Gordon Brown, sauveur du monde !
"Nous n’avons pas seulement sauvé le monde"... Ce formidable lapsus de Gordon Brown à la Chambre des Communes le 10 décembre dernier (vidéo en fin d’article) a coïncidé avec le record historique de baisse de la Livre Sterling vis-à-vis de l’Euro et par les avertissements du "shadow " Chancelier Osborne selon lesquels "une monnaie faible est le signe d’une économie faible et d’un gouvernement faible"... Alors que les Credit Default Swaps sur la Grande Bretagne ont pratiquement doublé jusqu’à 110 en un mois, la devise britannique a baissé jusqu’à 88 pence pour 1 Euro, soit 30 pence de plus qu’il y 8 ans.
Certes, nos amis d’Outre Manche invoquent-ils le différentiel de taux d’intérêt légèrement favorable à l’Euro puisque ce dernier rémunère à hauteur de 2.5% alors que les taux officiels britanniques sont, à 2%, à leurs plus bas niveau depuis 57 ans. Cependant, investisseurs et analystes anticipent en Grande Bretagne une récession plus grave que dans l’Union Européenne car l’économie y est nettement plus dépendante des secteurs financiers et immobiliers que l’économie de l’Union, nettement plus diversifiée notamment dans le domaine industriel. Par ailleurs, les marchés qui tiennent en estime la Banque Centrale Européenne, ont au même moment une piètre opinion de sa consoeur britannique et des mesures de Brown -telles que la baisse de la T.V.A.-, taxées de machines à creuser les déficits...
" Iriez-vous vraiment acheter un lecteur DVD car il vaut à présent £ 39.10 au lieu de £ 39.90 ?", telle est en effet la question - légitime - posée par le Ministre Allemand des Finances Steinbruck dans une interview accordée à Newsweek, question qui doit être interprétée comme une critique à l’encontre de ce stimulus fiscal britannique à l’effet plus qu’incertain et dont les conséquences néfastes sur l’endettement public devront être assumés par la génération à venir.
La devise britannique a totalement perdu son statut de monnaie de réserve car les banques centrales mondiales lui préfèrent - dans cet ordre - le Dollar, l’Euro et le Yen. En d’autres circonstances, cette chute de la Livre - qui devrait encore s’affaiblir jusqu’à atteindre la parité contre Euro - aurait eu de sérieuses implications inflationnistes mais ces conséquences sont très largement diluées dans la conjoncture déflationniste que l’on connaît aujourd’hui. Toujours est-il que cette chute de la Livre aurait également pu amoindrir l’ampleur et la durée de la récession en Grande Bretagne : Souvenons-nous en effet des conséquences de la sortie forcée de la Livre du Système Monétaire Européen le 16 Septembre 1992.
En réalité, ce "mercredi noir" avait marqué la fin de la récession britannique et inauguré une longue période de forte croissance économique, croissance qui avait dépassé par la suite celle de la zone Euro ! Il est vrai que la compétitivité de l’industrie exportatrice britannique avait été à l’époque très nettement favorisée par la dégringolade de la Livre Sterling. Pourtant, la situation est sensiblement différente de nos jours car l’affaiblissement de la Livre ne profite quasiment plus à une industrie nationale décimée, les usines britanniques encore opérationnelles achetant et facturant du reste dans leur majorité en Euros...
La lente descente aux enfers de la Livre, tout en ne profitant plus que très partiellement à l’économie du pays, est donc d’abord le reflet d’une perte de confiance progressive des investisseurs internationaux dans les obligations d’Etat britanniques du fait d’un endettement public massif. Effectivement, les rendements britanniques étant actuellement ce qu’ils sont, où est l’intérêt de l’investisseur étranger si, par surcroît, la Livre perd de sa valeur ?
Gordon Brown, qui a fait redécouvrir à son pays les vertus du Keynésianisme, doit donc revoir sa copie et freiner ses ambitions d’injections massives de liquidités et dans le système bancaire et dans l’économie britanniques. S’il suffisait de s’endetter et de creuser les déficits pour sortir une économie du marasme, cela se saurait...
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