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Le Web 2.0, l’offre et la demande

Plus discret que la « bulle » de la fin du siècle dernier, le Web 2.0 n’en soulève pas moins un enthousiasme parfois digne des excès d’il y a cinq ans. Aucun domaine n’est épargné et la relation entre producteurs et consommateurs est en passe, dit-on, d’être revisitée en profondeur. Il en va de la rencontre entre l’offre et la demande, un thème dont le poids dans la théorie économique est loin d’être négligeable, mais au sujet duquel le marketing, paradoxalement, fait encore parfois preuve de conservatisme.

La dimension « collaborative » du Web 2.0 a un impact direct sur l’organisation de la confrontation entre l’offre et la demande. Le consommateur, on le comprend aisément, est invité à prendre part dans la production de valeur ajoutée, notamment en son aval (réservation de billets en ligne, e-commerce ...). Plus en amont, il peut réagir sur les produits, faire connaître son opinion, bref, prendre part à la fonction marketing du producteur.

L’avantage du Web 2.0 est d’accroître la réactivité des acteurs, et de faciliter l’expression du consommateur. Le miracle de la technique réside dans une contraction du temps si radicale qu’elle permettrait un quasi-dialogue dans l’instant entre l’offre et la demande.

De là à en déduire que le consommateur est associé à la définition du produit, il n’y a qu’un pas à franchir ; certains n’hésitent pas à le faire, laissant croire en la possibilité d’une inversion des rôles dans la relation client.

L’idée d’une égalité de nature entre l’offre et la demande est ancienne. Elle est au cœur de la théorie de l’équilibre général, en supposant que les acteurs sont purement rationnels. Mais elle devient difficilement défendable. La référence à l’« Essai sur le don » de l’anthropologue Marcel Mauss se fait de plus en plus insistante en économie. Comme le dit Jean-Joseph Goux : « La préoccupation centrée sur l’offre est le génie du capitalisme ». Les travaux de Karl Polanyi, peu connus mais fondamentaux, ont amplement démontré qu’historiquement, l’idée d’une production répondant à des besoins existants ne tient pas ; c’est le commerce « au long cours » qui l’a tirée en lui assurant un lieu susceptible de générer le désir, à savoir le marché. L’offre a toujours précédé la demande, elle n’est pas une réponse. Plus récemment, un J.K Galbraith, repris par J.Baudrillard, n’hésitait pas à affirmer que le capitalisme produit la demande en même temps que les biens qui sont censés la satisfaire.

Les exemples ne manquent pas. La profusion des start-up lors de la « bulle » restera un cas d’école. L’offre était si abondante et si soudaine que la demande, surprise et peu préparée, n’était pas en mesure de suivre. Tous ignoraient la direction qu’elle allait prendre. Voilà pourtant qu’en quelques années, téléphones portables, sites, blogs et autres merveilles de la technique, font l’objet d’une demande qui confine à la logique de l’addiction.

L’offre et la demande ne se confrontent pas dans le but de réguler la satisfaction de besoins. Les concepts de besoin et de système économique sont incompatibles, comme semble l’indiquer l’ethnologie contemporaine, celle de Pierre Clastres ou de Claude Lévi-Strauss. Le marché est un moteur dont le combustible est le désir. Or, par essence, le désir est inconscient, ignorant son objet jusqu’à ce que l’offre le lui révèle. Le déséquilibre entre l’offre et la demande est dans ce partage des rôles dont on voit bien qu’il ne saurait être remis en cause. Si la demande est toujours en position de sanctionner la pertinence de l’offre, on ne pas en conclure qu’elle est capable de lui dicter ses principes et donc de la supplanter en inversant l’ordre des choses.

Sur ce point, il faut s’attendre à ce que le Web 2.0, fût-il paré de toutes les vertus dans le rapprochement du consommateur et du producteur, butera sur une sérieuse limite.


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6 réactions à cet article    


  • (---.---.101.8) 28 août 2006 11:58

    Article intéressant, dont la conclusion m’interpelle « Les concepts de besoin et de système économique sont incompatibles (...) Le marché est un moteur dont le combustible est le désir (...) le désir est inconscient, ignorant son objet jusqu’à ce que l’offre le lui révèle »

    Sans lancer une polémique un peu hors sujet, on peut qd même ne pas être d’accord avec ça ! Le désir peut parfaitement être conscient, c’est même mieux... le désir inconscient est généré par nos sociétés de consommation adeptes du superflu !

    Quant au «  »« web 2.0 »«  » à part une jolie farce marketing, ce terme ne signifie absolument rien ! la technique évolue en fonction de l’intérêt qu’elle peut apporter, et l’apparition de l’e-commerce et des blogs ne constitue pas une révolution technique.


    • (---.---.162.15) 28 août 2006 14:57

      Hé oui, un article de plus sur la « jolie farce marketing ». La conclusion est toutefois plus pragmatique que d’habitude puisqu’elle dit que cette fumeuse Toile 2.0 aura une sérieuse limite... Effectivement, le creux aboutit sur pas grand chose...

      Par ailleurs, moi aussi, je ne vois pas du tout pourquoi, par essence, le désir serait toujours inconscient... On est certes souvent stupide, mais pas à ce point là... Enfin, à relire le propos, il doit être possible de corriger « désir » par le « désir sans offre », ça m’apparaît alors davantage plausible...

      Am.


    • Philgri (---.---.139.25) 28 août 2006 18:52

      Nul et sans avenu.

      Arrêtons de chercher la poule aux oeufs d’or. çà n’existe pas. La richesse du web est ailleurs. Mais apparemment certains ne l’ont pas encore compris. Beaux gadins en perspective ! de belles réussites aussi, mais certainement pas là ou vous l’attendez.

      Philgri.


      • yam (---.---.35.174) 30 août 2006 15:21

        lol, encore des frustré de la bulle, peut-etre que nos chers commentateurs n’ont pas pris le temps d’approfondir le sujet : alors je vais tenter brievement de vous éclairer.

        1- le web 2.0 est tout sauf un acronyme web-marketing, le web2.0 est devenu une necessité, tant les techniques utilisés dans la construction de site web ont atteint leur limite. le html est mort vive le xhtml.

        2- il comporte aussi son lot d’innovation technologique, web-service, AJAX, application et architecture décentralisées.

        3- L’aspect communautaire y revet une importance capitale. Pour info, le site youtube.com est devenu depuis son lancement en fevrier 2005 le premier site de la planete en termes d’audience. merci la communauté d’avoir enrichi le site de la meilleur manière qu’il soit.

        et d’ailleur l’ensemble de la profession, ne parle pas de révolution mais d’évolution, et si le terme web.2.0 vous choque, c’est peut etre que le changement vous fais peur. Mais comment faire autrement pour informer le public que la maniere de surfer va changer...sans oublier que les vrais révolutions du web2.0 n’ont pas encore vu le jour. patientons encore un peu


        • etudiant assistant de gestion (---.---.206.156) 29 mars 2007 18:31

          J’aimerai connaitre votre point de vue sur « vaut il valoriser l’offre ou la demande » j’ attend avec impatience vos com merci d’avance

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