Formation continue : hold-up permanent des syndicats !
La formation continue, enjeu majeur pour les Français ? Si elle apparaît comme telle dans la bouche des politiques, la réalité est consternante. Dans un monde globalisé, il est pourtant essentiel que chacun puisse acquérir de nouvelles compétences tout au long de sa vie professionnelle. Les opportunités sont nombreuses pour ceux qui savent exploiter correctement leurs talents, et la formation continue est un outil idéal pour y parvenir.
Depuis le départ, nos gouvernants ont privilégié un modèle bureaucratique de formation continue, faiblement utile et très coûteux. Les sommes en jeu pesant pourtant 1,43 % du PIB, ce n’est pas un engagement marginal, même si nous étions à 1,9 % du PIB il y a 13 ans. Récemment, nos élus sont allés un cran plus loins en réfléchissant au concept de "passeport des compétences". S’ils n’ont jamais mis les pieds en entreprise, ce sont des dieux lorsqu’il s’agit de multiplier les administrations. Car il faudra du monde pour assurer le suivi, la validation et le contrôle de celles-ci, ce dont les entreprises n’auront bien entendu que faire. Encore un trou à venir dans le pouvoir d’achat des contribuables, mais une bonne manière de caser des fonctionnaires en mal de reconversion.
Alors qu’il finance 20 % de l’ensemble, l’Etat ne sait pas combien il verse, à deux milliards d’euros près. Trois sources, trois chiffres différents qui varient entre 3,7 milliards et 5 milliards d’euros ! Il y a peut-être une formation à assurer au sein même des administrations avant qu’elles se permettent de se mêler ainsi de la vie professionnelle des autres. Diverses administrations versent 13 % de l’ensemble et cela ne doit pas être simple non plus. En bout de chaîne, ce sont les entreprises, contraintes, qui versent 44 % du coût total de la formation continue. Elles signent leur chèque libératoire et ne s’impliquent pas dans les arcanes du système qui ont été parasitées depuis longtemps par des experts.
"L’activité de formation continue et son financement se caractérisent par une grande opacité". Sur ce constat sans concession, Michel Bouvard, rapporteur du rapport de la Cour des comptes, n’hésite pas à brocarder le fait que "la méconnaissance de l’activité de formation continue, de ses publics, de son coût, de son financement et de ses résultats, tant dans les universités elles-mêmes qu’au niveau ministériel".
Si les cent OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés, par organismes paritaires entendez les syndicats), aux contrôles "mal définis ou peu opérants", prennent des frais de gestion officiellement plafonnés à 9,6 % de la collecte, certaines associations locales prélèvent jusqu’à 25 % de la masse collectée pour leur "fonctionnement". Fonctionnement bien étrange et que les audits ont eu du mal à saisir. Précision du rapport : "Rares sont les organisations professionnelles qui présentent de véritables justificatifs, même plus ou moins détaillés, correspondant à des services effectivement rendus.". Si 20 millions d’euros sont officiellement versés aux confédérations syndicales par le Fongefor (Fonds national paritaire de gestion de la formation continue), on imagine que plusieurs milliards d’euros de ces frais de gestion de la collecte vont directement financer ces confédérations le plus librement du monde. Aucun politique n’a le courage d’aller y mettre son nez. La CGPME se sert aussi dans la caisse : lorsque les sommes ne sont pas dépensées, elles constituent parfois des "réserves ou provisions (...) irrégulières". C’est du joli !
Plus grave, les organisations qui bénéficient de la collecte, déduction faite des "frais de collecte", appartiennent aussi à cette étrange nébuleuse paritaire. Elles font travailler 135 000 animateurs dans la plus totale opacité. Dans cette jungle, même l’université d’été d’ATTAC est agréée : on y incite les participants à déclarer cette participation comme de la formation continue afin que les collectivités territoriales (puisque le public d’ATTAC vient essentiellement de la fonction publique) prennent les frais d’inscription à leur charge, enfin à la charge du contribuable. Bref, si personne n’est allé auditer la qualité et le fond des formations proposées et ainsi financées, rien que le fait d’évoquer la question semble donner des sueurs froides à la CFDT. Au PS comme à l’UMP, les voix s’élèvent pour améliorer le fonctionnement du système. C’est hélas sans espoir tant qu’une telle usine à gaz perdurera.
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