La taxe sur les transactions financières
En janvier 2016, de nombreux états membres de l'Union Européenne mettront en place une nouvelles forme de taxation financière appelée Taxe sur les Transactions Financière (TTF).
Le G-20 qui est composé des 8 membres du G8 ( Canada, Allemagne, France, Italie, japon, Royaume Uni, Russie, USA, UE) ainsi que de l’Argentine, l’Australie, le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Mexique, la Corée du Sud, l’Arabie saoudite, l’Afrique du sud et la Turquie, représente 85 % du commerce mondial, les deux tiers de la population mondiale et plus de 90 % du produit mondial brut (somme des PIB de tous les pays du monde). Lors de son sommet de Toronto en juin 2010 à propos des marchés financiers et de l’économie mondiale suite à la crise économique de 2008-2010 et dont le titre du sommet « Reprise et Renaissance », en référence à la relance économique suivant la Crise économique de 2008-2010 préfigurait les débat sur l’évaluation des résultats des réformes du secteur financier mondial et des mesures soutenues de redressement de l’économie. Dans le cadre de la promotion et du libre-échange, beaucoup de nation ont proposé la création d’une taxe « mondiale » sur les transactions financières. Cette proposition s’est heurtée au mur des lobbies financiers, FMI et banque mondiale en tête. Après l’échec des négociations du G20, le 28 juin 2010, l’exécutif de l’Union européenne annonce qu’il allait étudier si l’UE devait imposer seule une taxe sur les transactions financières. Le lendemain, la Commission européenne prescrivit l’instauration d’une taxe sur le secteur financier de l’UE sur le modèle de la taxe Tobin afin de générer des revenus directs pour l’Union européenne. Les pays comme le Royaume uni, la Suède, le Danemark, la Hongrie s’y opposèrent. D’autres pays comme l’Allemagne, la Belgique, l’Autriche commèrent à étudier secrètement les modalités de cette taxe.
Le 6 mai 2014, les ministres des Finances de dix États (France, Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Estonie, Grèce, Italie, Portugal, Slovaquie), signent un accord de mise en application de cette taxe pour l’année 2016, la Slovénie rejoindra le groupe quelque temps après. Les objectifs de la proposition sont d’éviter la fragmentation du marché intérieur qui pourrait résulter de nombreuses approches nationales différentes sur la taxation de transactions financières, d’assurer une contribution substantielle et équitable du secteur financier aux finances publiques, et de décourager les transactions financières qui ne contribuent pas à l’efficacité des marchés financiers et aux économies réelles. Cette initiative représentait aussi un premier pas tangible en vue de la mise en place d’une taxation des transactions financières au niveau mondial et aussi une façon de faire la nique au G20. La proposition a une approche « triple A », c’est-à-dire que la taxe doit s’appliquer à tous les marchés (les marchés régulés ainsi que les marchés de gré à gré), à tous les instruments (actions, obligations, produits dérivés etc.) et à tous les acteurs (banques, banques fictives, gestionnaires d’actifs etc.). Cela devait ainsi réduire les risques de distorsions entre les différents segments du marché et de planification fiscale, de délocalisation et de substitution.
A l’origine, la proposition de la Commission européenne aux onze pays de l’UE concernés prévoit d’imposer à 0,1 % les actions et les obligations, et à 0,01 % les produits dérivés (option d’achat et de vente, warrants, indices boursiers, vente à découvert, indices énergétiques, indice matières premières etc.). Une taxe qui pourrait rapporter, selon elle, 35 milliards d’euros par an. Le projet prévoit que la TTF pourra être prélevée sur toute transaction financière, à partir du moment où l’une des parties est domiciliée dans un des onze pays participants. Par exemple : une personne ou entité habitant en France opère une transaction financière chez un cabinet à la City et transfère ses bénéfices sur son compte au Luxembourg, devra quand même s’acquitter de la taxe en France, car elle a sa domiciliation fiscale dans l’un des 11 pays signataires.
Vous vous doutez bien que ce point qui pose problème aux pays non signataires, Royaume uni, qui abrite l’une des principales places financières du monde, en tête. Selon eux, cela conduirait de manière injustifiée les pays participants « à exercer leur juridiction sur des entités localisées en dehors de la zone concernée par la législation » en question. Par exemple, pour une transaction financière entre un établissement établi en France et un autre en Grande-Bretagne, la France taxerait la totalité. En revanche, pour une transaction entre un établissement français et un établissement allemand, la taxe serait partagée entre les deux pays.
D’après le Royaume uni qui est vent debout contre cette réforme, cette situation serait « discriminatoire » et pourrait causer « une distorsion des mouvements de capitaux ». Depuis ce temps, tout le monde pense que ce projet est au point mort. Il ne faut pas oublier que c’est l’Allemagne qui est à la baguette, qu’ils ont des soutiens forts tels que la Belgique, l’Autriche et l’Espagne et tel un rouleau compresseur, ils avancent très vite, très bien et dans le plus grand secret.
