La crise politique des subprimes
Les groupes Citi et Merrill Lynch ont donc récolté plus de 21 milliards de dollars de capitaux frais - provenant principalement de l’extérieur des Etats-Unis - pour assainir leur bilan et résorber les trous béants causés par la crise des subprimes. Citigroup a dû annoncer des dividendes en baisse de 40 %, une perte de près de 10 milliards de dollars au 4e trimestre 2007, des pertes totales à ce jour de 18 milliards de dollars du fait de l’actuelle crise du crédit, des prévisions de 37 milliards de dollars de pertes supplémentaires en relation avec des crédits subprimes qui ne seront pas remboursés.
Nul n’est capable de prévoir la fin de la crise, mais le phénomène le plus marquant est néanmoins cet afflux de capitaux provenant massivement du Moyen-Orient et d’Asie. Ainsi, ces 14,5 milliards de dollars levés par Citigroup et ces 6,6 milliards de dollars levés par Merrill Lynch constituent le plus important transfert de capitaux jamais effectué à destination de banques américaines émanant de l’étranger. En fait, cette gourmandise de sociétés américaines pour des capitaux étrangers, ne s’étant plus manifestée à de telles échelles depuis la première guerre mondiale, va certainement commencer à poser des problèmes politiques fondamentaux, notamment en regard de l’emprise désormais substantielle d’intérêts étrangers sur le système bancaire américain.
La semaine dernière, le groupe suisse UBS a également récolté près de 12 milliards de dollars du fonds souverain de Singapore et d’investisseurs moyens-orientaux. Le groupe Morgan Stanley et le groupe Barclays ont eux aussi reçus 5 milliards de dollars chacun à ce jour du fonds d’investissement d’Abu Dhabi, de la China Investment Corporation, de la China Developpment Bank et du Fond Temasek de Singapore. Pourtant, ces récentes mesures de sauvetage n’ont pas contribué à lever l’angoisse des investisseurs qui ont fait perdre la semaine dernière près de 7,5 % et de 5,5 % respectivement aux actions de Citi et de Merrill Lynch pour ne citer qu’eux...
D’une manière générale, les valeurs bancaires sont dans l’œil du cyclone : la Citibank, par exemple, souhaiterait attirer encore près de 12,5 milliards de dollars de nouveaux capitaux avec, à la clé, des suppressions de 4 200 emplois. Un nouvel appel sera donc lancé en direction du fonds d’investissement de Singapore, mais également vers le fonds d’investissement de Kuwait ainsi que vers un des plus gros actionnaires de Citibank, le prince saoudien Ben Talal. L’objectif de ces appels répétitifs en capitaux étant de garantir à la banque une capitalisation lui permettant de réussir à maintenir le cap dans le cas d’une récession sévère qui pourrait sévir aux Etats-Unis. Au même moment, le groupe Merrill Lynch compte encore amasser quelques 6 milliards de dollars prochainement s’adressant pour cela au fonds souverain de Corée du Kuwait et à la banque japonaise Mizuho.
Comme on le constate, cette crise des subprimes ayant éclaté en août 2007 continuera encore pendant de longues années à produire des effets pervers. Certes, pour le moment, c’est surtout la crise financière qui prédomine, mais on devine déjà la crise politique qui, elle, ne sera pas moindre. Pendant ce temps, le monde de la finance américaine et européenne est le témoin impuissant d’une authentique révolution silencieuse.
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