L’innovation financière : une malédiction ?
Effet de levier, produits dérivés dits « exotiques », marchés à terme, titrisation...Doit-on se méfier de certaines innovations financières ou l’ensemble de la Science Financière se doit-elle d’être considérée avec circonspection dès lors qu’elle innove ? Impossible en effet de cautionner la sophistication - voire l’esprit décadent - de certains produits financiers dont l’unique objectif est trop souvent l’enrichissement d’une certaine caste soucieuse néanmoins de conserver une apparence de moralité mais est-il judicieux pour autant de vouer aux gémonies l’ensemble des inventions financières ayant jalonné l’amélioration de notre niveau de vie ?
Après tout, nul ne songe à condamner internet pourtant à la base de l’implosion de la bulle des valeurs technologiques en 2000 ? Par ailleurs, le principe de la société anonyme et de la capitalisation boursière n’avait-il pas été accueilli avec grande méfiance au 19ème siècle par ceux qui étaient persuadés qu’il permettrait l’émergence d’entrepreneurs prompts à se défiler de leurs responsabilités ? La responsabilité personnelle illimitée étant de mise à l’époque, comment envisager aujourd’hui le fonctionnement du monde économique et des affaires sans sociétés anonymes et sans Bourse ?
Le crédit excessif - cela a été maintes fois répété - est à l’origine de la frénésie immobilière dont la déliquescence a abouti à la crise actuelle mais l’expansion du crédit dégénère-t-elle systématiquement en bulle spéculative ? Ne serait-ce pas plutôt à partir du moment où un titre se transforme en un titre de titres que le Banquier se croit invulnérable et que tout espoir commence à être vain ? Car en effet toutes les innovations financières ne se valent pas : L’accès facilité et traditionnel au crédit fait incontestablement progresser la société dès lors que l’usage qui en est fait permet d’acquérir son logement ou de financer des études mais ce même crédit dispensé à travers des produits raffinés devient dévastateur s’il permet de spéculer en Bourse ou d’adopter des comportements irrationnels et dénués de toute justification économique.
Ainsi, tandis que la Finance peut effectivement rendre notre monde meilleur en permettant aux plus démunis d’améliorer légitimement leur niveau de vie, elle se transforme en arme de destruction massive dès lors que certains en font un usage dévoyé ! Est-ce l’innovation financière ou ses applications spécifiques - amplifiées par l’appât du gain et l’immoralité d’une minorité active - qui sont nocives au système et à la société ?
Et si les éléments constitutifs de la Finance comme la gestion du risque, les arbitrages, les allocations d’actifs étaient intrinsèquement porteurs d’un virus aboutissant quasiment toujours à une déviance du système ?
En d’autres termes, et si la raison d’être même de cette innovation financière était nuisible à la société car, en effet, ces nouveaux produits financiers n’ont-ils pas d’abord été conçus pour "tuer" la compétition tout en prenant de vitesse le régulateur ? Des entreprises comme Goldman Sachs ne dépensent-elles effectivement pas des centaines de millions sur des programmes de conception de produits et de techniques complexes précisément afin de "battre le système" ? Innovation financière et gestion déloyale sont-elles finalement si éloignées ?
A ce niveau, quel est véritablement l’apport de l’innovation financière au bénéfice de l’économie réelle ? Car alors qu’elle ne bénéficie que marginalement à la société durant les périodes fastes, sa capacité de nuisance est indéniablement catastrophique dès lors que le train déraille !
9 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON