Faut-il supprimer les taxis parisiens ?
Guerre taxis-VTC, licences à prix trop élevé, taxis introuvables quand on a besoin, interdictions et obligations à tout-va, circulations bloquées, amortissements trop difficiles, contraintes de possession de licences trop longues, environ 20.000 taxis parisiens, mais des clients qui en cherchent en vain. Ce n'est même pas un résumé, ce n'est qu'un exemplaire des critiques qu'on entend quand on aborde le problème des taxis parisiens.
Mais quelqu'un a-t-il entendu poser le problème de la fonction du taxi ? A quoi sert un taxi ? En quoi est-il une nécessité ? Voire, en quoi a-t-il une utilité ?
Un taxi n'est qu'un élément de la fonction transport.
Il vient en complément
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des transports en commun (bus, train, tram, bateaux, etc.),
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des moyens de transports privés (auto, deux roues, etc.)
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et des moyens de transport partagés (autolib, covoiturage, auto-stop, …).
L'arrivée de nouveaux moyens de transport est probable avec les véhicules autonomes (cf. Google), sans compter les drones ne serait-ce que pour les colis.
Avec tout ça, a-t-on besoin de taxi ?
Quand les voitures seront devenues autonomes, les taxis le seront peut-être aussi, et donc les conducteurs n'auront plus d'utilité.
Mais en attendant, regardons la joie du métier de taxi.
Car vu le tintoin soulevé par la concurrence des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) qui leur dispute le client, il faut penser que taxi est un beau métier.
En fait, pas vraiment. Il ignore ce qu'il va gagner, mais il sait qu'il doit rembourser les frais d'installation qui avoisinent le prix d'un appartement.
Il passe sa journée au volant, attendant qu'une course arrive, et elle vient quand les embouteillages le condamment à aller au pas, mais pas quand la circulation est fluide.
Pour s'installer, il doit passer un examen, acheter une licence à un futur retraité, ou attendre des lustres pour en obtenir une gratuitement. De toutes façons, il devra attendre plus ou moins longtemps pour la revendre. Et tant pis s'il s'aperçoit entretemps qu'il a ailleurs une opportunité pour s'éclater dans la vie. Il est entravé à son métier comme un vulgaire serf de l'ancien régime.
On peut étudier le problème sous l'angle des composantes économiques :
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la composante demande : la demande dépend du besoin (le client veut se déplacer) et du choix des autres solutions (les autres transports sont-ils compétitifs et disponibles ?). Le prix et la durée figurent parmi les critères. Un cadre avec notes de frais est plus dépensier qu'une personne qui paie de sa poche pour rentrer le soir après le travail ou après le spectacle ou lors de ces incidents ferroviaires récurrents.
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la composante offre : c'est la quantité de taxis disponible pour effectuer un trajet entre deux points quelconque dans l'aire étudiée. Actuellement, l'offre est réduite par la réglementation qui restreint notamment les zones géographiques et les durées de service. Elle est aussi réduite par l'état lamentable de la circulation avec la volonté des politiques de freiner les citoyens (ralentisseurs, limites de vitesse à 30 km/h, radars dissimulés ou ambulants)
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la composante complémentarité : c'est la correspondance entre la demande et l'offre.
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Pourcentage de taxis occupés (vs en attente)
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Pourcentage de clients chargés (vs sans taxi)
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demande non exprimée : client persuadé de ne pas trouver de taxi, ou de subir une durée de trajet trop long, ou d'avoir une facture trop élevée
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la composante rentabilité envisagée : c'est la spéculation du gain envisagé lors de la demande de la licence. Suivant le statut (salarié, locataire, artisan, sociétaire d'une coopérative), les charges varient. Les charges fixes sont : la licence, l'achat et l'entretien de la voiture, l'assurance, l'abonnement radio, le carburant, les cotisations sociales, les frais bancaires, le comptable, le téléphone, les impôts. Vu ce qu'il reste ne fin du mois, on peut suspecter que la plus-value sur la revente de la licence est lorgnée : l'acquisition se montait à 60.000 euros en 1995, 90 000 € en 1999, 105 000 € en 2003, 180 000 € en 2007, plus de 200 000 € en 2013-2014
On peut étudier le problème sous l'angle des composantes service rendu :
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la composante plus-value : c'est l'apport du taxi par rapport aux offres concurrentes (disponibilité, vitesse, sécurité, personnalisation, …)
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la composante accès au service : c'est la mise à disposition du service suivant l'heure et le lieu
On peut étudier le problème sous l'angle des composantes contraintes extérieures :
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la composante concurrence : parmi elle, c'est la venue des VTC, sans examen, sans licence, sans contrainte géographique
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la composante réglementaire : le secteur est ouvert depuis 1865, contingenté par le Front Populaire ; depuis 1973, les licences peuvent être officiellement revendues (Entretemps on tolérait le marché noir ?) ; la préfecture de Paris attribue un certain nombre de licences gratuitement suivant son bon plaisir et ses supputations
Alors ?
Le constat de l'état actuel est rapide. Il ne satisfait personne, ni les conducteurs ni les clients.
Quels sont les pistes d'améliorations ?
D'abord, pourquoi toute cette réglementation ?
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l'examen national est-il indispensable ? Qu'apporte-t-il ?
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Ses épreuves sur la sécurité !!!?
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son code de la route ! Quoi de plus qu'un permis normal ?
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Son épreuve de gestion !!!
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son épreuve locale sur les rues de Paris, les monuments et les itinéraires ! A l'heure des GPS !!!
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et son épreuve de conduite avec trois examinateurs de la préfecture de police, qui demandent de trouver un itinéraire en dix minutes. A quand une épreuve avec trois fonctionnaires pour chronométrer la réactivité d'un postulant garçon de café ? Ou le changement de robinet pour un plombier ?
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La licence a-t-elle un sens ?
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Sa mise en place est un réflexe malthusien du personnel politique. Son maintien est un signe du corporatisme du personnel administratif enorgueilli d'une parcelle de pouvoir quitte à dégrader l'activité économique
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mais sa suppression brutale pénaliserait ses détenteurs
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Les contraintes géographiques sont-elles justifiées ?
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Pourquoi interdire telle zone ? Le client a des besoins. Il n'est pas limité à un territoire. Quoique. Je n'aurais pas dû en parler. Je pressens que bientôt les politiques aidés des technocrates nous rétablirons ce genre d'interdiction moyenâgeuse .
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Le numérus clausus est-elle nécessaire ?
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Sans aller jusqu'à dire que fixer des limites est l'oeuvre de personnes bornées, on peut avancer que ça ne répond pas à la situation déficiente actuelle, que ça va à l'encontre du bien général, que ça paraît contribuer au blocage de la situation et que ça ne semble pas pousser à l'innovation mais au contraire à la stagnation technique, économique et sociale, et que ça dénote vis à vis du libéralisme ambiant qui est pourtant si porté aux nues par nos élites quand il s'agit de mettre à pied les salariés
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Mais là encore, sa suppression brutale pénaliserait les conducteurs de taxis
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La circulation peut-elle être améliorée ?
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une circulation plus fluide accroîtrait la rentabilité des taxis et la satisfactions des clients. Mais il ne faut pas réver. Ca va à l'encontre de la culture des politiques qui veulent tout ralentir, tout freiner, tout interdire et tout taxer. Les politiques ont une position de censeur, pas de constructeur ni de conquérant. Ils n'ont pas terminé de déployer radars et autres machines à sous répressives. Le baron Haussmann est mort et bien mort. L'électoralisme, plus que le clientélisme, les contraint à une vision parcellaire et limitée dans le temps.
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Alors, quelles pistes choisir ?
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supprimer la réglementation inutile
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l'examen est superflu (superflu est d'ailleurs la seule chose super que j'ai trouvé dans ce problème)
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les contraintes géographiques également, de même que le numérus clausus et la licence. La question n'est plus « faut-il les conserver ? » mais « comment les supprimer sans spolier les concernés ? »
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améliorer la circulation
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comment ? En réalisant ce que Napoléon III a fait au 19ème siècle avec moins de moyens que nous au 21ème siècle : des axes rapides et adaptées, de grosses artères secondées d'artères moyennes, et une desserte rapide du territoire. Mais il faudrait passer outre les bobos anti-voiture et les bénéficiaires d'avantages catégoriels et locaux.
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Bref, la situation est insoluble. Il ne reste plus qu'à attendre que dans ce domaine, comme dans les autres, un acteur étranger déboule et chamboule tout. Il sera américain, indien, bref étranger, avec une expérience indiscutée et quasi monopolistique. Et après un baroud d'honneur, on lui cédera la place, en laissant
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sur le carreau les conducteurs au chômage (sans indemnité parce que travailleurs indépendants),
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les dividendes s'exiler
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et les profits réalisés partir en échappant au fisc.
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