Cette taxe devrait entrer en application en janvier 2016. Si nous adoptons un scénario catastrophe d’une chute de 15% sur les obligations et actions et de 75% sur les produits dérivés (chiffres retenus par la Commission européenne pour réaliser sa propre étude d’impact au niveau européen, mais chiffre très pessimistes), les revenus annuels de la TTF pour la France seraient de 15 milliards d’euros. Et même si les échanges sur les actions et obligations étaient divisés par deux (estimations alarmistes selon moi) les revenus atteindraient tout de même 9,6 milliards d’euro. Taxe dix fois plus efficace que la baisse des allocations familiales, qui ne parvient à afficher que 800 millions d’euros de rendement avec un coût politique désastreux. Les prévisions optimistes tablent sur une taxe qui pourrait rapporter 24,4 milliards d’euros par an à la France. Donc la fourchette se situe entre 15 et 20 milliards d’euro. Les revenus pour les finances publiques outre-Rhin s’inscriraient dans une fourchette de 17 à 28 milliards d’euros
Le calcul du rapport de cette taxe se complique singulièrement lorsqu’il s’agit de comptabiliser les dérivés qui font l’objet de transaction « over the counter », c’est-à-dire hors des marchés régulés, le plus souvent directement entre une banque et une entreprise. On reconnaît le pragmatisme allemand qui ne taxe que très modérément ces transactions pour se focaliser sur les transactions d’actions et d’obligations qui sont, complétement transparentes
Dans une Europe aux finances publiques malmenées, les Etats qui se sont engagés dans cette coopération renforcée auraient tout intérêt à accélérer le processus. Il est aussi étrange de constater la résignation du Royaume uni qui en ayant bien compris qu’une partie de cette taxe permettrait de remplacer une partie des contributions nationales au budget européen, a décidé de lâcher l’affaire.
Pourtant, les discussions s’éternisent entre les 11. Deux pays trainent singulièrement les pieds : la France et l’Italie. Le sujet n’a même pas été évoqué lors du dernier conseil entre les ministres de l’économie et des finances, le 14 octobre dernier.
Bercy se garde de publier la moindre étude qui officialiserait cette cagnotte potentielle. Michel sapin, ministre des finances, considérant cette taxe comme un pourboire accordé par les banques, s’est même fendu d’un commentaire : « La taxation n’est pas forcément faite pour rapporter, mais pour dissuader ». Alors que toute les études tablent entre 9 milliard pour les plus alarmistes et 24 milliards pour les plus optimistes, la communication du gouvernement français est : « cette taxe ne rapportera rien ou très peu à l’état ».
Il faut savoir que le marché des produits dérivés est particulièrement sensible à la variation des coûts et, avec la TTF, toute une activité de trading et d’arbitrage disparaitra. Hors BNP Paribas, le Crédit Agricole et surtout la Société Générale sont en pointe sur ce marché des dérivés actions. Et ils ont de sérieuses inquiétudes sur l’application de la TTF qui déstabilisera forcément ces établissements bancaires. On sait maintenant (quoiqu’on l’ait toujours su) pour qui roule Bercy.
Selon le lobby des banques, cette TTF écartera la « mauvaise finance », celle qui à la manière d’un Kerviel joue sur la spéculation, mais aussi, celle, la même, qui apporte de la liquidité aux marchés et permet aux entreprises de recourir à d’indispensables éléments de couvertures des risques. Cette opinion fait beaucoup rire les allemands et confirme ce qu’ils pensent de notre expertise en matière d’économie financière.
Nous avons donc :
Comme virulents opposants à cette taxe, bien qu’en théorie membres des 11 : Michel Sapin, Pierre Moscovici, Matteo Renzi, Pier Carlo Padoan.
les états qui ne sont pas membres des 11 et qui ont intégrés et admis cette réformes : le Royaume uni, le Danemark, les Pays Bas.
Les états membres qui continuent secrètement les discutions et qui mettront quoiqu’il arrive cette réforme en application le 1° janvier 2016 : l’Allemagne, la Belgique, l’Autriche et une partie des pays baltes.
En conclusion, cette taxe verra bien le jour et nous pouvons nous réjouir que des personnes tels que Wolfgang Schauble, ministre des finances allemands, Angela Merkel, chancelière, œuvre pour on harmonisation fiscale des transactions financières et accessoirement nous aide à résorber notre déficit et limiter notre endettement, alors que des personnes comme Michel Sapin, Pierre Moscovici, Manuel Valls et (parce qu’il n’est responsable de rien) François Hollande continuent de croire au bien fait de l’austérité et espérer que l’industrie allemande relancera notre croissance en berne.
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