Le trio infernal, dettes, chômage, croissance, doit se résoudre en changeant de paradigmes
La crise financière de 2008 a engrossé les dettes publiques pour sauver les banques. Celles-ci se portent bien et empochent des intérêts sur les dettes publiques. Les politiques d'austérité, loin de résorber les dettes publiques, provoquent la stagnation, les récessions et la déflation : d'où la ''croissance'' du chômage. Les responsables politiques et les experts appellent de leurs voeux le retour de la mirifique croissance créatrice d'emplois et de rentrées fiscales supplémentaires. Après 7 années d'incantations et de mesures inadaptées il est grand temps de changer de paradigme et de logiciels d'interventions économico-financières.
Les politiques d'austérité imposées par la Troïka, avec réduction des salaires et des retraites, réduction du nombre de fonctionnaires, augmentation des taux des impôts, se traduisent dans la réalité par un doublement du nombre de chômeurs, avec des taux de l'ordre de 25% en Grèce, Espagne,... et de l'ordre de 40% chez les jeunes. Les PIB ont fondus de 10 à 25% par rapport à 2007, augmentant la dette publique relative en % du PIB d'un même facteur. Les déficits budgétaires gonflés pour soutenir les banques se réduisent peu à peu en pesant lourdement sur la consommation et sur l'activité. La demande est atone et réduite d'où l'impossibilité d'un développement de l'offre et de l'activité en absence de demande. La croissance n'est pas au rendez-vous et l'inflation induite par une progression de la demande reste nulle ou négative !
Le FMI en premier a constaté l'inadaptation des politiques d'austérité, suivi par toute la Troïka. Pour la Grèce, élève autrefois indiscipliné et manipulateur, les mesures imposées étaient des sanctions ruineuses pour le peuple grec. Devant leur inefficacité et l'importance des charges d'intérêts exorbitantes gonflant la dette, une partie de la dette publique a été annulée et les pays membres de l'Eurogroupe se sont portés garants des emprunts nouveaux de la Grèce, emprunts ne servant qu'à rembourser des échéances d'anciens emprunts.
Suite à l'arrivée de Siriza au pouvoir avec leur réputation de gauchistes contestataires de l'ordre néolibéral européen et mondial, la Troïka a durci ses prescriptions pour déstabiliser Siriza, au point de pousser Tsipras à la démission. La confirmation par de nouvelles élections de la légitimité d'un Tsipras plus réaliste va peut-être débloquer la situation grecque, puis celles des PIIGS.
Déjà la BCE a infléchi sa politique en rachetant quelques emprunts grecs sur les marchés financiers, et en ''remboursant'' les intérêts qu'elle perçoit sur ces emprunts. Puis par sa politique dite de QE d'injection de 60 Mds € par mois pendant 18 mois minimum (1080 Mds €) par création de monnaie pour racheter principalement aux banques des emprunts sur les pays de l"Eurogroupe, et plus particulièrement ceux des PIIGS, Grèce en tête. Le but officiel est d'injecter des liquidités dans le système bancaire pour permettre de soutenir les investissements des entreprises et soutenir l'activité. Après 6 mois, l'effet induit sur l'activité, la croissance et le chômage est quasi nul ! Le seul bon effet est la baisse de l'euro vis-à-vis du dollar, le surenchérissement des importations étant plus que compensé par la baisse du prix du pétrole et du gaz.
Un premier pas vers l'assainissement des dettes publiques
La politique de QE de la BCE devrait être étendue d'abord à la totalité des emprunts de la Grèce, y compris ceux souscrits auprès des membres de l'Eurogroupe ou garantis par ces derniers, de sorte que la Grèce se contente de rembourser sur plusieurs décennies seulement le capital dû à ce jour. Cette adaptation du QE concerne moins de 320 Mds€ (dette totale de la Grèce), soit moins d'un tiers du montant total initialement prévu. En parallèle, la BCE doit faire porter les efforts sur les cas les plus graves du Portugal et de l'Irlande en rachetant une grande partie de leurs dettes, puis sur l'Espagne et l'Italie pour une plus faible partie. La BCE adapte les remboursements en capital aux possibilités des États.
La Grèce, sans emprunts nouveaux pour rembourser les anciens, pourra ainsi rembourser progressivement la BCE, dans la douceur sur une cinquantaine d'années, car la BCE n'a pas de dividendes à verser à des actionnaires, et n' a pas à prendre en compte l'inflation dans sa comptabilité. Les autres pays des PIIGS seront dans une situation plus confortable d'austérité faible, supportable par les peuples et les entreprises. D'où l'apparition de sentiments de soulagement et de confiance retrouvée ! Il en résultera une petite croissance, une très faible inflation, mais pas une résorption massive du nombre de chômeurs, loin de là.
