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Du rififi du côté des panamas...

Choisi par des célébrités de tous horizons, porté avec style par Jane March dans « L’Amant » (1991) et Marlon Brando dans « Le Parrain » (1972), le panama est plus qu’un chapeau. A la fois victime de son succès et de la mondialisation, sa production se trouve aujourd’hui menacée.

Comme son nom ne l’indique pas, ce couvre-chef appelé à l’origine sombrero fino de paja toquilla a été popularisé aux USA et en Europe par les ouvriers creusant le canal de Panama en 1881. D’où sa seconde appellation de panamá hat. Fabriqué en Equateur dans les provinces d’Azuay, Manabi et Canar depuis toujours, il fait partie du costume traditionnel des Amérindiens de cette région. Tissé à base de paille issue du Carludovica Palmata, il existe principalement en deux qualités. Le Cuenca, réalisé en une journée à une semaine, est fait de paille d’un calibre plus épais que le Montecristi demandant jusqu’à six mois de tissage pour le Super Fino. Les premiers, ayant une durée de vie de deux ans, sont vendus en Europe autour de 60 € et les seconds, affichant une durée de vie de plus de vingt ans, dépassent parfois les 1.000 €. Et nous ne parlerons pas des pièces de collection pouvant coûter 6.000 € !

Si la matière première est peu onéreuse, le temps consacré à la confection d’un panama peut expliquer son prix. Mais, comme dans beaucoup de pays dits tiers, la mondialisation aidant, les producteurs bénéficient d’une très faible part du prix de revente de leurs réalisations. Un Montecristi Superfino demandant cinq à six mois de tressage est acheté 5 à 6 $ à son fabricant pour être vendu à l’étranger plus de 500 $. Quel artisan en Europe ou en Amérique du Nord accepterait que le fruit de six mois de travail soit acheté à un prix dérisoire et revendu au minimum cent fois plus cher ?

Nouvelle donne, les Chinois dévorent le marché du panama en produisant mécaniquement des chapeaux synthétiques vendus à bas prix et qui n’ont absolument rien à voir avec le sombrero fino de paja toquilla. Du coup, les Equatoriens ne trouvent plus leur compte à tresser des panamas et le savoir-faire est de moins en moins transmis. Ainsi, les nouvelles générations préfèrent tenter leur chance en immigrant. A Chiquindad, canton de Cuenca, neuf familles sur dix ont des parents à l’étranger. Une réelle menace pèse sur le panama car toute la transmission des savoir-faire est orale. A supposer qu’il soit organisé un plan de sauvetage de cet artisanat en lui assurant des revenus corrects, en dessous d’un certain seuil de production il n’est pas possible de former correctement les nouvelles générations et les vieux ne sont pas éternels...

Ici comme ailleurs, le salut vient des femmes. Maria Rosa Auelia Salinas, presidente de l’Associacion de Toquillieras Maria Auxiliadora, soutenue par le Fonds de développement Canada-Equateur de l’ACDI, a poussé les femmes à innover en créant de nouveaux modèles et à chercher l’excellence en se donnant pour devise « La calidad esta en mis manos. » Carola Ríos (coordinadora de la Corporación de Promoción des Exportaciones del Sombrero Panamá) pense qu’une façon d’éviter l’extinction du panama consiste à miser sur le chapeau de collection et incite les jeunes à apprendre à le tresser. Les regroupements en coopératives permettent aux producteurs de négocier de meilleurs prix de vente.

Mais il n’en demeure pas moins que tout cela est bien fragile face aux enjeux de la mondialisation. Ainsi ne serait-il pas idiot, notamment en période de réchauffement climatique, d’accomplir un geste altermondialiste en investissant dans un sombrero fino de paja toquilla. Le Cuenca vendu autour de 60 € pour une durée de vie annoncée de deux ans peut voir sa longévité doublée s’il est porté et conservé dans de bonnes conditions. Ce n’est évidemment pas un increvable Stetson, mais il est bien plus agréable à vivre et véhicule d’autres valeurs !

Azür

Cuenca : http://www.tv5.org/TV5Site/dotclear/index.php/Equateur-centre-historique-de-cuenca

Chiquidad : http://chiquintad.com/contenido.aspx?mid=1&sid=2


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3 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 11 juin 2007 11:33

    Tu aurais pu dire que Gasty en a porté un smiley en ce moment il a une casquette de djeun ....


    • jakback jakback 11 juin 2007 12:01

      @ l’auteur

      Chapeau !!!


      • Azür 12 juin 2007 13:44

        Oui, il est temps de passer à autre chose, parce que les Histoires du Petit Nicolas, y-en a raz la casquette !!! smiley

        J’ai volontairement réduit la taille de l’article car d’autres m’ont été refusés sur Agoravox parce qu’ils étaient trop longs, ainsi n’ai-je pas développé les « aspects techniques » du panama.

        Pour répondre à Léon :

        -  Léger : Oui, le panama est un chapeau d’une extrême légèreté, au point qu’il se fait oublier. Enfin, si on a encore assez de cheveux en dessous. Cependant, il est idéal pour les chauves car son tissage laisse respirer le cuir chevelu.

        -  Infroissable et indéformable : Tout dépend du type de panama choisit. Il en est actuellement dont la forme est figée par des apprêts, pour des besoins d’esthétique. D’une manière générale, excepté les modèles apprêtés, plus le tissage est fin, plus le chapeau est souple. Les modèles les plus souples sont vendus dans une boite en balsa. Le modèle colonial, avec son pli marqué au sommet est le plus aisément pliable. Les cuencas, moins souples supportent d’être pliés en Equateur, mais dans des contrées où l’hygrométrie est plus basse ils n’apprécient pas cet exercice.

        -  Acheter en France : Je m’abstiendrai de donner des liens de sites commerciaux que vous pouvez trouver tout seul sur la toile. Rendez-vous aussi sur les pages jaunes car il existe encore des chapeliers qui ont pignon sur rue. Un vrai panama sent la paille et on peut observer à son sommet la rosace témoignant d’un tissage manuel.

        P.S : Tous les panamas non apprêtés sont comme les chats : ils ont besoin d’eau (brumisée) en période de forte chaleur et ne supportent pas de rester en plein soleil dans la voiture...

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