Grand emprunt : comment développer l’économie numérique en France ?
Les NTIC sont-elles le parent pauvre des investissements ? Forte de ses fleurons économiques dans l'aéronautique, l'énergie ou les BTP, la France n'investit pas suffisamment dans l'économie numérique, un secteur pourtant stratégique. Le Grand emprunt pourrait modifier cette tendance avec des investissements en direction de ce qui fera l'économie de demain.
Annoncé en décembre 2009, le Grand emprunt porte sur cinq priorités stratégiques qui constituent les "Investissements d'avenir" identifié par le gouvernement. Le point sur le volet numérique de ce dispositif, un secteur clé pour la compétitivité française.
Décidé dans la foulée du plan de relance, le programme "Investissement d'Avenir" s'inspire des recommandations proposées en novembre 2009 par la Commission sur le Grand emprunt national présidée par Alain Juppé et Michel Rocard : pour minimiser l'endettement public et dynamiser l'économie sur le long terme, la France doit investir dans des secteurs économiques stratégiques.
Ce dispositif porte sur une enveloppe de 35 milliards d'euros répartis en cinq priorités stratégiques : enseignement supérieur et formation (11 milliards d'euros), recherche (7,9 milliards d'euros), filières industrielles et PME (6,5 milliards d'euros), développement durable (5,1 milliards d'euros), et économie numérique (4,5 milliards d'euros). Dans chacune des priorités stratégiques, les financements sont attribués par appels d'offres selon un mécanisme conçu pour minimiser l'endettement. En effet, 13 milliards d'euros sont collectés par le remboursement des fonds publics prêtés aux banques lors de la crise financière, tandis que 22 autres milliards proviennent des emprunts lancés par l'Agence France Trésor.
Parmi les cinq priorités stratégiques, le numérique a été identifié par la Commission Juppé-Rocard comme un secteur disposant d'un important effet de levier. "En plus de constituer un secteur porteur de croissance et d’emplois, le numérique a un impact diffusant sur le reste de l’économie, en contribuant à améliorer la compétitivité globale de l’industrie et des services et en étant le support d’offres innovantes dans tous les secteurs", note le rapport de la Commission.
Lancé pour l'occasion, le Fonds national pour la Société Numérique est chargé d'identifier les projets pertinents et les doter des 4,25 milliards d'euros dédiés à l'économie numérique, dont 2 milliards d'euros pour le "développement des réseaux à très haut débit" et 2,25 milliards d'euros pour le "soutien aux usages, services et contenus numériques innovants".
Les Investissements d'Avenir ambitionnent de placer la France parmi les leaders dans les usages et les services innovants dans le numérique. Parmi ces usages et services, le cloud computing. L'"informatique en nuage" consiste à distribuer à distance et à la demande des contenus et des usages informatiques sans recours aux logiciels. Les réseaux, les contenus et les logiciels sont externalisés par des prestataires extérieurs.
Des plateformes comme Deezer ou Spotify pour la musique ou Google Docs pour la bureautique sont déjà dans le cloud computing. Mais les potentiels de cette technologie en terme d'infrastructure des réseaux sont immenses. Amazon, Google et IBM sont dans la course pour la création de clusters, immenses centres de calculs ou d'hébergement. Le New York Times de son côté utilise les services d'Amazon pour stocker ses archives en ligne, tandis qu'IBM lance ses centres continentaux de cloud computing, dont un en Irlande pour couvrir l'Europe.
Le could computing peut donc conduire à une rupture importante dans le secteur de l'informatique en assurant la transition des systèmes informatiques et des activités commerciales (service d'hébergement de serveurs, création de logiciels collaboratifs, etc.) vers un nouvel écosystème informatique. L'enjeu pour la France sera de disposer d'infrastructures de cloud mutualisé afin d'atteindre une taille critique qui révèle toute la potentialité de cette révolution informatique et garantisse sa pérennité. Mais surtout, cette technologie permettrait de disposer de capacités de stockage et de puissances de traitement considérable à des fins de recherche scientifique notamment.
Autre usage numérique sur lequel la France doit investir : la numérisation d'un patrimoine immatériel menacé de dégradation. Dans le cadre du volet numérique des Investissements d'Avenir, la numérisation et la valorisation des contenus culturels, scientifiques ou éducatifs vont renforcer le développement de nouveaux modes de distribution pour des contenus dématérialisés, tout en rendant économiquement rentable l’exploitation de contenus aujourd’hui inexploitées. C'est dans cet esprit que la Bibliothèque nationale de France (BnF) a lancé le 6 juillet dernier un "appel à partenariat pour la numérisation et la valorisation de ses collections".
Disposant de collections d'une très grande valeur patrimoniale, la BnF ne peut assurer seule la numérisation et la mise à disposition des collections sur Gallica, sa bibliothèque numérique. Afin de garantir la conservation des collections tout en favorisant l'accès du public au patrimoine immatériel, la BnF fera porter sur un ou plusieurs partenaires privés le coût et la réalisation des numérisations, ainsi que leur catalogage et leur stockage numériques.
Ces fichiers sont classés en douze corpus qui révèlent toute la richesse et la variété des collections de la BnF. Parmi ces corpus, on peut relever des livres anciens de 1470 à 1700, des titres de presse, des documents audiovisuels, notamment des disques 78 tours, ainsi que des collections spécialisées dont des manuscrits médiévaux, des portraits, des cartes, des partitions ou des fichiers généalogiques.
Cloud computing, numérisation des archives, e-services, sécurité des réseaux informatiques, systèmes de transport intelligent : autant de secteurs numériques dans lesquels la France doit investir pour créer croissance et emploi. Sans parler de l'effet de lever attendu de ces partenariats public-privé : pour un investissement initial de 4,25 milliards d'euros, l'effet final attendu en terme d'investissement et de 8,5 milliards d'euros.
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