Un second pas pour réduire le chômage et retrouver une certaine croissance
Les experts économistes et financiers peuvent déblatérer dans les médias sur les mesures à prendre pour retrouver l'hypothétique voie de la croissance créatrice d'emplois, ils oublient l'essentiel, à savoir, qu'il faut créer des activités supplémentaires, pas nécessairement nouvelles, ne se substituant pas aux activités en cours. Les pouvoirs d'achat des consommateurs et les capacités d'investissements des collectivités publiques ont tendance à se réduire par manque de moyens. Certes les experts ne peuvent qu'être en accord avec la réflexion ci-dessus, et s'y opposer du fait de l'absence de financements pour des investissements à la rentabilité douteuse ne permettant pas les remboursements des capitaux majorés des intérêts. De toute façon, il existe sur les marchés suffisamment de liquidités pour s'investir dans des projets à forte ou moyenne rentabilité, suffisante pour retrouver leur mise majorée des intérêts ou dividendes. Ce qu'il faut envisager ce sont les réalisations à la rentabilité immédiate incertaine ou insuffisante sur le court/moyen terme mais à forte durée de vie. Quelle était la rentabilité originale dans la construction par les Romains du Pont du Gard et des arènes encore existantes ? De même pour la construction de la Cité de Carcassonne au moyen-âge et sa réhabilitation par Viollet-Leduc il y a plus d'un siècle. Et aussi pour la Tour Eiffel, le palais du Louvre, les remparts de Saint-Malo et de bien d'autres villes ou ports.
De nos jours les conséquences sur la planète et sur la santé humaine des activités humaines et industrielles s'expriment par le réchauffement climatique, les catastrophes climatiques, les pollutions de l'air, des eaux et du sol, la disparition de nombreuses espèces et la réduction importantes des ressources fossiles (hydrocarbures et minerais) et halieutiques. Dans tous les domaines les mesure à prendre dès maintenant coûteront moins cher que si on les diffèrent de quelques années et surtout de quelques décennies. Par exemple, les réalisations de transports en site propre, peu polluants comme l'extension du RER du Grand Paris ou les projets de métros ou trams dans les villes, sont des exemples d'infrastructures dont la durée de vie s'exprime en siècles et dont les coûts devraient être amortis sur au moins une cinquantaine d'années. Elles ne peuvent donc être financées par les marchés financiers exigeant des taux d'intérêts. Il en est de même pour les infrastructures de protection contre les inondations maritimes, pluviales ou fluviales. Lorsque que de grandes réalisations sont financées par le privé, le contribuable et le consommateur sont ponctionnés. Deux cas d'école : le premier, le Viaduc de Millau, magnifique réalisation, est amorti financièrement par des péages couvrant des taux d'emprunts de beaucoup supérieurs aux taux actuels de 1 à 2% consentis à la France ; le second, la production d'électricité dite renouvelable fait l'objet de subventions des collectivités publiques (pour le solaire) et d'un prix de rachat du kwh par les distributeurs nettement supérieur à leur prix de vente (solaire et éolien), la différence étant compensée par une taxe payée sur toutes les consommations des clients, taxe dont le taux augmente au fur et à mesure que les parcs d'aérogénérateurs et de photovoltaïques se multiplient ! dans les deux exemples, les profits et bénéfices vont aux ''investisseurs et financiers'', au détriment des consommateurs et contribuables qui ne peuvent plus alors alimenter la croissance tant attendue.
Tant que l'on reste dans le paradigme que seul le financement privé, dans des économies lessivées par la finance où les taux ce croissance restent inférieurs aux taux d'intérêts, permet de retrouver croissance, créations d'emplois et réduction du chômage, le marasme économique se perpétuera. La fourniture de QE aux banques par la BCE n'a que que de très faibles retombée économiques car le système actuel n'est que conforté par les émissions de QE.
La création d'activités supplémentaires, avec des emplois en conséquence, doit procéder d'un autre paradigme. Le QE pour assainir les marchés des dettes publiques et les ramener à des taux voisins de zéro appliqués par la BCE, taux comparables aux taux de croissance des PIB, reste une bonne initiative. La BCE doit aller plus loin en cofinançant avec les États des projets et réalisations non amortissables selon les critères usuels des banques, mais d'utilité publique locale, nationale ou planétaire. Les projets et réalisations concernées sont évoquées ci-dessus. La BCE finance alors directement 50% des montants TTC, les États et collectivités publiques les autres 50%, comme dans le dispositif DOMO, déjà explicité par l'auteur, sur Agoravox. Les travaux auront besoin d'une main d'oeuvre supplémentaire, car ne rentrant pas dans le système économique en cours. Donc baisse du nombre de chômeurs. La part (50%) du financement public sera plus que compensée par les prélèvements publics (taxes, impôts, charges sociales) supérieurs à 50% en direct et beaucoup plus en considérant l'activité indirecte y découlant. Les travaux ainsi financés dégageront une rentabilité insuffisante pour un financement bancaire, mais largement suffisante pour rembourser la BCE sur 50 ans (1% du coût des travaux par an). 100 milliards € de la BCE par an pendant 10 ans, soit 200 Mds € par an avec la part publique nationale, c'est en direct 2 millions d'emplois, et 5 millions en comptant les indirects ! Le jeu en vaut la chandelle ! Il y aura aussi des profits pour les entreprises. Les banques seront court-circuitées sur une faible partie de leurs activités bancaires et surtout elles subiront une réduction potentielle de leurs profits : crime inacceptable quand bien même sans le DOMO les profits incriminés n'existeront pas !
Cette solution, ce nouveau paradigme n'étant pas présenté par une super commission d'économistes et de financiers dûment patentés, est nulle et non à venue, malgré son efficacité : ainsi va notre monde à sa perte !
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