et que l’Etat reprenne la main sur la création monétaire, qu’il est totalement anormal d’avoir confiée aux banques privées pour leur profit. Soit dit en passant, la gauche n’a jamais remis en cause cette loi. Et on peut voir dans l’indépendance donnée à la BdF par la gauche une soumission de plus à l’ordre financier établi...

        Enfin, j’ai mis dans la conclusion que les dévaluations provoquent de l’inflation.

        @ Peretz

        Notez le vocabulaire que j’emploie. Je ne dis pas que c’est systématique, mais que cela « peut », cela « favorise ». Il est bien évident que les choses sont plus compliquées. Néanmoins, je crois que l’on constate aujourd’hui qu’en Europe, la rigidité des taux de change (via la monnaie unique) pousse à la compression des salaires alors que le fait d’avoir des changes ajustables (via des monnaies nationales) rendait les hausses de salaires plus faciles.

        @ JeanYvesRobert

        D’accord pour revenir au franc. En revanche, une chose est sûr : mieux vaut ne pas avoir de monnaie surévaluée / trop chère / trop forte (adjectif bien choisi pour véhiculer une image positive alors que les conséquences d’une monnaie forte ne sont que positives, loin de là).

        Beaucoup d’économistes attribuent la bonne performance économique de l’Europe à la fin des années 90 au bas niveau de l’euro par rapport au dollar.

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