Le stress favorise la croissance, pourquoi le combattre ?
Plus d’un salarié européen sur 5 déclare souffrir de troubles de santé liés à un emploi stressant. Aucun secteur d’activité n’est épargné par le stress qui, cumulé à une surcharge de travail, peut mener au surmenage. Ce dernier va même jusqu’à toucher des stars comme la chanteuse britannique Lilly Allen.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH200/Yoga_Class_at_a_Gym-c56d0.jpg)
Un sondage réalisé en janvier dernier dévoilait que 12,6% des actifs étaient sujets à cette pathologie. Le risque est particulièrement élevé chez les agriculteurs (23,5%), chez les artisans, commerçants et chefs d’entreprise (19,7%), et les cadres (19%). Le magasine aufeminin.com avançait récemment que 63% des mères qui travaillent sont épuisées et surmenées. Malgré ces chiffres alarmants, une autre réalité domine les esprits : le besoin de croissance pour faire baisser le chômage.
Aujourd’hui, tout le monde est stressé : le travailleur parce qu’on lui demande toujours plus de « compétitivité », le chômeur parce qu’il est exclu du monde du travail. Plutôt que de considérer ce symptôme comme la manifestation d’un mal-être généralisé et préoccupant, on ne fait qu’en parler superficiellement, agitant ainsi la crainte de se retrouver dans ces 12,6% de personnes ne résistant pas à la dure sélection naturelle du monde professionnel.
Des moyens considérables sont donc mis en œuvre par les travailleurs et les chômeurs pour combattre ce stress, et s’assurer de rester socialement inclus : le sport, le yoga, le spa, les divertissements permettant de « déconnecter » (cinéma, parcs d’attraction…), la pratique intensive des réseaux sociaux, le shopping, les compléments alimentaires, les accessoires comme les balles à malaxer, les chewing-gum… Toutes ces activités contribuent fortement à la croissance.
Le budget mensuel consacré à la relaxation ne cesse d’augmenter selon un article du Figaro Madame : 130 euros en moyenne à Paris et jusqu’à 160 euros sur la Côte d’Azur. Les centres de yoga fleurissent dans la capitale et en province – on compte un million de pratiquants dans l’Hexagone. De plus en plus d’entreprises proposent à leurs salariés des cours de tai-chi, de sophrologie ou des ateliers de réflexologie. « D’après les spécialistes, le marché demeure encore immature, mais il offre de formidables opportunités. »
Depuis quelques mois, NIVEA surfe sur cette vague en proposant des déodorants protégeant contre le stress :
Dans ce spot, il nous est expliqué que le stress produit une transpiration « différente », c’est-à-dire, qui empeste plus que d’habitude. Le ou la protagoniste de la pub (il y a un déo homme et un déo femme) participe à un jeu télévisé type Le Millionnaire. Ce décor illustre parfaitement la compétition économique dans laquelle le travailleur est sommé de répondre à de plus en plus de questions de la part de ses supérieurs ou de ses clients. Le temps imparti en parallèle, diminue bien entendu, mais comme tout cela n’est qu’un jeu…
D’autres secteurs d’activité exploitent le filon comme la literie par exemple, ou les automobiles fournissant un habitacle détendant. C’est pourquoi il m’apparaît que le stress ne peut être combattu par la société que de manière apparente, car il profite à de nombreuses personnes. Ces personnes étant elles-mêmes stressées, elles n’auront pas intérêt à favoriser un bien-être plus grand chez leurs congénères. Simple question de jalousie.
Diminuer le stress semble bien trop risqué pour la croissance vacillante de notre pays développé. Si quelques associations, journalistes et artistes signalent les dangers du stress et du surmenage, leur voix n’est que l’écho de la conscience, lui-même submergé par l’inconscient productif imposant de croître afin que le bien-être global augmente. Ceci est une course sans fin.
Joaquim Defghi
Blog : actudupouvoir.fr
Twitter : @JDefghi
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