La descente vers le SMIC à 400 euros a commencé...
Le premier recul de la scolarisation en France depuis le Moyen Âge conduit inéluctablement à une baisse forte des salaires. Quelle que soit l’opinion que l’on a sur l’apprentissage à 14 ans, une chose est sûre : le niveau de scolarisation en France est en train de reculer.
La génération au pouvoir maintenant est donc à l’origine du premier recul de la scolarisation en France depuis le Moyen Âge.
Ce qui est en ligne, c’est une étude récente de l’OCDE, qui place le système scolaire français au 15e ou 16e rang mondial, à peu près au niveau de la Croatie, loin derrière Singapour, le Japon ou la Corée. Cela correspond à une étude sur l’Italie, très semblable à la France sous bien des rapports, dont les résultats publiés cette semaine évaluent à 36% la proportion d’Italiens fonctionnellement analphabètes.
En même temps, je lisais cette semaine un supplément récent du journal Libération, dont la page la plus intéressante, à mon sens, rapportait que le SMIC varie en Europe (approximativement) de 150 euros (Estonie) a 1400 euros (Luxembourg). Le niveau moyen pondéré doit se trouver aux alentours de 400 euros, proche du salaire du PPP (proverbial plombier polonais, sans vouloir manquer de respect à qui que ce soit). Le SMIC en France est de 1100 euros. Le journal n’en tirait guère de conclusion logique.
Mais soyons justes (au niveau européen) : si vous avez un apprenti qui, à 14 ans, peine à suivre (traduire : ne sait pas lire) un système scolaire au niveau de celui de la Croatie, pourquoi voudriez-vous que le salaire qu’il touche (s’il trouve un emploi) soit bien supérieur au salaire moyen de base européen soit 400 euros ?
Le salaire d’un jeune sans formation pourrait-il être supérieur au niveau européen moyen grâce à :
- une forte productivité en France. Vous pouvez oublier : un employé d’EDF génère par an 8 410 euros de valeur ajoutée. En Allemagne, l’employé d’E.ON (l’EDF allemand) génère 62 240 euros de valeur ajoutée par an.
- une haute technologie. Vous pouvez oublier : la France dépose 34 brevets par an par million d’habitants en moyenne, contre 74 en Allemagne et 88 au Japon. Ce qui est publié en ligne, avec un effort de recherche minimal : 1.36% du PIB, contre 2.38% au Japon (1.80% aux US). Les dépenses d’éducation par étudiant sont également faibles : 8 800 euros par an en France, contre 22 300 euros aux États-Unis.
- un recours massif à l’emprunt : vous avez raison. La Commission européenne publie aujourd’hui ses prévisions, et estime le déficit budgétaire à 3.5% en France en 2006 et 2007. Les économistes des grandes banques françaises, lorsqu’on ne les convoque pas au Trésor pour les rappeler à l’ordre, tablent sur des déficits de 8% à l’horizon 2010, à politique sociale inchangée. (Cry for me Argentinaaaa...)
Tout ceci n’est guère une surprise, puisqu’en France les retraites à elles seules représentent 12.70% de PIB, contre 7.40% au Japon et 4.36% aux États-Unis. Le ratio dépense de retraites/dépenses de recherches est donc de 9.30 en France contre 3.17 au Japon et 2.42 aux États-Unis, ceci alors que le vieillissement de la France vient seulement de commencer. Comme la recherche d’hier crée les emplois d’aujourd’hui, il résulte, sans que ce soit la seule cause, j’en conviens, un taux de chômage pour les jeunes de 21.7% en France (40% dans les cités en flammes).
Tout cela pour dire que lorsque la machine à faire des dettes s’arrêtera (elle serait déjà arrêtée si l’on respectait les critères de Maastricht, il faudra attendre une baisse de notation ou plus probablement un semi-défaut sur la dette), les jeunes ne trouveront de l’emploi qu’à des niveaux proches de la moyenne européenne, soit 400 euros (ce qui est un poil mieux que le RMI). Laissons glisser le long de la courbe du travail quelques années, et cela vaut probablement 20% de PIB en moins (ce qui n’est guère qu’une dévaluation pour ceux qui ont connu le franc avant l’euro). Ceux qui aiment faire des calculs pourront en déduire des impacts intéressants sur le déficit de la sécurité sociale, les retraites, la politique agricole, le ratio endettement/PIB, les prix de l’immobilier. Certains économistes prévoient d’ailleurs déjà des scénarios de déflation en France dès 2006.
Des alternatives : il n’y en a guère, et elles sont à long terme. La France est tombée de l’avion et elle peut juste prendre le suivant... avec les Polonais, les Croates, s’il reste de la place, car il y a beaucoup de passagers indiens et chinois... Serrez bien la ceinture du parachute.
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