La liberté économique ?
A l’heure où notre président renoue avec le chantage à l’emploi avec des mots qui fâchent, où va nous conduire la liberté économique ?
Cette liberté ne peut donc s’évaluer qu’au travers des systèmes d’autorité censés préserver l’individuation tout en maintenant la solidarité organique qui est la nôtre avec pour objectif de faciliter l’intégration sociale.
Ce sont toutes les formes insidieuses qui vont conduire (dans un souci de préserver de manière générique la liberté individuelle), à son conditionnement contre son propre intérêt subjectif au sein d’un cadre communautaire ou sociétal pour le bénéfice de quelques élites particulières. Élites qui s’installent dans un système dominant autogénéré qui propose son image de la liberté subjective à laquelle chacun doit s’identifier, avec pour conséquence une désocialisation par l’exclusion due au rejet des différenciations et des résidus de la compétition.
Le plus important des systèmes d’autorité est aujourd’hui le néolibéralisme économique. Il bénéficie de l’aura attachée à la subjectivité de la liberté ainsi que de toutes ses ambiguïtés. Il propose des régimes démocratiques fondés sur un droit définissant les limites de la liberté arbitraire par des références profanes (laïcisme) ou sacrées (religions) afin d’aboutir à une liberté positive individuelle publique. Mais il revendique également l’exercice la liberté arbitraire des individus dans le cadre des relations économiques pour entreprendre.
Si aux siècles derniers il fallait être investi du droit divin pour être monarque, aujourd’hui c’est le pouvoir économique investi d’une « mystique liberté » qui fait et défait les dirigeants des démocraties et remplace les dictatures. Compte tenu de la complexité des circuits tant financiers qu’économiques les citoyens s’en remettent à des schémas caricaturaux présentés par les acteurs politiques, si bien que par le jeu subtil de la puissance des médias soumis aux financements des publicistes, des caricatures thématiques façonnent « l’opinion publique ». Ceci de telle manière que les citoyens qui la composent abondent sans réflexion et par conditionnement (télévisuel et cinéma essentiellement) en ce sens, laissant libre cours aux activités des oligarchies qui font et défont les politiques des États et dont les élus se font les rapporteurs. Ce glissement nous a entraînés vers la reconnaissance unanime de la loi du marché par les grands partis politiques. Et même si les citoyens votent, ils le font sur des choix qui leur sont imposés par la loi du marché, donc indirectement par les oligarchies économiques qui de familles se sont reconstituées et élargies avec le temps, par cooptation en classe anonyme ou presque, en dominants systémiques. De fait nous sommes dans des démocraties oligarchiques reconstituées.
Ainsi, lorsque la réalité des systèmes d’autorités précise les contours de la liberté subjective, l’on peut dire que la liberté d’agir et de choisir s’apprécie moins par le choix d’un gouvernement, dit démocratique, que par la capacité de disposer d’un moyen économique, qui s’acquiert pour certains par l’exercice d’un « travail. »
Cette liberté sera certes conditionnée par la garantie d’une activité économique ou d’un travail, mais aussi par la hauteur de ses revenus (monnaie) qui seront fonction de l’aptitude de chacun dans la sélection socio-historique à hériter ou acquérir la propriété économique, ou de se situer dans la hiérarchie du salariat.
Toutefois, il ne s’agit pas seulement pour le salariat d’avoir un travail, mais d’être associé à la définition des conditions de son exécution et par là d’avoir accès à toutes les libertés publiques que l’État garantit par le droit ou par contrat.
Toutefois ces conditions ne sont pas définitives et il est toujours possible d’en définir de nouvelles ou en restreindre certaines, pour s’insérer dans une solidarité mécanique dans laquelle chacun exprimera ce qu’il pense devoir être la « liberté de son individualité ».
Cette liberté sera bien évidemment suggérée par la condition sociale et par l’éducation de l’individu concerné. Pourtant soumis à n’importe quel examen cette « liberté de son individualité » (que l’on considère souvent être la liberté arbitraire) se révèle n’être qu’une appréciation personnelle de la « liberté positive » en fonction de l’évolution des valeurs normatives. Elles-mêmes redéfinies par la recherche de cette liberté transgressive au nom de l’intérêt individuel permis par la liberté subjective.
Pour suivre cela il faut se référer à
et elles font l’objet de remises en cause par des politiciens qui s’en disent les garants.
Rapporté comme cela, il semblerait qu’il ait seulement fallu légiférer pour qu’apparaissent les moyens garantis et que le droit les préserve. Or cette vue n’est qu’un joli conte et c’est méconnaître son histoire sociale que de croire cela. Notre société est parvenue à ces garanties constitutionnelles, par une lutte permanente, illégale de fait, par transgression des lois définies sous des gouvernements qui affirmaient tous garantir les libertés publiques issues de la déclaration des droits de l’homme, sur laquelle veillaient les systèmes judiciaires.
L’histoire nous démontre que tous les combats pour la liberté font surgir de nouvelles oppressions ; de telle sorte que la conscience de la liberté s’affirme par une privation de liberté qui passe inaperçue dans l’individuation.
Ainsi, il n’y a pas de liberté qui soit immanente en dehors de celle issue de la condition humaine, et comme elle a été reconnue, elle peut tout aussi bien disparaître, pour cela il suffit d’en revenir à la « liberté arbitraire », « le faire ce que je veux » de l’Un avec les moyens fournis par la nature. Comme l’homme ne peut existe seul, il doit trouver les moyens d’asservir les autres pour exercer sa toute-puissance. Mais ceci ne peut pas se produire par un retour vers un ordre organique « animalier » ou dans une réorganisation de la solidarité « mécanique », dans le meilleur des cas ce sera vers une tyrannie ou une anomie, et dans le pire des cas vers un cloaque pour reprendre l’expression de Calhoun.
De plus cette liberté économique que certains voudraient résumer dans le slogan « travaille et tais-toi » repose sur un archaïsme de nos relations entre employeurs et employés, le louage de sa force de travail codifiée en 1804 ; un progrès pour l’époque où beaucoup de journaliers et manouvriers ne recevaient que leur repas en paiement.
Alors pourquoi est-il devenu honteux de défendre sa condition sociale et honorant que les entreprises embauchent au moins-disant ?
Faudra-t-il ne recevoir en paiement de tout travail qu’une gamelle pour comprendre cette absurdité ? Est-cela la liberté économique ?
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